rowan&hope ⊹ it's haunting me

Au centre du hall d’entrée se trouvait une fontaine ovale. On l’appelait la fontaine aux morts. Située là où personne ne pouvait l’ignorer, elle possédait des jets propulsant dans les airs le nom des victimes de la guerre des sorciers. Rowan avait été déstabilisé en la voyant lors de la rentrée scolaire. Au début de l’année, beaucoup d’élèves parlaient de cette fontaine, s’arrêtaient devant, parlaient des victimes. Mais à présent, il était plus rare de voir quelqu’un s’y arrêter. Certes, la guerre et ses victimes restaient dans les mémoires de tous ceux qui avaient participé à cet enfer, mais les sorciers essayaient d’avancer, de construire un nouveau monde et d’avancer un pas après l’autre sans laisser le passé les retenir. Ce jour-là, Rowan se trouvait devant la fontaine. Il venait de prendre son petit déjeuner. C’était le week-end et il n’avait pas cours ensuite. Les professeurs leur laissaient un peu plus de libertés le week-end et il n’était pas obligé de retourner immédiatement dans sa salle commune. Pour une fois, ses pas le menèrent vers la fontaine et son cœur lui dit de rester. Parmi les noms qui coulaient, il y avait celui de Zoella. Ses poings se fermèrent quand il le vit illuminer la pièce. Elle était morte depuis presque un an et demi et il n’arrivait pas à faire son deuil. Il n’arrivait pas à l’oublier, à avancer sans elle. Rowan avait presque l’impression d’être mort avec elle. Très peu de monde était au courant de son histoire avec elle. Ils ne comprenaient pas pourquoi il avait changé. Ils ne comprenaient pas pourquoi il était devenu si dur envers tout le monde. Zoella n’avait pas été victime de la guerre. Elle aurait peut-être survécu si ses parents n’avaient pas ordonné son assassinat. Elle serait peut-être à ses côtés. Elle ne méritait pas d’être sur cette liste. Il était en colère. Elle lui manquait. Mais elle ne reviendrait jamais. Rowan tourna le dos à la fontaine et posa ses fesses sur le rebord. Il regarda autour de lui quelques élèves quitter la grande salle après leur petit-déjeuner, mais chacun alla vaquer à ses occupations et personne ne venait dans cette direction. Personne, jusqu’à ce que sa sœur, Maelys, fasse son apparition en sortant à son tour. Elle se trouvait avec un groupe d’amis, qu’elle abandonna pour venir le rejoindre. Elle prit place à ses côtés.

« C’est pas le moment, Maelys. » Dit-il à sa sœur en guise de bonjour. Elle lui prit le bras et se colla à lui, puis posa sa tête sur son épaule. Elle savait très bien à qui il pensait. Elle savait aussi ce qu’il pensait. Tout était de sa faute à elle. Si elle n’avait rien dit à leurs parents, Zoella serait toujours là. Elle avait tellement de choses à dire à son frère, mais elle avait peur qu’il la rejette. « Rowan… tu ne peux pas continuer à… » Elle ne termina pas sa phrase, pétrifiée par le regard noir de son frère qui ne voulait pas entendre un mot de plus. Elle ferma les yeux un instant, puis se ressaisit. Depuis quand avait-elle peur de ce que son frère avait à lui dire ? Elle s’était chamaillée avec lui toute sa vie. « Quand est-ce que tu vas te calmer ? Quand est-ce que tu redeviendras le Rowan que je connais ? Celui que tout le monde aimait. Celui qui ne passait pas son temps à se battre et à insulter les autres ? » Rowan n’eut pas de réponse immédiate. Maelys était sa petite sœur et même si une part de lui croyait qu’elle était responsable de la mort de Zoella, il l’aimait et il avait décidé de ne plus lui en vouloir. En revanche, elle allait devoir s’y faire. L’ancienne Rowan n’existait plus. « L’ancien Rowan est mort. Avec elle. » Maelys ne voulait pas y croire. Elle leva les yeux face à elle, il les leva en même temps qu’elle pour voir ce qu’il y avait à voir. Face à eux, au loin, il y avait Hope. Elle s’avançait vers eux. Rowan eut un pincement au cœur. Il se souvenait avoir vu Zoella marcher aux côtés d’Hope à de nombreuses reprises. Ou plutôt, marcher toujours un pas derrière elle, par respect. Zoella avait beaucoup de respect pour Hope, elle ne l’avait jamais caché. Rowan ne comprenait pas pourquoi elle venait vers eux, Maelys l’éclaira. « Vous avez tous les deux perdu Zoella… je pense que vous devriez parler. » Rowan se leva. Il n’allait pas rester là à se faire manipuler. Qu’est-ce que c’était ? Une intervention ? Maelys avait-elle demandé à Hope de lui parler ? Et pourquoi Hope ? Parce qu’elle était une des rares personnes à avoir été au courant de la relation entre Rowan et Zoella. Parce que Zoella s’était confiée à Hope malgré le secret que lui avait imposé son petit-ami.

Maelys attendit qu’Hope arrive, comme pour s’assurer qu’ils allaient bien discuter, puis les laissa. Elle jeta un dernier coup d’œil à son frère tout en lui faisant comprendre par son expression qu’il n’avait pas intérêt à partir avant d’avoir parlé de Zoella avec une de ses amies. Rowan et Hope n’avaient jamais vraiment discutés jusqu’à présent. Le sorcier avait plutôt l’impression qu’elle faisait partie de ceux qui ne l’aimaient pas. En la regardant, il repensa instantanément à Zoella et croisa les bras, comme pour se protéger inconsciemment des souvenirs provoqués par Hope. « T’avais quelque chose à me dire ? » Demanda-t-il un peu sèchement. Parce que si elle n’avait pas envie d’être là, il n’allait pas non plus la forcer à rester. Rowan se détourna d’Hope pour face à nouveau face à la fontaine et aux noms. Hope ne savait probablement pas pourquoi et comment Zoella était morte. Tout ce qu’elle devait savoir, c’était qu’un jour son nom s’était retrouvé sur cette liste. En tant que née moldue, Zoella avait dû fuir l’année où le Seigneur des Ténèbres était au pouvoir. « Tu n’es pas forcée de rester. Je dirai à Maelys qu’on a bien discuté. Va retrouver tes amis. » Il était persuadé qu’elle avait mieux à faire que de faire plaisir à sa petite sœur. Rowan voulait rester seul face à cette fontaine et ses souvenirs. Parmi les amis d’Hope, il y avait Pandore. Rowan et Pandore n’étaient pas amis, mais il avait été proche de Keith, son jumeau. Lui aussi, était au courant pour Zoella. Malheureusement, il faisait lui aussi parti des victimes et son nom venait de passer devant les yeux de Rowan.

Cette satanée guerre nous a pris des personnes chères à tout un chacun. Aucun de nous ne peut réellement se vanter de ne pas avoir eu à souffrir de cette guerre de manière directe ou indirecte. Je ne peux pas oublier ces jours terribles qui font aujourd'hui naître en moi un désir différent d'avant, qui me donne envie de me dresser pour que jamais plus rien de tel ne puisse arriver. Les images de la bataille me hante encore aujourd'hui. Mais au-delà de ces souvenirs tirés d'un des pires moments de ma petite histoire personnelle, il y a le malaise qui glisse sous ma peau tel un serpent qui répand son venin dans mon sang pour y mettre le feu, faire s'enflammer mes veines et empoisonner mon cœur. Il y a une certaine noirceur qui a contaminé mon âme. Je ne me sens pas ténébreuse mais je ne me sens plus aussi naïve et utopiste qu'avant. Je ressens parfois un tel dégoût pour tout mon être car je n'ai pas su agir. Je déteste cette impression que ma passivité a permis à certains actes horribles de se commettre, à certaines morts de venir s'ajouter. Mais suis-je une combattante exceptionnelle? Non, très loin de là même. Je ne suis pas certaine que j'aurais pu faire la moindre différence, même que du contraire. J'aurais probablement rejoint la liste des pertes. Sauf qu'on ne le saura jamais car comme une poule mouillée, je suis simplement restée en retrait. Je me suis terrée dans mon trou comme une froussarde et je m'en veux de ne rien avoir tenté. Je n'ai même pas essayé. Je me sens lâche pour tout ce que je n'ai pas fait cette année là, pour être simplement restée en retrait. J'aurais dû faire plus mais j'avais peur et quand je regarde en arrière, je n'y vois aucune raison d'être fière de moi. Je crois que je ne pourrai jamais modifier l'opinion de moi-même qui s'est renforcée à l'époque mais je peux faire en sorte de ne plus jamais éprouvé cette impression que je dois avoir honte de moi-même.

