Speed-dating (Lionel & Ella)

Lionel avait passé une journée semblable à toutes les autres. Après son cours de relations internationales, il avait pris le chemin de la bibliothèque pour travailler son cours de droit. Assis à une table, un peu en retrait, seul, pour une rare fois, il avait ouvert son sac pour constater qu’il avait oublié son code dans son dortoir. Bien évidemment, il ne pouvait rien faire sans sa loi. Se frappant la tête contre la table, il range ses affaires et retourne en direction de la salle commune pour chercher le livre manquant, non sans continuer de ronchonner.

Il sent quelque chose de froid couler le long de son cou. « Putain de château malpropre. » se contente-t-il de dire, non sans dégoût, ne prenant pas même pas la peine de chercher la source de son inconfort. Pour lui, Poudlard manquait toujours de la classe de Beauxbâtons, surtout avec ses perturbations et ses maladies. Si Lionel avait prêté plus d’attention, il aurait probablement remarqué que c’était de la peinture qui avait coulé le long de sa cape. Malheureusement, ou heureusement pour lui, il ne note rien, ne se doute même pas des ennuis à venir.

Il arrive finalement au septième étage. Dans le couloir qui mène à sa salle commune se trouve une jeune femme, à la chevelure rousse éclatante qui se dirigeait vers lui, manifestement furieuse. Croyant que c’était Isaline, Lionel se retourne avec la nette intention d’aller aussi loin que possible de la meilleure amie de son ancienne copine. Une main se pose sur son épaule. Ce n'est définitivement pas Isaline. Elle n'aurait pas pu le rattraper aussi rapidement. Avec lenteur, Lionel se retourne pour apercevoir ce qui semblait être une Auror.  Son estomac se noue, il se demande ce qu'elle lui veut, mais quand elle lui demande d’enlever sa cape et de le suivre, il éclate de rire. La cougar qui voulait se faire un lion, ce serait la meilleure. « Non, je ne compte pas me déshabiller pour vous. » fait Lionel. Sur ses lèvres se forment un sourire. « Je suis en retard et j’ai beaucoup de travail à faire. La prochaine fois, peut-être. » L’Auror serait en mesure de comprendre et de le laisser aller. Si elle n'était pas une planche à pain, elle aussi avait sûrement du pain sur la planche.

Il avait le don de se plonger dans les situations les plus particulières. Il sait que la jeune femme le prend pour un idiot, mais il ne peut pas vraiment lui en tenir rigueur. Lionel avait tenté l’humour pour tenter de se dégager du problème. S’il avait su qu’il allait empirer la situation, il aurait probablement répondu autrement. La dernière chose qu’il recherchait en ce moment, c’était des ennuis, mais comme à l’habitude, il venait d’en trouver. La rousse fait au mieux pour garder son calme, mais elle tremble, le brun peut sentir sa colère, et pressentir qu’il passera un mauvais quart d’heure. Il avait touché un sujet apparemment sensible, mais en même temps, il fallait que la jeune femme se mette à sa place. Il ne la connait pas et la première chose qu’elle lui demande est de retirer sa cape. N'était-ce pas normal que cela suscite des questions ?

À défaut de se mettre à sa place, la Scandinave ne tarde pas à le remettre à sa place. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’elle ne l’attrape par le collet et lui demande s’il pensait vraiment qu’elle s’intéresserait à un gamin comme lui. Lionel ouvre la bouche pour répondre, sans se rendre compte que la question était purement rhétorique, mais la jeune femme continue en lui criant qu’il avait de la peinture sur sa cape, comme s’il s’agissait du plus terrible affront qui soit et en lui demandant des explications sur la raison de la présence de gouache rouge, devant la salle commune. Lionel roule les yeux. Si seulement il avait été à Serdaigle, il n'aurait pas eu de problèmes ; il fallait vraiment que ces imbéciles de Gryffondor fassent n'importe quoi. Il était prêt à tout parier que c'était une idée de ces imbéciles de Johnson et Prewett.

