Pas un jour il ne m’arrive de ne pas penser à Miles. Où que j’aille, il est partout présent. Pourtant il n’est plus là. Physiquement. Je revois son visage souriant dans mes songes, mes pensées. Me remémore nos meilleurs souvenirs ensemble, ses blagues un peu bêtes qui arrivaient malgré tout à m’extirper un sourire. Ses bras réconfortants qui m’entouraient. Sa chaleur, sa présence. Je n’ai plus rien de tout ça. Je me demandais si ce n’était pas ce que je recherchais avec Levy. Quand nous sommes ensemble, mes pensées se troublent. Mon coeur tremble contre ma poitrine. Et quand je redeviens lucide, la culpabilité m'envahit ! C’est mon meilleur ami et puis...J’ai à chaque fois cette horrible sensation de trahir ma défunte meilleure amie. Rajoutons à ça que Xander en rajoute une couche en étant trop...Lui. Taquin, bienveillant, souriant et charmeur. Beaucoup trop ressemblant à ce qu’était Miles et j’en arrive même à voir des traits physiques similaires aux siens ! Peut-être que je deviens folle. Que Ethan avait raison. Sa mort, en plus de m’avoir traumatisée, m’avait fait pris conscience de cette importante faramineuse qu’il avait pris dans ma vie. Ses sentiments avaient certainement réussi à atteindre leur cible tout compte fait et que je ne m’en étais rendue compte que trop tard. Je n’en sais trop rien à vrai dire. L’amour, c’est d’un compliqué ! Même si je suis pas très douée en la matière, je ne suis pas dupe non plus en ce qui concerne mon entourage. Vous comprendrez où je veux en venir.
Je revenais dans la salle commune de ma maison pour me détendre un peu avec mes congénères. En entrant, mes yeux se posèrent aussitôt sur une Poufsouffle assise dans un coin à bouquiner, encore son écharpe autour du cou. En plein mois d’avril !! L’inquiétude et la curiosité m’avaient alors conduite à venir la voir pour en savoir plus. Surtout que ce n’était pas la première fois que je la voyais avec. “Tu n’as pas chaud comme ça ?” demandais-je gentiment, en me postant devant elle. Mon regard dévia ensuite sur ce qu’elle était en train de griffonner en plus de sa lecture. Je voyais le dessin à l’envers, mais j’avais de quoi affirmer que la Poufsouffle avait un joli coup de crayon. “J’ignorais que tu avais un talent pour le dessin, c’est magnifique.“ Ariane en avait un aussi. Tous ses dessins, je les avais gardé précieusement comme à la prunelle de mes yeux.
Xander et moi, on prenait notre rôle de préfet très à cœur. S'assurer du bon déroulement de notre maison était notre priorité. Les Poufsouffle sont solidaires, personne n'est laissé pour compte. Telle est l'une des devises de notre maison ! Mathilde n'avait en apparence pas le profil de quelqu'un qui avait des problèmes mais porter une écharpe en plein avril avait de quoi titiller ma curiosité. J'étais allée la voir pour m'assurer que je n'avais pas à m'en faire, pour parler un peu aussi. Je ne crois pas que nous ayons eu l'occasion de discuter toutes les deux et les années qui nous séparent ne devaient pas aider non plus à briser la glace. J'ai fais le premier pas, montrer que j'étais une oreille attentive sur qui elle pouvait compter en cas de besoin. Je crois que le sujet de l'écharpe provoqua un malaise chez Mathilde en plus de nier tout en bloc. Elle l'avait tout de suite enlevé de ses épaules quand j'en ai fait référence et elle jouait nerveusement avec son crayon. N'importe qui aurait compris que ça cachait quelque chose ! Ça ne m'empêcha pas de continuer à lui sourire ni à aller au bout de mon initiative. Je suis donc venue m’asseoir sur le fauteuil à proximité les yeux rivés sur son calepin. “Ne soit pas aussi modeste, tu dessines mieux que moi ! Je ne serais même pas capable de griffonner un dixième de ce que tu as fait. ” Affirmais-je en riant. A part des formes rudimentaires et des hommes bâtons, j'en ai jamais été très douée en esquisse. Du coup je prenais plus plaisir à observer les autres qu'à essayer moi-même. Je reconnaissais sur son carnet un soleil, un blaireau et une rose. Mon instinct me disait que les trois étaient liés mais j'ignorais en quoi.