Plusieurs ont essayé après les événements de me parler de ce qui s'était passé. Le silence est à peu près tout ce que j'avais à leur opposer. Je suis incapable de laisser ressortir tous les sentiments qui sont nés de cette année de malheur. Certains des psychomages envoyés après coup m'ont dit que j'avais fait preuve de bravoure en ne fuyant pas les lieux tout simplement. Ils ont tenté de me rassurer en m'expliquant qu'aider les blessés et les plus faibles à fuir, à se mettre à l'abri, c'était aussi une forme de courage. Mais moi je ne vois pas les choses sous cet angle, moi je me sens juste lamentable mais ils ne peuvent pas le comprendre. Ils sont incapable de saisir que tous leurs blablas me laissent indifférentes car pour moi c'était purement de la lâcheté et de la peur qui m'ont conduit à rester au second plan quand j'aurais clairement dû me retrousser les manches et aller au devant de tous ces monstres qui terrassaient notre école. La culpabilité noyait mon être tout entier peu importe ce que l'on me dirait. La guerre me faisait mal encore aujourd'hui. Je me souviens des cauchemars pendant les nombreux mois qui ont suivi. Je revoyais les corps, certains mutilés et blessés, d'autres sans vie figés par l'horreur. Je me souviens des regards et des cris silencieux qui semblaient flotter dans l'air. Mais l'après-guerre avait apporté des nouvelles tragiques. J'y croyais à peine quand la rumeur m'avait rapporté la mort de Zoella. Je me souviendrais toujours de ce jour là, peu après la rentrée. Je n'avais rien montré alors qu'autour quelques exclamations horrifiées me parvenaient. J'avais continué de parler comme si je n'avais pas entendu mais toutes les discussions prouvaient combien nous étions hanté par les souvenirs de la bataille. Pas une trace de tristesse sur mes traits, je n'avais rien montré à personne. J'avais poursuivi un moment avant de m'éclipser prétextant une migraine. J'avais même réussi à leur sourire avant de monter dans le dortoir. Une année coupée de tout, je n'avais même rien su. L'information ne m'était pas parvenue. Je me souviens qu'une fois seule, je m'étais effondrée foudroyée par la douleur. Les larmes avaient ruisselé sur mes joues et la douleur s'était faite intense. Zoella était morte. Elle avait dans le regard cette admiration qui me donnait la sensation d'être quelqu'un de bien. Et là, elle avait disparu aspirée par le néant. Je portais son deuil comme ceux d'autres aujourd'hui mais elle avait la première place à mes yeux. Il m'avait fallu du temps pour sortir de ma torpeur. Encore plus de temps pour que je me sente finalement prête à faire face. J'avais essayé d'en apprendre plus.

J'aurais voulu interrogé une seule personne sur sa mort, lui demander des comptes mais j'en étais incapable. Rowan n'était plus le même. Il y avait un je ne sais quoi qui me faisait frémir. J'avais commencé à avoir peur de ce que je voyais désormais dans son regard. Il s'en était pris à Maddox et j'avais perdu toute estime pour lui. Foutu mystère. Puis l'idée s'était infiltrée sans jamais disparaître. Et si Rowan avait tué Zoella. Non impossible! Mais elle restait dans un coin de ma tête. J'aurais voulu crever l'abcès mais j'avais peur de Rowan car la rumeur ne lui prêtait désormais plus grand mérite. Mais les mots de  Maelys résonnaient encore dans mon esprit « Vous l'aimiez tous les deux, ne te fie pas aux apparences. Tu sais qu'elle l'aimait. Vous l'avez perdue tous les deux alors s'il te plaît, discutez ensemble. Zoella t'admirait, c'est pas pour rien, elle serait heureuse que tu lui tendes la main aujourd'hui. » J'aurais voulu rejeter cette idée absurde et la chasser tout simplement. Pourtant, j'étais là. Je m'approchais de la fontaine, droit vers le rouge et or. Je ne baissais pas la tête, je n'essayais pas de passer inaperçue. Non au contraire, j'allais à sa rencontre sans attentes et sans craintes pour tenter de comprendre et qui sait obtenir certaines réponses. Son ton sec me glace le sang.

« Salut à toi aussi. » Nous pouvons être deux à utiliser ce genre de ton. Je ne cherche pas à capter son regard et je fixe la fontaine mais incapable de regarder les noms, ils font bien trop mal. J'accueille ses mots avec une certaine indifférence avant de hausser les épaules et dit assez simplement. « Je suis pas une adepte des faux semblants alors je n'adhère pas au principe de dire qu'on a discuté si on a pas échangé le moindre mot donc sans moi pour ce coup. Par contre,... » Je laisse ma phrase en suspend laissant quelques instant à mes pensées de s'organiser. « Elle n'a pas vraiment tort quand elle dit que Zoella nous lie l'un à l'autre même si on est pas proches toi et moi. Sais-tu toi ce qui lui est arrivé? » Je ne suis pas attachée à lui alors je n'ai pas besoin d'entourer mes paroles d'un minimum de savoir être. Je suis directe mais cela fait des mois que cette question me brûle les lèvres, torture mon esprit en m'infligeant une douleur permanente. « C'est vrai ce qu'on dit qu'elle a été assassinée? »

Quand Hope partirait, Rowan irait retrouver Maelys pour lui dire deux mots. Il n’aimait pas qu’elle aille comploter derrière son dos et qu’elle le force à discuter avec une amie de Zoella. S’il voulait discuter avec Hope, il l’aurait déjà fait depuis bien longtemps. Maelys se mêlait parfois de ce qui ne la regardait pas. Rowan comprenait qu’elle s’en voulait et qu’elle voulait à tout prix réparer ce qui était brisé, mais c’était impossible. Et il était encore trop tôt pour qu’il parle d’elle. Il demanda à la Serdaigle si elle avait quelque chose à lui dire. « Salut à toi aussi. » Répondit-elle sèchement. Il haussa les épaules. Il se fichait des conventions. Rowan annonça à Hope qu’elle n’était pas obligée de rester et qu’il prétendrait qu’ils avaient parlé. Maelys ne le croirait peut-être pas, mais il s’en tapait. Il voulait juste faire comprendre à Hope qu’il souhaitait rester seul face à cette fontaine et ces noms. Hope était intelligente et devrait le comprendre. Seulement, elle ne bougea pas. La sorcière restait plantée face à lui, comme si elle était réellement venue vers lui dans le but de discuter. Il se demandait pourquoi elle souhaitait lui parler maintenant, alors qu’il ne l’avait pas vue de l’année. Elle semblait très bien s’en sortir, elle, sans Zoella. Cette fois, ce fut au tour d’Hope d’hausser les épaules. « Je suis pas une adepte des faux semblants, alors je n'adhère pas au principe de dire qu'on a discuté si on a pas échangé le moindre mot, donc sans moi pour ce coup. Par contre... » Ne venaient-ils pas déjà d’échanger quelques mots ? Rowan n’était même pas étonné qu’Hope soit si honnête qu’il lui était impossible de mentir. Il attendit qu’elle finisse ce qu’elle avait à dire. « Elle n'a pas vraiment tort quand elle dit que Zoella nous lie l'un à l'autre, même si on est pas proches toi et moi. Sais-tu toi ce qui lui est arrivé ? » Le cœur de Rowan se brisa en mille morceaux quand Hope prononça le nom de Zoella. A chaque fois, c’était la même chose, il avait mal. Il n’avait vraiment pas envie d’en parler. Elle était stupide ou quoi ? Rowan mit les mains dans ses poches avant de commencer à s’énerver et à faire un geste qu’il regretterait. Zoella lui en aurait voulu s’il s’en prenait à celle qu’elle admirait plus que n’importe qui, celle qu’elle mentionnait souvent comme étant un exemple, celle qu’elle voulait lui présenter officiellement une fois la guerre terminée, une fois leur couple officiellement dévoilé au monde entier. Zoella aurait voulu qu’ils discutent et qu’ils deviennent amis. « C'est vrai ce qu'on dit qu'elle a été assassinée ? » Hope paraissait tellement détachée de Zoella en en parlant que Rowan commença à s’énerver. Comment pouvait-elle lui demander une telle chose si directement ? Avec ces mots ? Ne pouvait-elle pas simplement poser la question à Maelys ? Qu’est-ce qu’elles cherchaient toutes les deux ? « Où est-ce que t’as entendu ça ? » Demanda le Gryffondor d’une voix dure. Il se demandait si c’était une rumeur et si des gens la propageaient. Il n’aimait pas qu’on parle d’elle, qu’on salisse sa mémoire en racontant n’importe quoi. Seulement, pour une fois, la rumeur disait vrai.