« La saison de Quidditch va bientôt commencer. Ce n’est pas bizarre qu’il y ait de la peinture devant ma salle commune. Les supporters sont probablement occupés à faire des bannières pour la prochaine partie ou une autre connerie. » Il ne devrait pas user d’autant de sarcasme, mais c’est bien plus fort que lui. Il ne sait pas ce qu’il a fait pour être traité aussi rudement, et malheureusement pour lui, il ne portait pas les Aurors dans son cœur, pas depuis que ces derniers l’avaient assommé lors du dernier buffet dans la Grande Salle.  

Lionel prend sa cravate dans sa main et la montre à la jeune femme. « Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ma cravate est rouge. Ma maison est Gryffondor et les couleurs emblématiques sont littéralement le rouge et l’or. » fait-il, en appuyant bien sur le mot rouge, pour justifier la présence d'une peinture de cette couleur devant leur aire commune. Lui aussi est un peu courroucé.

« À ce que je sache, avoir les vêtements sales n’est pas un crime. Si vous pouviez me relâcher, je vous en serais reconnaissant. Tout le monde nous regarde. » Effectivement, ils attiraient l’attention, surtout la jeune femme qui avait été la première à le toucher physiquement. Lionel ne savait pas comment c’était ailleurs, mais les Britanniques n’étaient pas forts sur les contacts physiques, demeurant relativement polis et courtois. Ils tenaient à leur espace personnel. L’Auror venait de briser le sien au premier contact. « Ils vont vraiment penser que vous avez un faible pour moi. » Lionel n’était pas calé en droit, mais si quelque chose devait arriver, pour l’instant, l’Auror était plus susceptible d’avoir des problèmes que lui. Il n'avait rien d'un mage noir, et elle avait probablement brisé son éthique professionnelle de nombreuses fois.

Il ne sait pas pourquoi elle ne le frappe pas. Non, en fait, il le sait, il est un étudiant de l’école, plus encore, il est un étudiant d’une école étrangère. Cela lui donnait le pouvoir terrible de crier à la discrimination et au racisme en toutes circonstances, et Dieu seul savait à quel point Lionel Lemaire était particulièrement doué pour se faire entendre.

Devant lui, la pauvre femme est en train de trembler. Pas de peur, non, plutôt de rage, comme si elle se retenait pour ne pas l’étrangler et le secouer, jusqu’à ce qu’il ne lui donne les réponses qu’elle attendait, et qu’il n’avoue son terrible crime. Cela semble lui en coûter. Apparemment, elle n’a pas dû se frotter souvent à des cas comme lui, ou elle n’avait jamais eu à conserver son calme devant eux, il n’aurait pu dire. Cependant, il pouvait parfaitement déceler la forte lueur de jugement dans le fond de ses prunelles. Elle le trouvait soit entêté, soit stupide, mais elle semblait le prendre au sérieux, avec ses histoires sans queue ni tête sur sa cape. Son regard se durcit quand il mentionne le Quidditch, il peut presque la voir réfléchir à des manières de contrer la menace ou à des plans de surveillance. Cette femme a vraiment besoin de se détendre. Toute la population de Durmstrang avait sérieusement besoin de vacances.

Avec véhémence, elle lui répond qu’elle n’a pas besoin d’un rappel concernant la couleur de la maison des lions, l’information avait bien circulé, mais lui demande des comptes sur la peinture qui se trouve sur son cou. Lionel ne semble pas savoir de quoi elle parle. Clignant des yeux, son air revêche laisse place à de l’interrogation. « Quelle peinture rouge ? »

Dès qu’il finit de prononcer ces mots, un grand seau de peinture rouge lui est versé sur la tête. Choqué, il relève la tête pour apercevoir Peeves, qui sembler fier de son cou. Brandissant son poing en l’air, le jeune homme lâche : « Espèce de connard, je vais te… » Retenant ses insultes, il sort prestement sa baguette, lance des sorts qui n’atteignent pas l’esprit frappeur, qui font exploser quelques pierres, sous les rires du mauvais plaisantin. Sans même s’essuyer les yeux, Lionel se tourne vers la rousse. « Vous l’avez, votre coupable ! Vous attendez quoi pour agir ? » Il lève les mains en consternation. Il avait la poisse.