Et si je pouvais apaiser tes souffrances ? ☾ Charlotte & Zoya

Mon corps gisait sur le sol de mon dortoir, pieds reposant sur mon lit. J'étais à demi consciente, étourdie. Je n'avais pas dormi de la nuit et je me sentais faible. À chaque moi, la nouvelle lune me faisait des ravages. Souvent bien plus que la pleine lune. Lorsque l'astre disparaissait du ciel, je me sentais vide, sans vie. Je me sentais désagréable loin de mon être, tandis que toutes parcelles de bien être disparaissaient de mon humeur. J'avais besoin de la lune et de mes instincts animaux. Sans elle, je n'étais rien, je n'étais plus. Personne ne pouvait comprendre l'origine de mon malheur, pas même les autres lycan, puisque ces derniers détestaient généralement leur état et appréciaient cette absence de lune. Ils n'y comprenaient rien. Comme cette nuit m'avait été invivable, je n'avais rien voulu d'autre que de me cacher sous les draps, pour tenter en vain de réchauffer mon corps agité. Une fois minuit passé, je m'étais retrouvée à bout de nerf. Je n'en pouvais plus. Je n'avais nulle envie de succomber à ce vide qui m'envahissait. Si Kamen avait été là, il aurait pu m'aider. Sans même poser de question, il aurait su ce dont j'avais besoin. J'aurais pu aller le voir. J'aurais dû aller le voir. Pourtant, je n'avais pas osé. Se rendre dans les dortoirs des garçons en pleine nuit, le réveiller et ce, simplement pour combler mes envies ? Perturber son sommeil pour mon propre bien-être ? Kamen était l'un des seuls qui méritait mon respect.

Pourtant, je regrettais. J'ai voulu sentir l'un de ses poisons traverses mes veines à m'en faire hurler. J'aurais voulu me tordre sous la douleur. J'aurais voulu sentir quelque chose. J'aurais voulu être vivante, n'aurait-ce été qu'une fraction de seconde. Par la fenêtre, je pouvais voir le ciel, aussi sombre que le jais. Cette vision m'horrifiait. Les autres filles dans le dortoir dormaient. D'un coup d'oeil, je pus voir Lou, paisible, silencieuse. Pour ma part, je tremblais, je pleurais presque. Rares étaient les fois où les larmes quittaient mes prunelles. Dans ce vide, aussi souffrant était-il, je n'arrivais point à pleurer. Ma main s'était machinalement tendue vers ma commode pour y attraper une fiole hasardeuse. Je l'engloutis d'un coup. Le liquide rouge sang brûla ma gorge au passage. Cette potion était une expérimentation encore à prouver. Dès l'instant, ma tête s'était mise à tourner. Mes yeux s'étaient injectés de sang, mais mon corps avait cessé de trembler. Une chaleur incroyable se dégagea de ma peau, au point de causer des marques brûlures sur mes draps. Définitivement, j'aurais pu mieux choisir ma fiole. Ma peau avait commencé à prendre une couleur rouge clair, presque brillante, lorsque je tandis ma main de nouveau vers ma commode. Celle-ci laissa une trace cendrée sur le tiroir et brisa deux fioles au passage. Je pris une fiole, juste avant de perdre conscience.

Une douce odeur de cerise me parvint au nez lorsque j'ouvris les yeux de nouveau. Un rayon de soleil frappait directement sur moi et reflétait sur la flaque de sueur qui m'entourait. Ma vision était floue et je pris un moment à me rappeler où j'étais. Une forte odeur de sang envahit ensuite mes narines, lorsque je tournai la tête vers la gauche. Un liquide irrdescent, aux couleurs de nacre, s'écoulait autour de morceaux de verre brisés. L'odeur de cerise et de sang se mélangeaient, le tout parsemé d'une teinte âcre, pratiquement indiscernable. Ah merde, un autre amortentia gâché. Cette potion n'était pas simple à faire, heureusement que je ne la faisais jamais pour l'utiliser. J'aimais simplement m'enhivrer des odeurs qui s'en dégageaient. D'ailleur, celle-ci est ce qui me ramena à moi. Le dortoir s'était vidé.

À voir le ciel, il devait être autour de midi. Je compris dès lors que j'avais manqué mon cours du matin, et je n'en avais sérieusement rien à faire. À ce moment, la plupart des élèves devaient être à la grande salle pour le repas. Je me relevai, chancelante, avant de rapidement m'essuyer le front et me vêtir de mes robes d'uniforme. Je me regardai un instant dans le mirroir, stoïque. J'avais l'air d'avoir passé une horrible nuit. Quelle coïncidance. Sans même me soucier de camouffler mes cernes sous du maquillage, je quittai les dortoirs, puis la salle commune. J'avais en main un petit sac, qui cliquetait à chacun de mes pas. Cette nuit de nouvelle lune m'avait fait penser à Charlotte. Pour elle, ça avait dû être une très belle nuit. Je savais qu'elle souffrait lors des pleines lunes. Elle devait détester l'astre qui éclairait la nuit. Je ne lui en voulais pas, car elle au moins avait de bonnes raisons. Les salles communes étant vide, c'était le moment parfait d'aller lui livrer une autre de mes expérimentations. Sous le même principe des potions tue-loup, il s'agissait d'une potion à prendre chaque jours fois avant la Pleine lune. Testée sur moi-même, je ne pouvais savoir si cela allait réellement atténuer ses douleurs, mais cette fois, je pouvais garantir qu'il n'y aurait pas d'effets secondaires indésirables. Pas comme la dernière fois...

Le fait que Charlotte soit chez les Serdaigles me facilitait la tâche pour lui offrir mes potions incognito. La salle commune était facilement accèssible, car les charades pour y entrer n'étaient point un problème pour moi. En m'assurant de ne pas être vue, je pénétrai dans la dite salle et me rendit dans les dortoirs. Doucement, je déposai les fioles sur la commode de Charlotte, avant d'y déposer ma note.

Je suis désolée que les autres potions n'aient pas fonctionnées. Je cherche encore un moyen de t'aider, essaie celles-ci. Je t'assure, tout ira bien. Une demie potion par jour, au couché du soleil. Tu en as assez pour te rendre jusqu'à la pleine lune. Ne t'inquiètes pas, je saurai si ça a fonctionné.