Pouvait-il dire à Hope que c’était de la faute de sa famille que Zoella était morte ? Pouvait-il lui avouer que si elle n’était jamais sortie avec lui, elle serait encore vivante ? Hope ne pourrait pas comprendre. Il ne comprenait d’ailleurs pas non plus comment tout était arrivé. Il s’en voulait, il en voulait à Maelys, mais surtout, il en voulait à ses parents. La seule innocente dans l’histoire, c’était Zoella. Rowan resta silencieux un long moment, torturé par ses pensées. « Je ne sais pas ce que tu t’imagines, mais Zoella et toi, vous n’étiez pas aussi proches que ce que tu pourrais penser. Elle ne parlait jamais de toi, quand on était tous les deux. » Blesser l’autre pour se sentir vivant, blesser l’autre pour se sentir en contrôle de la situation. C’était derrière ce mécanisme que Rowan s’était caché pendant des mois. Il n’était pas encore prêt à en sortir. Ainsi, il ne répondait pas encore à sa question. Il espérait qu’elle craque et s’en aille. Qu’elle capitule. Qu’elle abandonne cette discussion à peine entamée. Rowan était le seul à avoir le droit de mentir au sujet de Zoella. Il était le seul à avoir le droit de se souvenir de l’ange qu’elle était. Parce qu’elle était précieuse à ses yeux, parce qu’il la voulait pour lui seul à tout jamais. « Maelys n’a jamais aimé Zoella. Qu’est-ce qu’elle y connait ? Tu devrais le savoir si t’étais si proche d’elle. » Il est vrai que Maelys avait toujours été une vraie peste envers Zoella depuis qu’elle savait qu’elle intéressait Rowan. En plus, elles étaient de la même année. Rowan s’était fâché de nombreuses fois contre sa sœur pour ce qu’elle faisait subir à celle qui était très vite devenue sa petite-amie. Mais aujourd’hui, Maelys s’en voulait terriblement et voulait se rattraper auprès de Rowan. En voyant à nouveau le nom de Zoella défiler parmi les jets d’eau, le Gryffondor tourna le dos à la fontaine pour retourner s’asseoir sur le rebord. « C’est vrai… » Finit-il amèrement par répondre après avoir terminé de cracher son venin. Il répondait bien sûr à sa question. Zoella avait été assassinée. Il avait envie de pleurer. Il n’était pas prêt à en parler. Il ne pouvait pas en dire plus. Il posa sa main sur son bras, là où le nom de Zoella était tatoué, sous ses vêtements, comme il le faisait souvent quand il pensait à elle. Il se souvenait du jour où il s’était fait faire ce tatouage chez un moldu. Zoella était avec lui, elle avait rigolé tout le long, mais avait trouvé ce geste magnifique. Jamais il n’oublierait les étoiles dans son regard. Il ne se passait pas une seule seconde sans qu’elle lui manque énormément.

Peu importe où j'ai entendu parlé de cette rumeur. Peu importe qui m'a rapporté les faits. Peu importe le comment j'ai appris cette horrible vérité, elle m'habite depuis ce fameux jour. Je me serais inquiétée de ne pas retrouver celle qui me suivait comme une ombre, je l'aurais fait car mon attachement était tout ce qu'il y a plus sincère. Mais alors que l'effusion des retrouvailles faisait grouiller la pièce de dizaines de visages, que les piaillements de ceux qui sont heureux d'être ensemble à nouveau emplissaient l'air et que les nouveaux venus suscitaient les regards, moi je la cherchais elle. Je crois que ce jour là, les faibles lueurs de l'innocence qui avaient survécus en moi sont définitivement mortes ce jour là. Je n'arrive plus à croire que ce monde peut nous offrir la paix auquel pourtant nous semblons tous aspirer. Il n'y a qu'un faible espoir que nous puissions simplement nous en sortir. Pendant une semaine, je me souviens du goût de cendres des aliments qui me donnaient la nausée, je me souviens de cet air absent et de la douleur qui me rongeait intérieurement. Toute l'horreur de cette vérité me consumait puis animée par le besoin utopique de trouver le moyen de continuer : un espoir était né. J'avais voulu me convaincre que rien de tout cela n'était réel et que la rumeur nous embobinait, nous faisait croire une fois de plus en une réalité distordue et tronquée. Je n'y croyais pas vraiment mais comment continuer d'avancer quand l'injustice de certaines morts nous rongent intérieurement grugeant chaque miettes de rêves en nous à chaque instant passé dans cette incertitude. Je regarde Rowan consciente que depuis longtemps, je suis consciente des changements en lui et qu'ils n'ont jamais fait qu'alimenter cette certitude sur la mort de celle qui n'était que douceur et bienveillance. Je voudrais dire que je n'étais pas vraiment certaine des causes de cette métamorphose mais ce n'est que mensonges. Je le savais au plus profond de moi-même mais je n'étais pas prête à faire face à la vérité cruelle et douloureuse. Mais les mots du jeune homme me font mal, ils viennent serrer mon cœur dans un étau qui me comprime et me donne la sensation d'étouffer. Je voudrais lui hurler qu'il n'est qu'un horrible menteur. Je voudrais lui dire qu'il n'a pas le droit de gâcher l'image que j'avais de Zoella et de la ternir. Je sens une rage remonter lentement, du plus profond de mes entrailles alors que je fixe un regard dur sur lui. Je voudrais le frapper, le secouer pour lui faire ravaler ces mots qui sont incendiaires sous leurs dehors innocents. Je voudrais savoir le faire réagir mais ma voix trahir douleur, émotion et colère à l'instant même où je laisse échapper ces quelques mots.

« Je t’interdis de dire ces mots. Tu n'as pas le droit d'insinuer que je ne connaissais pas vraiment Zoella ou sa vie. J'étais proche d'elle... elle était... plus pour moi. Je sais que tes sœurs ne l'aimaient pas mais toi oui et Maëlys me l'a rappelé tout simplement. Jamais je n'apprécierai ta sœur. Mais... toi je pensais que... » Je ne finis pas mes phrases car j'en suis tout simplement incapable. Je n'arrive pas à savoir ce que je ressens ou pense. Je voudrais pouvoir totalement haïr Rowan mais le souvenir de ma petite protégée me freine encore et toujours. Je me souviens que j'ai eu envie de venir lui faire savoir ma façon de penser pour ce qu'il a fait à Maddox mais je n'ai pas pu. Mais si demain un tel incident se produisait, je n'hésiterais pas à lui foutre la pire raclée qu'aucune fille ne lui ai jamais mise. Je suis encore sous le choc de son attaque et malgré ma volonté les mots font leur chemin en moi et soufflent à mon oreille que c'est peut-être la vérité. Ils sèment le doute sur leur passage et je serre mes bras autour de moi en signe de défense, pour me protéger de tout ce qu'il peut faire pour me blesser. Je le foudroie du regard pour dissimuler mon incertitude avant de demander hésitante. « C'est vrai qu'elle ne parlait jamais de moi avec toi? Qu'elle ne t'a jamais rien dit à mon sujet? » Je reprends une légère assurance alors que je vois le prénom de celle qui nous manque à tous les deux défiler sous mon regard. Je trouve un certain courage et je ne peux m'empêcher de prendre un air plus assuré pour affirmer la voix moins tremblante. « Ou ce n'est que vils mensonges pour mettre fin à cette discussion ou cacher combien tu es responsable de tout cela? Une manière de faire mal à l'autre pour que personne ne se rende compte que... » Phrase en suspend alors que plusieurs fins possibles tournent en boucle dans ma tête, sources de multiples hypothèses qui ne se vérifieront sans doute jamais. Que tu l'aimes et que sa mort te brise le cœur.. Que tu es soulagé par sa disparition... Que tu es celui qui a commis cet acte... Que tu t'es moqué d'elle... Que tu voyais sa main dans la tienne pour l'éternité... Que tu souffres au fond de toi peu importe que ce soit de la culpabilité ou un sentiment plus profond... Que peu importe les raisons, tu as mal... Mais qui suis-je pour pouvoir affirmer une telle chose sauf celle qui a eu l'impression de le connaître grâce aux confidences de celle dont aujourd’hui, la mort me ravage intérieurement et me donne envie de hurler contre ce monde. Je ne connais rien de lui sauf le fruit de certaines rumeurs qui me font parfois trembler, qui parfois ont su m'émouvoir. Je remarque seulement son geste avant de remarquer plus pour moi-même que pour lui. « C'est là où tu t'es fait tatoué son prénom... » Le souvenir de ce jour où elle m'avait raconté ce moment magique qui gonflait son cœur de bonheur me revient. Je me souviens des étoiles dans son regard, de sa joie de vivre et elle me manque énormément.

Face à Hope, Rowan avait à nouveau usé de mots qui font mal. Il lui avait dit que Zoella ne parlait jamais d’elle, voulant lui faire croire qu’elle n’avait pas été aussi importante pour sa petite-amie qu’elle le croyait. Il voulait la blesser. Il voulait lui faire mal. Il voulait l’énerver pour qu’elle vienne l’attaquer en retour. Il voulait ressentir ses mots acérés, il voulait voir jusqu’où elle irait, ce qui la ferait craquer et partir. Zoella était à lui et il l’aimerait à jamais. Jusqu’au bout. Rowan n’aimerait plus personne d’autre qu’elle. Il regarda Hope. Elle avait l’air en colère. Il l’avait touchée en plein cœur. « Je t’interdis de dire ces mots. Tu n'as pas le droit d'insinuer que je ne connaissais pas vraiment Zoella ou sa vie. J'étais proche d'elle... elle était... plus pour moi. Je sais que tes sœurs ne l'aimaient pas, mais toi oui et Maelys me l'a rappelé tout simplement. Jamais je n'apprécierai ta sœur. Mais... toi je pensais que... » Rowan avait le droit d’insinuer ce qu’il voulait. Il était celui qui connaissait le plus Zoella. Il était celui qui avait le droit de la conserver intacte dans son esprit. Hope ne pouvait pas l’interdire de quoique ce soit. Et si elle doutait, c’était de sa faute uniquement. Si elle était si proche de Zoella, elle le saurait. Rowan ne savait pas à quel point Hope tenait à Zoella et ses mots le déstabilisèrent légèrement. « Tu pensais que quoi ? » Rétorqua-t-il quand elle ne termina pas sa phrase. Elle n’était jamais venue lui parler jusque-là. Elle n’était jamais venue lui demander comment il allait après la mort de Zoella. Pensait-elle que parce qu’il sortait avec la Serdaigle, elle l’apprécierait ? C’était trop tard. A l’époque où elle était encore là, oui, peut-être qu’ils auraient pu s’entendre si la relation entre Zoella et lui n’avait plus été secrète. Aujourd’hui, c’était une autre histoire. Il vit Hope douter peu à peu d’elle. Elle était trahie par ses gestes, même si ses yeux semblaient dire autre chose. Rowan aurait dû se sentir soulager de la mettre en colère, de la faire douter de cette amitié, mais non. Au contraire, il avait un pincement au cœur. « C'est vrai qu'elle ne parlait jamais de moi avec toi ? Qu'elle ne t'a jamais rien dit à mon sujet ? » Le regard de Rowan soutint celui d’Hope. Pensait-elle vraiment qu’il disait la vérité ? Il n’aimait pas l’idée qu’elle abandonne sa confiance en Zoella si facilement. Elle aurait dû se battre pour son amitié avec celle qui avait disparue, pour ses souvenirs d’elle. C’était comme ça qu’il verrait qu’Hope avait réellement tenu à Zoella. « Ou ce n'est que vils mensonges pour mettre fin à cette discussion ou cacher combien tu es responsable de tout cela ? Une manière de faire mal à l'autre pour que personne ne se rende compte que... » Responsable ? Rowan se braqua en entendant ce mot. Oui, dans un sens, il était responsable de ce qui était arrivé. Mais le sorcier n’aimait pas l’accusation directe. « Que quoi ? » Répondit-il un peu durement à la rousse, agacé par le fait qu’elle ne termine à nouveau pas sa phrase. Elle ne lui fit pas le plaisir de la terminer non plus. Peu à peu, il se mit à penser à Zoella et plaça inconsciemment sa main sur sa peau tatouée. Assis sur le bord de la fontaine, il avoua à Hope qu’elle avait bien été assassinée.

