Obscurité. Tout n'était que noirceur et ténèbres. Halos à la pâleur inexistante, avalés par les ombres galopantes, ne laissait de place qu'aux rêveries cauchemardesques de l'homme qui s'y noyait. Habité par ses propres démons, il voyait se dessiner les traits de ces monstres qu'il avait lui-même crée, marionnettes maladroites toutes vêtues de noir qui se massaient tout contre lui pour mieux le blesser. Quelques voix, parfois, déraisonnaient à ses oreilles pour mieux lui faire vriller les tympans, et le plongeaient dans une tourmente sans nom. Alors, il hurlait sans pouvoir entendre le son de sa voix, il criait sans pouvoir percer le silence qui l'entourait et se laisser aller aux accents de sa fureur. Poings heurtés aux murs de cette prison de granit, il s'écorchait les chairs dans l'attente folle de s'en voir délivrer, mourrait à petit feu de cette indifférence dans laquelle ont l'avait jeté. Prostré, le cœur en berne, il souillait son visage naguère humain du sang de ses mains, se faisait animal nocturne, en oubliait jusqu'à son humanité. C'était ainsi qu'il allait survivre, c'était ainsi habité de ces pensées les plus chaotiques qu'il avait résisté à l'attente qui s'était acharnée.
Seulement, le temps avait finit par reprendre sa course, et les ténèbres dans lesquelles on l'avait enfermé avait fait place à un monde quelque peu changé. Le jeune homme charmant d'antan n'avait plus rien d'agréable aux regards de ces dames. Une barbe hirsute lui couvrait le visage, une tignasse emmêlés et grasse lui retombait sur les épaules maigrelette, son corps tremblait sous ses frusques en lambeaux qu'on lui avait laissé. Il ne ressemblait en rien à ce jeune homme de bonne famille que l'on avait naguère connu, il n'en restait plus que le regard vif et plein de cette hargne qu'on lui connaissait. C'était ainsi qu'il avait repris sa vie, c'était de cette façon qu'il était réapparu au sein de la société, et sans avoir les poings liés, il s'était encore senti à son arrivée dans la demeure familiale comme un prisonnier que l'on ne pouvait libérer. Il s'était senti enfermé jusqu'à ce qu'on le laisse seul face à lui même. La liberté était un concept difficile à vivre, surtout après deux années d'une captivité totale, et bien qu'il se fut rapidement débarrassée de ses frusques de prisonniers, il ne se sentait toujours pas emplis de cette sensation dont il avait rêvé. Son père, bien vite, avait oublié son récent passé pour faire comme si de rien n'était. Il s'était défait de cette idée qu'une telle existence n'avait rien de facile à effacer, et qu'il était d'autant plus difficile de récupérer sa vie d’antan qu'on ne lui en laissait pas le temps. Ainsi, à peine sorti de sa cellule à Azkaban fut il fiancé à une jeune fille qu'il n'avait plus vu depuis des années.
Jeune, c'était bien là le terme qui convenait le mieux à celle-ci. Plus jeune que lui de huit ans, elle était du même âge que sa sœur, et il n'arrivait que moyennement à se résoudre à s'en rapprocher. Il n'avait pas la moindre envie de se marier, et l'idée même qu'elle ne fut à ses yeux rien de plus qu'une enfant le laissait quelque peu contrarié. Il n'avait, cela dit, pas eu mots à dire à ce sujet, et son père avait bien vite éludé le sujet. Seulement, à mesure qu'il y repensait, qu'il réfléchissait à tout ce qui lui était jusqu'alors arrivé, à toutes ces choses qu'on lui avait transmis, qu'on lui avait imposé comme une évidence, il se disait que rien n'en valait vraiment la peine. La tête haute, et le regard morne, il avait finit par disparaître, abandonnant la demeure d'une famille qui en un rien de temps avait fini par l'étouffer pour retrouver cette demeure trop longtemps abandonnée. La solitude l'avait rapidement rattrapée, et comme une condition qu'il lui manquait il s'y était de nouveau enfermé.
Combien de temps passé enfermé au sein de sa propre maisonnée ? Il en avait perdu le compte, avait cessé de compter les visites impromptues de sa sœur, avait fini par ignorer les missives envoyées par une mère que tout semblait inquiéter depuis sa remise en liberté. L'ivresse avait laissé place à une gueule de bois des plus carabinée, s'il n'avait eu cette impression d’étouffer, assurément serait-il resté encore longtemps enfermé chez lui, remettant au goût du jour sa connaissance de ce monde qu'il avait abandonné. Il ne se serait jamais aventuré dans les rues d'une Pré-au-Lard où on le dévisageait comme une bête curieuse, murmurant quelques mots aux allures mauvaises sur son passage. En somme rien n'avait vraiment changé, il n'attirait toujours pas la sympathie, et l'allusion même à ses années d'emprisonnements jetaient d'ores et déjà un froid sur un quelconque rapprochement avec qui que ce soit. C'était apaisant, pour lui, de se sentir ainsi délaissé, et il avait trouvé un équilibre certain dans cette solitude qui l'apaisait.
Pourtant, bientôt, sa curiosité fut piquée par une silhouette qu'il aurait pourtant souhaitée éviter. Il n'était de fait pas bien difficile de reconnaître une Zabini, et bien moins encore celle à laquelle il se retrouvait, malencontreusement, fiancée. D'une fierté sans égale, elle restait tout de même pour l'homme qu'il était la petite fille qui jouait jadis avec sa sœur. Une petite fille qui, malgré tout, avait su acquérir les trop nombreux avantages du beau sexe, et s'il n'eut pas envie de se l'avouer sur l'instant, la donzelle était devenue fort jolie avec l'âge. Assez pour le charmer sur l'instant, assez pour lui donner envie de la suivre et d'oser lui adresser quelques mots. Faiblesse passagère qui le laissait craindre à quelques passions vagabondes par lesquelles il se laissait emporter, rien de bien grave si ce n'était ce sursit qu'il s'offrait en dehors des sentiers cloutés. Néanmoins, la créature qu'il suivait, farouche et en quête de ces choses qu'il ignorait, ne laissait que peu de traces derrière elle, comme pour s'acquitter d'une tâche qui ne devait pas être révélée. Intrigué, il lui emboîtait le pas sans vraiment en avoir l'air, se faisant témoin de ces choses qui n'ont d'ordinaire lieux que dans les bas-fonds d'un monte qui n'apprécie pas fréquenter.
Relents d'amertumes, de dégoûts, qui lui remontent le long de la gorge, et lui font bien vite oublier les quelques soubresauts d'envie qui l'ont animé. Finalement tout ce qui est beau semble, chez elle, déjà être spolié, ainsi fallait-il en croire les ragots et les ont-dit si prospères dans le monde qui est le leur. Voila, qu'il brûle de quelques colères ravalées tandis qu'elle se défait de cette fadeur née de l'attente frugales de quelques denrées empoisonnées. D'un pas, peut être plus, il n'aura de toute façon pas compté, il comble ce faussé fait de mètres qui les séparaient. De toute sa hauteur il surplombe sa petitesse, de sa carrure et de son ombre enveloppe sa frêle stature, s'abattent alors les mots autant que les maux qui le dévorent. « C'est comme ça que vivent les filles de maintenant ? Comme des putains camées ? La guerre a fait des ravages, mais c'est la société, finalement, qui va vous tuer. », rictus mauvais sur le bout de ses lèvres laissent apparaître le monstre qu'il était, drapé dans la morgue qui le caractérise, il s'écarte déjà, pour mieux s'en aller. Curiosité déjà se trouve effacée.