Poudlard, c’est grand. Très grand, même. Et je pense qu’il n’y a que peu d’élèves qui ont pu le visiter de fond en comble. Moi ça fait six ans que j’y suis, et je découvre encore régulièrement des nouveaux endroits. C’est fascinant. Il y a les endroits que personne ne connait, et ceux dont on m’a parlé mais dont je n’ai pas eu le temps encore de faire la visite. La galerie des portraits fait partie de cette seconde catégorie. Cela fait un moment déjà que j’ai connaissance de son existence, mais je voulais avoir vraiment le temps de l’explorer, car il parait que c’est immense. Il parait aussi qu’il faut avoir l’esprit bien accroché et que tous les portraits ne sont pas forcément bien intentionnés. Ce qui m’a poussé à m’y rendre aujourd’hui ? Je ne sais pas vraiment. L’ennui, peut-être. Je n’ai pas grand-chose à faire ces derniers temps, je suis en avance sur mes devoirs, et il commence à faire froid, donc passer du temps dans le parc représente une perspective relativement peu attractive. Explorer le château reste donc la meilleure option. Du coup, je me suis laissée guidée par mes pas et j’ai atterri dans la galerie. On m’avait dit qu’elle était grande, mais je n’imaginais pas à quel point. Je n’en vois pas le bout, malgré les torches qui éclairent les murs. Les tableaux s’alignent a perte de vue, anciens et récents se mêlant dans un éclectisme à la fois charmant et inquiétant. Et un bruit de fond, comme un bourdonnement sourd. Il me faut un peu de temps pour réaliser qu’il s’agit en fait des portraits chuchotant entre eux. Ceux qui sont le plus proches de l’entrée sont silencieux, certains m’observant ouvertement, d’autres plus discrètement. Les noms qui ornent les portraits me sont en grande majorité inconnus, même si certains me semble vaguement familiers, ce qui, vu le nombre d’ouvrage que j’ai eu l’occasion de consulter, n’est pas véritablement surprenant.
L’endroit est fascinant, mais aussi quelque peu anxiogène. Je suis seule dans la pièce, mais en même temps je me sens comme au cœur d’une foule, épiée, observée, jugée. Intimidant. Je n’ose pas m’adresser à eux, d’abord parce que je ne sais pas quoi leur dire, et parce que, franchement, j’ai peur. De quoi, je l’ignore. Le mieux, c’est déjà de ne pas rester plantée là, et d’avancer le long du couloir. Qui sait, je tomberais peut-être sur un portrait qui m’intéresse, ou à l’inverse qui me témoignerait un peu d’intérêt ou au moins de courtoisie. Le bourdonnement me semble un peu plus élevé, et le poids des regards me semble plus lourd. Mais pas question de partir, certainement avant d’avoir parcouru le couloir dans son entier. Quelque chose me dit qu’ils tentent de m’intimider, d’une manière ou d’une autre. C’est ce pourquoi on m’avait mise en garde. Que ces portraits n’avaient que très rarement de compagnie, et que plutôt que de bien l’accueillir, ils préféraient la malmener. Ce n’est sûrement qu’un jeu pour eux, mais ce n’est pas spécialement agréable. Heureusement pour moi, je ne suis pas quelqu’un de particulièrement trouillarde. Certains portraits m’intriguent plus que d’autres, parce que le nom me dit quelque chose, parce que le visage m’interpelle … Je me fais une note mentale d’aller faire une recherche sur ces gens. C’est quoi ce bruit ? Ca ressemblait à une porte qui s’ouvre, mais je n’en suis pas sûre. Je crois que j’ai rêvé en fait. Je deviens parano, c’est grave.