« C'est là où tu t'es fait tatouer son prénom... » Le Gryffondor tourna instantanément la tête vers Hope. Elle était au courant. Zoella lui en avait parlé. Pourtant, Rowan s’était fait tatouer son prénom l’été avant qu’elle ne doive fuir pour survivre. C’était bien la preuve qu’elle et Hope avaient été proches. Le garçon baissa les yeux un instant, fixant les pavés au sol. Ils avaient été renouvelés après la grande bataille et on ne devinait pas que de sang avait pu y couler. « Elle parlait souvent de toi, Zoella. » Dit-il doucement en révélant son mensonge. Hope était intelligente, elle ne s’était pas laissée avoir. Même si elle doutait, elle savait que ce qu’elle avait vécu avec Zoella n’était pas aussi insignifiant que ce que Rowan prétendait avoir constaté. Il leva les yeux et regarda Hope. « Je ne sais pas ce qu’elle te trouvait, mais elle t’aimait beaucoup. » En fait, elle ne tarissait pas d’éloges envers Hope. La rousse était celle qui avait guidé Zoella à Poudlard et elle aurait voulu lui ressembler. Pourtant, selon Rowan, Zoella était déjà merveilleuse, elle n’avait rien à envier à personne. Elle était parfaite. Et dans le fond, si Zoella était aussi douce, c’était peut-être grâce à Hope. Et quand Zoella aimait quelqu’un, elle ne s’en privait pas d’en parler. « Ton prénom revenait un peu trop souvent dans nos conversations à mon goût. » Il eut un sourire taquin. Rowan avait fini par se calmer. Pour combien de temps ? Il l’ignorait. Jusqu’à ce qu’elle l’énerve à nouveau. C’était peut-être l’histoire du tatouage qui avait tout changé. Elle ne l’aurait pas su si Zoella ne lui en avait pas parlé. Il était impossible qu’elle l’ait déjà vu de ses propres yeux, il ne l’exposait pas à la vue de tous, même si c’était bientôt l’été et qu’il devrait bientôt exposer ses bras. De toute façon, peu de personnes osaient le dévisager, alors très peu se risqueraient à essayer de déchiffrer ses tatouages. Rowan souffrait. Il souffrait de savoir ce qui était véritablement arrivé à sa petite-amie. « T’as raison… je suis responsable de sa mort. » Il ignorait dans quel sens elle avait proféré cette accusation, mais il ne pouvait pas le nier. Enfin, il pouvait, mais il mentirait. Il préférait être franc avec elle, même si ses propres mots lui brisaient à nouveau le cœur. Si elle était morte, c’était parce qu’elle avait eu le malheur de sortir avec le fils de parents pro-sang-pur. Et parce qu’il avait été assez égoïste pour prendre le risque. Mais il avait retenu sa leçon, c’est un risque qu’il ne prendrait plus. « J’aurais aimé pouvoir la protéger. » Confia-t-il à Hope. Ces dernières minutes, on avait presque l’impression de retrouver l’ancien Rowan : le Rowan protecteur et sympathique. Redevenant un peu plus sombre, le sorcier ajouta : « C’est trop tard. On ne peut pas revenir en arrière. » Qu’aurait-il pu faire ? Révéler sa relation au grand jour et tout faire pour la défendre, la faire accepter de ses sœurs et de ses parents ? Peu probable. Il n’aurait jamais dû sortir avec elle en premier lieu. Il avait été assez con pour tomber amoureux d’une née-moldue.

Je sais que j'ai tendance à ne pas formuler certaines pensées mais une partie de moi m’exhorte à la prudence. Je ne veux pas aller trop loin. Je ne veux pas affirmer trop franchement que je pense qu'il a pu prendre part à tout ceci. Je me force à contrôler mes émotions pour ne pas les laisser dominer et me faire proférer des accusations que je ne pense pas. Je ne sais pas ce que je pense ou ressens dans le plus profond de moi-même. Je suis incapable d'affirmer quoique ce soit. Je me demande s'il aurait pu être celui qui se débarrasse d'une petite amie devenue encombrante. Elle mettait à mal ses prétentions mais aurait-il pu la faire disparaître? Je n'en sais rien. Je pensais qu'il était sincèrement amoureux d'elle. Je le croyais mais je ne le connais pas. Je ne devine pas que sous son agressivité se cache une profonde douleur. Je ne peux pas savoir qu'il a mal au plus profond de son être d'avoir perdu celle qui était son univers. Je n'en ai aucune idée. Je ne le connais pas le moins du monde et je doute qu'aujourd'hui, il n'aie simplement envie de me connaître. Je devine que du contraire, il rêve de me voir disparaître tout court de son champ de vision pour ne jamais y revenir. Son agacement est une torture. Je voudrais le secouer pour qu'il arrête d'adopter cette attitude exaspérante et provocante, qu'il arrête d'essayer de me faire sortir de mes gonds. Je sais qu'il essaie de me faire abandonner cette stupide discussion mais j'ai besoin de ces réponses aujourd'hui. J'ai viscéralement besoin de comprendre pourquoi le prénom de Zoella défile sur cette statue qui symbolise les victimes innombrables de la guerre. Je sens cette tristesse qui trop souvent me submerge mais que je refuse de laisser voir m'envahir. Je sens une larme, une seule couler mais je la chasse rapidement. Je pourrais m'éloigner, je n'obtiendrais sans doute rien. J'allais baissé les bras, oublié mes questions ou en chercher la réponse ailleurs quand ses mots me donnent un mince espoir. Lentement, je tourne la tête vers lui surprise par le changement survenu en lui.

Je suis à ses côtés et un sourire mélancolique plane sur mon visage. Je repense à cette petite qui était comme mon ombre. Je ne sais pas très bien comment prendre ses mots mais la douceur de son ton, cet aveu sur son mensonge me calment assez instantanément. Je ne sais pas non ce qu'elle me trouvait au fond. Zoella était une jeune femme tellement douce, intelligente et forte que je me disais que j'aurais dû moi l'admirer plutôt que l'inverse. Il y avait des milliers de petits choses qui la rendaient bien meilleures que moi si je me penchais objectivement sur nos différences et similitudes. Je me laisse aller à sourire amusée. « Ouais je me doute qu'elle devait te gaver surtout qu'elle n'avait rien à envier à personne. Elle n'était pas d'accord et pourtant... » Je voudrais lui poser des questions pour savoir ce qu'elle disait de moi, ce qu'elle lui racontait. Je rêvais de faire revivre la jeune fille pendant quelques maigres instants, la sentir dans nos paroles, dans ces souvenirs partagés. Je voulais l'amener à exister même si elle finissait par disparaître à nouveau par la suite. Je veux sentir sa présence flotter dans l'air, me dire qu'elle veille sur nous d'une certaine manière. Je suis une rêveuse mais Zoella avait un truc spécial qui faisait que quand on l'aimait, ça durait toujours. Je me mords la lèvre. « Elle me parlait souvent de toi, que tu étais différent de ce que les apparences laissaient penser. » Je soupire un peu mais si lui m'avoue son mensonge, je me sentais dans le devoir de lui « offrir » quelque chose en retour en quelque sorte. Je veux qu'il sache que si je me glissais injustement dans leurs moments qui n'auraient dû qu'être intimité, que centrés sur eux. Il se glissait aussi dans notre amitié envahissant les conversations. Je réalise qu'elle devait tenir énormément à ce que l'on puisse s'entendre. Devions-nous bafouer sa mémoire en nous disputant? Je ne crois pas, elle en souffrirait si elle pouvait nous voir. Je ne pouvais pas imaginer qu'elle n'aie pas trouvé la paix mais je me dis que s'il y a la moindre chance qu'elle nous voie de son paradis, elle aurait honte. Je ne veux pas la trahir en me mettant Rowan à dos.