Voyant que je me souciais de son bien être, la française s'excusa d'avoir été la source de mon inquiétude. Mathilde ne m'avait jamais dit d’où elle était originaire, mais son accent en disait long. J'ai eu la chance dans le passé d'avoir pu visiter ce merveilleux pays mais mon cœur demeurait attaché à ma contrée natale, l'Irlande. Miles était à moitié français et il m'avait fait la promesse de me faire visiter sa ville de naissance un jour. Malheureusement...Il est mort avant d'en avoir eu la possibilité. De ce fait, je m'étais jurée de m'y rendre dès que possible en son honneur. Présent dans mon cœur et mes pensées, c'était pour moi comme si on y allait à deux. "Tu n'as pas à t'excuser voyons ! Je me demandais pourquoi tu portais une écharpe en avril. Il ne fait pas froid...Ou alors tu es malade ? Tu n'en a pas l'air pourtant..."Je scrutais son visage, à la recherche d'un signe qui pourrait me guider vers cette éventualité. Mais je ne vis rien de suspect. Peut-être qu'elle n'est tout simplement pas frileuse et qu'elle se plaisait à porter l'écharpe de la maison ? Pour la mettre en confiance, j'ai mis en avant le fait que j'étais quelqu'un d'accessible et que j'étais là pour lui tendre la main si besoin. "N'hésites pas à venir me voir si tu rencontres un problème, d'accord ? Je me ferais une joie de t'aider." Je replaçais une de mes mèches blondes derrière mon oreille en gardant le même sourire bienveillant sur mes lèvres. Puis je pensa subitement à quelque chose. Plus exactement quelqu'un et je me mis à scanner la pièce sans trouver la personne que je cherchais. Un garçon adorable, que j’apercevais fréquemment aux côtés de Mathilde ces temps-ci. Ils me remémoraient un peu Miles et moi lorsque nous traînions ensemble bien que lui était un peu plus entreprenant que l'autre Poufsouffle. Il était Gryffondor, tout comme son frère Tristan. Brave, gentil et fonceur. "Au fait, tu n'es pas avec Niall ?" Demandais-je d'une voix sereine. Il pouvait être en cours car si ma mémoire ne me fait pas défaut, le grand blondinet était en quatrième année...
J'essayais d'apprendre à connaitre tous les Poufsouffle que j'avais sous ma responsabilité. J'aime bien communiquer et échanger. Mathilde me paraissait plus introvertie contrairement à d'autres, ce qui ne rendait pas la tâche facile pour déceler si elle avait des soucis. Je sais qu'ils sont nombreux à se questionner sur l'avancée de cette épidémie source d'anxiété. Je m'estimais être chanceuse de ne pas en être touchée, ce qui n'était malheureusement pas le cas de tout le monde. Mathilde me remit en tête qu'elle en a été victime et justifia son drôle de comportement en parlant de l'injection. Je l'aurais cru sur le champs mais mon instinct me disait bizarrement le contraire. "Tu es sûre...?" Je mis le sujet Niall sur la table et au lieu d'avoir une Poufsouffle devant moi, j'avais une tomate ! Elle bégayait tandis que je la voyais trifouiller son écharpe. Soit elle est affreusement timide et je l'ignorais, soit..."Tu...?" J'attendais qu'elle continue, qu'elle se justifie davantage mais elle avait l'attitude de celle ayant quelque chose à cacher. Je crois que j'ai touché dans le mille. Il y avait quelque chose entre eux c'était sûr ! C'est souvent comme ça dans les romances à l'eau de rose. La fille rougit quand on lui parle du garçon qu'elle aime. Elle se tortille et bégaye. Toutes les conditions étaient réunies ! "N'en dis pas plus, je crois que j'ai compris." Dixit la Préfète qui a compris trop tard que Miles et elle partageaient plus qu'une amitié fusionnelle. Toute ma vie je regretterais de ne pas avoir été claire concernant notre relation. Il est mort et à ce que je sache, on ne ramène pas les morts à la vie à moins d'être nécromancien. Mais ça, c'est une autre histoire. Rien que d'y penser j'en ai la chaire de poule. "Il te plait ? Niall je veux dire." Demandais-je naturellement d'une voix basse pour ne pas que les autres nous entendent. Une chose est sûre, c'est que Miles moi, il me plaisait. J'espérais ne pas me tromper pour Mathilde.