Mais ses mots provoquent un choc en moi. J'ai l'impression que mon souffle se coupe et que mon cœur bat à une cadence tellement folle qu'il pourrait s'échapper de ma poitrine. Que veut-il dire par ces quelques mots? Je ferme les yeux la peur au ventre à l'idée des mots qui pourraient suivre. Qu'est-ce que ça veut dire? Je sens la douleur de mon cœur fragile qui subit un coup auquel il ne s'attendait pas. J'entends son aveu, son désir d'avoir pu la protéger. Je lis entre les lignes l'aveu d'une souffrance réelle de ne pas avoir pu être là pour elle et pour s'assurer qu'elle survive. Mais ses mots tournent en boucle dans ma tête. Je finis lentement par comprendre, saisir cette réalité douloureuse. Zoella a payé de sa vie de l'avoir aimé lui. Elle est morte pour être tombée amoureuse de la mauvaise personne, avoir offert son cœur à celui qu'elle n'aurait pas dû. En est-il responsable? Je ne sais plus. Je n'arrive plus vraiment à raisonner alors que son rire me manque, que son admiration sans limite a laissé place à un vide abyssal. Je me mélange dans mes sentiments. Je soupire légèrement. Mais la réalité vient me submerger : sans lui, elle serait toujours vivante. Je lui en veux pendant quelques instants d'avoir privé le monde d'une dose de douceur et de bonheur. Je lui en veux d'avoir fait de ce monde qu'il soit un peu moins beau sans le sourire de la demoiselle. « Elle n'aurait jamais dû sortir avec toi. Elle serait vivante si elle n'était pas tombée amoureuse de toi c'est ça? Tu n'es peut-être pas celui qui a commis ce geste mais tout est ta faute. C'est comme si tu l'avais tué de tes mains. » Je pose la main sur ma bouche. Je n'en reviens pas d'avoir dit cela. « Tu la trahis chaque jour où tu prétends que ça te laisse indifférent, chaque fois que tu humilies un né moldu. Tu la trompes de la plus cruelle manière. » Je sais qu'il ne peut pas être tenu responsable pour ce que ses parents lui imposent comme choix. Je ne réfléchis pas vraiment alors que la douleur seule guide mes mots. Je lui en veux mais quelque part au fond, j'ai mal et je voudrais qu'il aie aussi mal que moi. Je réalise l'injustice de ma réaction et je sens quelques larmes couler. Je m'en fous que l'on puisse me voir mais je retiens cette souffrance là depuis trop longtemps. Mais je balbutie faiblement, je m'efforce de me contrôler car je ne peux pas perdre les commandes tout simplement. « Pardonne-moi... Je... Je n'aurais jamais dû dire cela. » Je le regarde cherchant son pardon mais ne pouvant cacher combien je lui en veux non pas pour sa mort mais pour son comportement. Je suis en colère contre lui et je voudrais le secouer pour lui hurler qu'il n'a pas vu l'être immonde qu'il devient.

Adoptant une nouvelle attitude qui ressemblait à l’ancien Rowan, le nouveau Rowan dit à Hope ce qu’elle souhaitait entendre sur sa petite protégée Zoella. La Serdaigle sembla se calmer quand il lui raconta qu’il lui avait menti. Zoella lui parlait de temps en temps d’Hope, plus qu’il ne l’aurait souhaité. La rousse avait toujours été un modèle pour celle qui avait été sa petite amie. Rowan regarda Hope, la jugeant pour essayer de comprendre pourquoi Zoella avait tant tenu à elle. « Ouais, je me doute qu'elle devait te gaver, surtout qu'elle n'avait rien à envier à personne. Elle n'était pas d'accord et pourtant... » Rowan ne pouvait pas être plus d’accord avec Hope. Pour lui, elle n’avait rien à envier à personne. Il avait eu un coup de cœur pour elle un jour et il avait tout fait pour qu’elle s’intéresse à lui à son tour. Bien qu’elle tombât rapidement sous son charme, il n’avait pas ménagé ses efforts pour la croiser, la faire rire, la faire penser à lui. Et tous ces efforts, il les avait faits dans la plus grande discrétion. Il se devait d’être discret sur ses intentions parce qu’elle était née-moldue et sa famille ne l’aurait pas acceptée. Elle avait compris et avait aussi accepté. Il ignorait avec quelle force elle avait supporté ce secret, peut-être que c’était grâce à Hope. Après l’été 1997 qu’ils avaient passé à se rapprocher plus qu’ils ne l’avaient jamais été, Rowan comptait mettre fin au secret. S’il n’y avait pas eu la guerre, si elle n’avait pas dû fuir, il l’aurait protégée, il l’aurait gardée près de lui. « Elle me parlait souvent de toi, que tu étais différent de ce que les apparences laissaient penser. » Poursuivit Hope en lui donnant de nouvelles informations sur la jeune disparue. Rowan n’était qu’à moitié surpris. A l’époque, avant sa mort, Rowan n’était pas si terrible. Il était même assez apprécié de ses camarades et il était difficile de s’en souvenir aujourd’hui, avec tous les changements qui avaient eu lieu. Il se demandait quelles étaient les apparences et ce que Zoella avait raconté sur lui à Hope. Peut-être que la rousse ne l’imaginait pas romantique, attentionné, protecteur, drôle. C’était tout ce qu’était Rowan envers sa petite amie quand il pouvait passer du temps avec elle en cachette. Les aveux, qui suivirent cette conversation légère, changèrent soudainement l’ambiance. Le sorcier avoua être en partie responsable de la mort de la jeune protégée d’Hope, même s’il aurait tout fait pour la sauver. N’étant pas là le jour de sa mort, il n’avait rien pu faire. Et pire encore, il ne l’avait appris que des jours, voire des semaines plus tard. Il ne savait toujours pas exactement quand elle avait été assassinée, il ne savait pas non plus ce qui s’était passé ce jour-là. Mais le jour où il tiendrait le responsable entre ses mains, il le lui ferait payer de sa vie. Et il se vengerait aussi de ses parents s’il obtenait un jour la preuve de ce qu’ils avaient ordonné.

« Elle n'aurait jamais dû sortir avec toi. » Commença Hope sans mesurer la portée de ses paroles. Rowan ne s’attendait pas à ce qu’elle soit si directe avec lui. Il sentait que la suite de ses paroles n’allait vraiment pas lui plaire. « Elle serait vivante si elle n'était pas tombée amoureuse de toi, c'est ça ? Tu n'es peut-être pas celui qui a commis ce geste, mais tout est ta faute. C'est comme si tu l'avais tué de tes mains. » Rowan eut l’impression de se prendre un sortilège puissant en plein cœur. Comment Hope osait-elle lui dire une telle chose ? Comment osait-elle insinué qu’il aurait tout aussi bien pu la tuer de ses propres mains ? Il aimait Zoella, il ne lui aurait jamais fait de mal. « Ta gueule ! » La colère prit le sorcier d’un coup et déjà, il serrait les poings alors qu’Hope semblait regretter instantanément ce qu’elle venait de dire. C’est ce que semblait dire son geste, sa main portée à sa bouche. Seulement, la jeune femme ne s’arrêta pas là. « Tu la trahis chaque jour où tu prétends que ça te laisse indifférent, chaque fois que tu humilies un né moldu. Tu la trompes de la plus cruelle manière. » Hope ne connaissait rien à sa vie. Elle ne savait pas pourquoi il était devenu celui qu’il était aujourd’hui. Au fond de lui, il savait que Zoella n’aurait pas aimé son nouveau comportement. Il savait qu’avec ses mots durs, Hope avait raison. Mais Rowan ne voulait pas l’entendre. Il ne voulait pas qu’on le sorte de son état. « Ta gueule, j’ai dit… » Hope tenait vraiment à finir la tête la première dans la fontaine. Le ton du garçon était moins agressif, moins sûr de lui que la première fois qu’il l’avait sorti. Si elle ne cessait pas de parler, il allait devoir la faire taire. Il était prêt à l’intimider, à lui faire regretter d’avoir ouvert la bouche. C’est là qu’il vit ses larmes. Cette conne, elle lui donnait aussi envie de pleurer. Putain, il ne pouvait pas lui montrer qu’il était sensible. Il avait assez pleuré sur la mort de Zoella, il était tant qu’il cesse, deux ans après, de verser des larmes pour elle. Alors il fit de son mieux pour ne pas montrer à Hope qu’il était troublé. Parce qu’il sentait qu’elle aussi, elle l’avait beaucoup aimée. « Pardonne-moi... Je... Je n'aurais jamais dû dire cela. » Dit-elle tout en cherchant à croiser son regard alors que lui cherchait à le fuir. En effet, Hope n’aurait jamais dû dire ces mots, elle aurait dû fermer sa gueule quand il le lui avait intimé. Il s’approcha d’elle, yeux dans les yeux, il lui dit : « Tu ne sais rien, Hope. Quand on ne sait rien, on se la ferme. » Mais peut-être qu’elle faisait partie de ces filles bavardes qui ne pouvaient rien garder pour elles. Contrairement à Zoella, qui elle, savait se contrôler.

« Si tu crois que j’aurais pu lever la main sur elle, tu te trompes. Je ne lui aurais jamais fait de mal. » Tenta-t-il d’expliquer à la Serdaigle. Quand elle avait dit que c’était comme s’il l’avait tué de ses propres mains, c’était ce qui l’avait le plus blessé. « J’me suis fait avoir comme un con par mes sentiments. Plus jamais. » Rowan attrapa le poignet d’Hope et serra pour lui faire mal. Il se vengeait pour ce qu’elle venait de dire. Elle avait beau s’excuser, cela ne suffisait pas. Il ne pouvait pas le lui pardonner aussi facilement. Elle savait très bien que ce qu’elle venait de dire était impardonnable, il l’avait lu dans son regard. Si le Gryffondor n’avait jamais fait de mal à Zoella, ce ne serait pas le cas pour Hope. Il se fichait d’Hope. Ils n’étaient pas amis. Zoella était loin, elle ne le verrait pas. « Elle est morte, on ne peut pas trahir un mort. » Il ne pouvait que protéger les vivants. Aujourd’hui, Rowan s’était éloigné de ses amis nés moldus pour leur protection. Il sortait avec une fille de sang-pur pour que ses parents ne se doutent de rien, un plan parfait qui n’avait pu être concrétisé que grâce à la complicité de Perséphone, qui vivait la même chose que lui. A deux, ils formaient à présent aux yeux de tous un couple de pro-sang-pur. Ils se comprenaient. Leur amitié et le faux couple qu’ils formaient lui permettaient d’avoir une raison de ne plus chercher de petite-amie. L’amour, il y renonçait. La seule chose qui le faisait vivre à ce jour, c’était la haine. Rowan n’avait toujours pas lâché le poignet d’Hope, mais quand il desserra son étreinte, il vit une marque rouge. « Retire ce que tu as dit ou casse-toi. » Souffla-t-il avant de libérer son poignet.

Je sais que mes mots même quand ils sont voués à rassurer peuvent sembler presque insultants. Je repense quand j'ai dit avoir été surprise par la distance entre ce que me racontait Zoella et les apparences dégagées par Rowan. Elle m'avait dépeint un jeune homme tendre et doux, protecteur et romantique. Il le semblait plus avec elle qu'avec quiconque. Il avait une âme de poète en quelque sorte et je ne m'étais pas attendue à autant de profondeur dans ses sentiments. J'aurais pu le vexer avec mes mots maladroits mais ils étaient loin. Les excuses n'avaient aucun intérêt car j'avais trouvé le moyen de dire pire, bien pire. Je venais de proférer une forme d'accusation comme s'il était responsable de toute cette histoire. Une partie de moi voulait ardemment trouver un coupable et il était celui tout désigné. Elle avait payer de sa vie pour l'avoir aimé lui et je trouvais cela profondément injuste. Elle était si innocente, elle n'aurait pas dû souffrir d'avoir suivi son cœur Elle l'avait laissé dicter son chemin et je réalise soudainement que s'ils l'avaient trouvé, c'était sans doute par son intermédiaire. À mes yeux, il était responsable en partie de la fin dramatique de celle qui incarnait douceur et certitude. Je lui en voulais, pire, je le haïssais du plus profond de mon âme. Il aurait dû la protéger. Il était celui à blâmer. « Ta gueule! » Je ne peux que sursauter. Je ne peux que le regarder avec incrédulité. Les poings serrés, je peux lire la colère briller dans son regard. Il souffre. Lui aussi souffre. Je reprends finalement conscience que sa douleur est profonde et gravée au fer dans son cœur Il l'aimait sincèrement. Je le réalise, enfin, je m'en rappelle. L'injustice de mes propos me sautent aux yeux. Il a payé le prix d'être né dans la mauvaise famille. Il ne peut pas vraiment être tenu responsable pour les actions des autres? Non, lentement, je relâche mes défenses. Je laisse cette vérité s'imposer dans mon esprit et percer la carapace de colère qui entoure mes paroles. Nous ne sommes jamais responsables que de nos propres actions.

Je tente de maîtriser mes émotions et de reprendre le dessus. Je n'ai pas envie de me donner en spectacle. Je n'ai pas envie non plus de donner des raisons supplémentaires à cette école de reprocher son comportement lamentable à Rowan. Nous sommes différents, nous gérons différemment mais d'une certaine façon, nous sommes unis par le souvenir d'une personne. Je voudrais comprendre pourquoi mais ses mots me font l'effet d'une douche froide. Je baisse la tête lamentablement, honteuse de mon attitude. Il a raison. Je ne devrais pas juger sans savoir mais j'ai l'impression que si je ne le pousse pas à bout alors jamais je n'obtiendrai un maigre aperçu de la vérité qui entoure tout cela. Je ne lui réponds, il m'a dit deux fois de me la fermer. Je n'étais pas du genre à m'emporter mais le stress, la peur, l'angoisse me prenait cette énergie qui me permettait d'ordinaire de garder mon self-control. Je me force à maîtriser le tremblement de ma voix, le flot d'émotions qui couvent en moi comme un tsunami qui ravage tout sur son passage. « Je sais que tu n'aurais pas levé la main sur elle. » Mais la douleur irradie dans mon poignet alors que je le fixe. Je me retiens de pousser un cri plaintif. Orgueil ou fierté, je ne saurais le dire mais je refuse de lui donner le plaisir de comprendre qu'il a atteint son but. Intimidation? Vengeance? Je m'en fous sincèrement en ce moment. Il a tort. Il pense ne pas être en train de se laisser avoir par ses sentiments mais il domine toute son existence. « Tu as tort. Tu prétends que tes sentiments dominent pas ta vie mais cette violence est la preuve que non. T'es pas indifférent. Tu veux juste le faire croire. » Ses mots me font mal mais il n'a pas tort. On ne peut pas trahir les morts mais rien ne nous empêcher de faire honneur à leur mémoire. Il bafouait tout sur son passage avec cette attitude. Il détruisait tout. Il effaçait cet amour et tout ce qu'il y avait eu de beau en lui un jour. Je lui en voulait pour cela et malgré moi, les mots fusent. « Non on ne peut pas et heureusement car tu sembles avoir oublié Zoella dans les bras de cette sang pur., et si seulement c'était la seule avec qui tu prends du plaisir. » Je bluffe pour découvrir une part de vérité plus sombre, une que je ne veux pas vraiment connaître mais j'ai besoin de savoir s'il a tourné la page. Je n'ai rien contre Perséphone mais cette obstination à vouloir ne s'entourer que de sangs purs me renvoient à cette sensation qu'il trahit la mémoire de celle qui ne mérite pas de l'être. Je voudrais qu'il puisse se rendre compte qu'il n'est plus lui-même.

La pression sur mon poignet se relâche et mon regard se porte instantanément vers lui. Je vois la marque rouge qui laisse penser que bientôt il virera au bleu. J'ai mal mais je me sens vivante. Si je peux souffrir c'est que je suis toujours là, moi. J'ai cette chance qui a été arrachée à Zoella. Je le regarde mais sa menace plane dans l'air qui nous sépare. Je devrais reculer et remettre de la distance entre nous pour qu'il ne puisse plus me toucher mais je reste figée face à lui. La colère brille dans mes yeux mais je ne suis plus guidée par elle. Je sais que j'ai été trop loin. « Je suis désolée d'avoir pu laisser penser que tu aurais pu lui faire quoique ce soit. Tu n'es pas responsable même s'ils l'ont trouvée, c'est sans doute parce qu'elle ne pouvait se résigner à cesser de t'écrire. C'était son choix, sa prise de risque mais elle l'a payé trop durement. » Chacun est responsable de ses propres choix dans la vie. Zoella en avait fait un qui l'avait conduit à la mort. Je ne l'en blâmais pas mais si Rowan était responsable, Zoella aussi mais elle aussi d'une certaine manière. Elle aurait dû lui dire de cesser cette correspondance ou l'aider à la rendre plus subtile. Chacun pourrait probablement assumer une part de culpabilité dans tout cela mais les véritables coupables dormaient paisiblement. Ils ne se posaient aucune question et n'en souffraient probablement pas. Au lieu de s'en vouloir à soi-même, de perdre son énergie dans cette culpabilité, il y avait un coupable à démasquer. « Tu n'es pas responsable mais tu ternis son souvenir. Elle aurait tellement mal si elle pouvait voir comment tu agis. C'est comme si tu la tuais une seconde fois et une troisième voire même plus... comme si tu l'assassinais un peu plus à chaque fois que tu affiches du mépris pour un né moldu. Elle ne mérite pas que sa mémoire soit saccagée par celui qu'elle aimait. » Je sais que je parle bien trop sincèrement, que je ne réfléchis pas suffisamment mais si je dois le pousser à bout pour lui ouvrir les yeux, rien ne m'en empêchera. Je veux que mes mots soient comme une gifle qui fait un bruit en percutant sa joue. Je veux que mes mots lui fassent prendre conscience qu'il n'y a rien à gagner à s’obstiner dans cette voie. Je n'ai pas peur pour moi en cet instant précis, je veux prouver que je n'oublie pas Zoella et que je fais mon possible pour être fidèle à son souvenir. Je veux qu'il sache que je ne vais pas lâcher l'affaire. J'ai peur qu'il ne parte coupant court à notre échange alors je viens agripper sa manche là où se cache à même la peau le tatouage. « Tu peux pas agir comme ça et porter ce tatouage, c'est comme une insulte que tu lui fais. » Mon regard est planté dans le sien et il est clair que je ne vais pas me laisser impressionnée.

« Je sais que tu n'aurais pas levé la main sur elle. » Rétorqua Hope à Rowan quand il dit qu’il n’aurait jamais fait de mal à Zoella. Le Gryffondor avait eu tort de tomber amoureux. Il ne recommencerait plus. Personne ne méritait de le faire autant souffrir. La seule qui valait toutes les souffrances n’était plus de ce monde. En colère, Rowan avait saisi le poignet d’Hope et serra fort pour lui faire mal, afin qu’elle retire ce qu’elle venait de dire spontanément. La Serdaigle lui tenait tête. « Tu as tort. Tu prétends que tes sentiments dominent pas ta vie, mais cette violence est la preuve que non. T'es pas indifférent. Tu veux juste le faire croire. » Le brun serra le poignet pour ne pas se laisser atteindre. Rowan n’avait jamais voulu dire qu’il ne voulait plus avoir aucun sentiment. Il voulait simplement parler des sentiments amoureux, ceux qu’il avait pour Zoella, ceux qu’il n’avait plus pour personne. Mais sinon, le Gryffondor ressentait pléthore d’autres émotions. Il était humain, malgré les apparences. Alors qu’elle l’accusait de trahir son ancienne petite amie, de bafouer sa mémoire, il lui dit qu’elle n’était plus là et qu’elle ne pouvait rien y changer, qu’elle ne pouvait pas lui en vouloir. Malgré la pression qu’il exerçait sur son bras, Hope continua à le provoquer. La rousse le cherchait. Si elle continuait, elle le trouverait. Et elle le regretterait. « Non, on ne peut pas et heureusement car tu sembles avoir oublié Zoella dans les bras de cette sang-pur. Et si seulement c'était la seule avec qui tu prends du plaisir. » Elle lui parla de sa petite-amie, Perséphone. Si seulement elle savait qu’ils ne faisaient que jouer un rôle, qu’ils n’étaient qu’amis et qu’ils se protégeaient l’un l’autre. A la dernière partie de sa phrase, Rowan resta imperturbable. Elle bluffait, forcément. Hope ne connaissait rien de sa vie. Et depuis qu’il sortait avec Perséphone en apparence, il était plutôt sage. C’est vrai qu’il avait été avec une ou deux filles depuis la rentrée, mais c’était tout. Et il y avait eu Belladona, son amie, sa confidente, la gamine que le brun adorait comme une sœur. Un soir où ils avaient été trop bourrés pour se rendre compte qu’ils ne se guérissaient pas l’un l’autre en se faisant du bien. Le lendemain, c’était trop tard. C’était à peine deux mois après la mort de Zoella. Ce jour-là, oui, il avait l’impression de l’avoir trahie. Mais deux ans plus tard, il lui semblait avoir récupéré le droit de faire ce qu’il voulait de sa vie. Enfin, ce qu’il voulait était une utopie car il s’était conformé à l’idée de ce que ses parents souhaitaient qu’il soit. « Arrête tes conneries ! Perséphone est la seule qui compte à mes yeux à présent. Ne t’avise pas de lui faire croire le contraire. Et ça te pose un problème qu’elle soit de sang-pur ? » Hope se croyait si maline qu’elle était capable d’aller voir Perséphone pour se renseigner sur lui. Perséphone se ficherait sûrement d’Hope, d’elle de ses amis nés-moldus, mais Rowan préférait faire croire qu’il défendrait cette relation coûte que coûte, pour montrer qu’il avait tourné la page sur Zoella et qu’Hope devrait peut-être en faire de même.

Peu à peu, il la lâcha en lui demandant de s’en aller ou de retirer toutes ses paroles. Si Hope avait le moindre instinct de survie, elle s’exécuterait. Elle commençait à bien l’énerver. Au lieu de partir, elle resta et ouvrit à nouveau la bouche pour parler. Son audace le surprenait. « Je suis désolée d'avoir pu laisser penser que tu aurais pu lui faire quoique ce soit. Tu n'es pas responsable même si, s'ils l'ont trouvée, c'est sans doute parce qu'elle ne pouvait se résigner à cesser de t'écrire. C'était son choix, sa prise de risque, mais elle l'a payé trop durement. » Rowan avait mal, à nouveau, elle enfonçait le couteau dans la plaie en lui disant que Zoella avait été retrouvée à cause de lettres qu’elle et lui s’échangeaient. Personne n’était au courant, pourtant. Bluffait-elle à nouveau ? Recevait-elle elle aussi des lettres de Zoella ? Dans ce cas, elle était tout aussi responsable que lui. Alors, même si elle se rétractait, Rowan sentait toujours une part d’accusation dans sa voix, comme si la Serdaigle cherchait à lui dire ce qu’il voulait entendre avant de l’enfoncer. Il ne la pensait pas si vicieuse. « Tu n'es pas responsable, mais tu ternis son souvenir. Elle aurait tellement mal si elle pouvait voir comment tu agis. C'est comme si tu la tuais une seconde fois et une troisième, voire même plus... comme si tu l'assassinais un peu plus à chaque fois que tu affiches du mépris pour un né moldu. Elle ne mérite pas que sa mémoire soit saccagée par celui qu'elle aimait. » Chaque mot sortant de la bouche de la rousse, il avait envie de le lui faire ravaler. Comment osait-elle lui dire qu’il la tuait encore et encore ? Elle n’avait donc rien compris, quand il s’était saisi de son poignet pour qu’elle se taise ? Rowan dût faire preuve d’un énorme self-control pour ne pas l’attraper et lui faire retirer ce qu’elle venait de dire à nouveau. Sauf qu’il n’en avait pas à revendre, du self-control, et qu’elle ferait bien de faire attention. Mais quand elle agrippa sa manche, ce fut le geste de trop, le geste qui le fit perdre tout contrôle. « Tu peux pas agir comme ça et porter ce tatouage, c'est comme une insulte que tu lui fais. » La sang-mêlé le regardait avec un air de défi, un air qu’elle ferait mieux d’oublier et d’effacer de son visage sur le champ. D’un geste vif, il leva le bras vers elle pour l’attraper par la gorge, la forçant au passage à le lâcher. Il serra, encore et encore. Elle allait regretter. Il serra jusqu’à ce qu’il puisse lire le regret dans ses yeux. Les yeux de Rowan étaient embués par la rage. Il lui faisait mal comme elle venait de lui faire mal. Les mots d’Hope ne cessaient de tourner dans sa tête à mesure qu’Hope étouffait. Encore un peu. Encore un peu. Elle se débattait. Elle luttait pour sa vie. À tout moment, quelqu’un pourrait les surprendre et la sauver. Mais personne n’était là pour elle.

« Ça fait quoi de mourir, Hope ? » La rage rendait Rowan fou, aveuglé. Avant qu’Hope ne perde connaissance, il la relâcha d’un coup, sans d’éloigner alors qu’elle reprenait son souffle comme elle le pouvait, inspirant petit à petit, laissant ses poumons retrouver de l’oxygène. « Je l’ai assez insultée, là ? » Demanda-t-il en voyant noir. Hope ne tenait plus sur ses jambes et était au sol, Rowan l’attrapa par sa crinière rousse et la traîna de quelques centimètres jusqu’à la fontaine, menaçant de lui faire piquer une tête. « Tu veux savoir ce que ça fait vraiment, quand la vie te quitte deux fois, trois fois, et même plus ? » Rowan était plus fort qu’Hope et même si elle cherchait à se défendre, sans pouvoir atteindre sa baguette, elle ne pouvait rien contre lui. Zoella serait déçue de lui, oui, il le savait, mais elle n’était plus là. Elle l’avait quittée. Sans le réaliser, depuis qu’il avait repris la parole, en lui demandant ce que cela faisait de mourir, ses yeux embués s’étaient transformés en larmes. Une de ses mains maintenait Hope près de la fontaine, l’autre essuya ses larmes d’un revers de manche. Il ne voulait pas pleurer devant elle, pas après tous ses efforts pour continuer d’être le monstre qu’il était devenu. Rowan craquait. Son flot de larmes devint rapidement imparable et il ne pouvait plus rien cacher à Hope. Sa prise sur ses cheveux roux se relâcha à mesure qu’il perdait pieds. Hope ne bougeait plus, elle venait d’avoir peur pour sa vie. Rowan s’agenouilla à ses côtés et la regarda dans les yeux, à travers ses larmes. « Je suis désolé, Hope. Je… Je suis désolé. » Articula-t-il difficilement. Il était brisé. Il réalisait enfin à quel point il n’était plus le même, à quel point il se laissait démolir par sa souffrance et sa peine depuis que Zoella avait quitté ce monde. Elle l’avait changé. Elle l’avait détruit. Et ses amis, à qui il avait tourné le dos, n’avaient rien pu faire pour l’empêcher de se noyer dans ce rôle. Zoella aurait honte de lui, elle le détesterait, tout comme Hope devait le détester à cet instant. Il n’avait jamais osé aller aussi loin. S’il avait été si en colère, c’était parce qu’elle était très proche de Zoella. Rowan arrêta de faire face à Hope et s’assit dos à la fontaine, appuyé contre le rebord. Il plongea sa tête dans ses mains. Hope pouvait s’en prendre à lui si elle le souhaitait. Il n’avait jamais été si faible face à personne depuis le jour où il avait appris qu’elle était morte. Si Hope avait le moindre amour propre, elle s’en irait. Elle le laisserait seul avec sa détresse. Elle l’enfoncerait, même, elle allait montrer les traces sur son cou et sur son poignet à un professeur. Elle se vengerait et le ferait renvoyer. Elle lui demanderait de ne plus jamais l’approcher.

Je ne comprends pas comment il peut s'afficher avec cette Serpentarde. Je n'ai a priori rien contre elle mais pourquoi avoir choisi une fille dont la pureté du sang est en contradiction avec celui de Zoella? J'ai l'impression que c'est insulté celle qui comptait bien plus;a mes yeux qu'aux siens visiblement. Cela ressemble à une énième provocation et je le ressens comme une telle injustice. J'aurais sincèrement pu me réjouir pour lui si je n'avais pas su ce qu'il a fait à Maddox, comment il s'est en lâchement pris à lui. J'aurais pu la voir comme une fille parmi tant d'autres, qu'elle soit de sang pur ou non, si seulement l'attitude de Rowan n'était pas si épouvantable. Il refuse que je tente de faire croire le contraire à Perséphone mais j'ai bien d'autres chats à fouetter pour dire d'aller voir cette fille. Je ne prendrais aucun plaisir à briser leur amourette. S'il veut s'y accrocher, tant mieux pour lui. Je n'y crois pas. J'y vois une insulte à la mémoire de Zoella mais cela ne signifie pas que je veuille ouvrir les yeux de la vert et argent. Je ne suis pas méchante et Rowan doit bien mal me connaître pour pouvoir penser que je perdrais mon énergie à lui raconter des choses. Il ne me connaît pas du tout, c'est une évidence au fond. Et je me demande pourquoi je suis toujours là devant lui à perdre mon temps et mon énergie à essayer de le ramener vers un chemin plus raisonnable. Il peut continuer de se fourvoyer mais je sais à présent que son amour pour mon amie n'était que foutaises, mensonges et poudre aux yeux. Il l'a oubliée. Il l'a chassée de son cœur et de ses souvenirs. Il a fait le pire à mes yeux. Il n'a pas seulement repris le cours de sa vie mais il l'a fait en allant à l'encontre de tout ce qu'elle représentait. Je lui en veux d'une certaine manière, je l'envie de réussir à délaisser le passé pour aller de l'avant. Mais pourquoi aller contre la mémoire de Zoella? Je crois que mon incompréhension guide ma colère. Je sais que je devrais me taire. J'ai conscience que je vais trop loin mais quelque chose dans la souffrance que j'éprouve a besoin de se déverser contre lui. Je voudrais pouvoir partager cette peine avec lui mais pourquoi il se comporte comme un gros con? Pourquoi cette attitude de connard? Je pense mes excuses mais je pense aussi qu'il fait pire en agissant de la sorte. J'ai l'esprit tellement confus. Je ne cherche pas la faille à tout prix ou plutôt si mais pour atteindre son cœur Je ne veux pas l'enfoncer mais j'ai besoin de sentir qu'il reste quelque chose de bien dans le fin fond de son cœur Je joue un jeu qui me dégoûte et me fait honte. Je me rabaisse mais je veux m'accrocher à l'espoir qu'il n'est pas vraiment le salaud qu'il prétend être. Je sais que je commets le geste de trop, que je dis la phrase de trop. Je le sens dans l'air chargé d'électricité qui se dégage. Je devrais reculer maintenant mais pendant quelques secondes, mon corps ne me répond plus. Mon esprit semble déconnecté du reste et le temps que je réalise que j'aurais du fuir, il est déjà trop tard pour le faire.

Sa main se referme sur ma gorge. Il serre, de plus en plus fort. Je sens mon souffle m'échapper, se couper. Je n'arrive plus à respirer et plus les secondes filent, plus je me sens étouffée. Mon cœur s'affole dans ma poitrine battant à une cadence folle. Il me fait mal à chaque battement désespéré. Il semble se heurter violemment contre ma cage thoracique et envoyer un appel à l'aide. Il crie et supplie alors que le sang qui pulse dans mes veines souffre de ce manque d'oxygène. Désespérément, je cherche à capter un peu d'air, à le laisser se faufiler mais rien. Rien ne filtre et je ressens une douleur dans chaque parcelle de mon corps. Il souffre avec une telle violence. J'ai beau me débattre, tenter de griffer ce bras, de le faire lâcher prise, je suis fragile. Je ne suis que faiblesse et aucun des gestes que je ne pose semble vouloir l'amener à me relâcher. J'essaie de le griffer à sang mais ma main semble ne plus vouloir que frôler le vide, l'air alors que le peu de force que j'ai jamais pu avoir s'évapore. Je regarde autour de moi désespérée. Je ne peux pas crier. Je suis muette et personne ne vient. Je fixe la salle d'un regard désespéré mais il n'y a pas de sauveur prêt à venir me secourir. Les contours de ce monde deviennent flous, je ne vois bientôt plus que lui. Il exprime une telle rage. Il semblait avoir perdu la raison. Ses mots s'inscrivent au fer dans mon esprit comme un tatouage voué à ne jamais disparaître. La peur m'anime. Les regrets noient mon esprit. Je pense à Maddox à qui jamais je ne pourrai avouer que je tiens à lui plus qu'à un ami. Je pense à tous ces projets que nous avions et qui pourraient ne jamais voir le jour. Je pense à Zoella qui souffrirait de cela. Je pense à lui Rowan qui un jour sera peut-être rongé par la culpabilité. Je songe à ce temps que je n'aurai peut-être pas. Mais je n'ai pas peur de mourir. La mort ne m'effraie pas et elle pourrait même être libératrice. Je tente de le supplier du regard mais de quoi? D'en finir ou de me lâcher? Je n'en ai pas la moindre idée. Je n'arrive plus à penser. J'abandonne. Alors que je cesse de lutter, j'éprouve la sensation de me noyer. J'ai l'impression que l'eau entre dans mes poumons et me prive de tout oxygène. Je me demande si ma tête s'est retrouvée dans la fontaine sans que je ne m'en sois rendue compte. Je ne suis plus le fil. « Tu dois mourir Hope. » La voix est douce, elle me rappelle quelque chose. Ce n'est pas Rowan. Je manque d'air. J'ai l'impression que je sombre. Alice. Un prénom. Un flash. Un souvenir ressurgi. L'air entre à nouveau et la sensation de me noyer s'évapore mais les images venues de si loin restent gravées dans mon esprit. L'air me brûle la gorge alors qu'il revient à flot. Trop d'oxygène en une fois, j'en ai la tête qui tourne. Ça brûle. Je ne sais pas à quel moment je m'effondre incapable de tenir debout. Mes jambes ne me portent plus. J'essaie de reprendre de l'air plus lentement, par petite bouffée pour diminuer la douleur. Mes joues sont baignées de larmes. Mon regard est hanté. Le sol est froid sous moi, je frissonne. Je crois que le froid me fait du bien, non en fait, je suis glacée. Je ne sais plus. Je voudrais fermer les yeux et m'endormir pour que ce soit juste un cauchemar.

Je grimace alors qu'un léger son étranglé m'échappe. Je n'essaie pas de me défendre même si ma tête me fait un mal horrible quand il me tire par les cheveux. Je regarde la fontaine et quelque chose se brise. Ses mots ne me font rien. Ma voix est fragile. Ma voix est cassée. Rauque et hachurée à cause des meurtrissures de ma gorge. Je voudrais ne pas parler tant c'est douloureux. J'ai l'impression de chuchoter tant c'est pénible de simplement formuler quelques mots. « Vas y. » Ce serait ironique de mourir noyée quinze ans plus tard. Je ferme les yeux m'attendant à sentir l'eau entrer dans mes poumons. J'essaie de ne pas craquer. J'ouvre les yeux quand rien ne vient et je le regarde étonnée de voir des larmes sur ses joues. Je le fixe mais je n'ose rien. Je suis figée. J'ai peur. Je suis terrorisée. J'ai mal aussi. Je me tends les muscles contractés quand il s'agenouille face à moi en larmes. Il me fixe. Je me fous de ses excuses. Je voudrais le frapper. Je le fixe incapable de fuir. Je doute pouvoir simplement tenir sur mes jambes. Mais plus je le regarde et moins j'ai envie de partir. Il souffrait. Il le méritait. Ou pas. Je devrais partir et pourtant, je me traîne à ses côtés. Ma main tremble, la peur domine totalement en moi et pourtant lentement je viens poser la main dans ses cheveux. « Ce n'est pas grave... » Bien sûr que ce l'est mais je l'ai cherché. « Je suis désolée de t'avoir provoqué... c'est ma faute. Je le méritais. » Je pense ces mots, cet aveu. Je suis responsable. Il aurait dû aller jusqu'au bout. « Tu souffres. Je le comprends. Je le sais. Tu l'aimais. Rowan... est-ce ton choix d'être comme tous les autres, comme les sangs purs qui méprisent les nés moldus ou ce n'est pas toi? Joues-tu ce rôle? » Mes mots sont lents. Je tremble totalement. Je crois qu'en cet instant, j'ai pitié de lui. Non je suis triste pour lui car il souffre. Sa souffrance me semble supérieure à la mienne alors que j'ai la sensation de pourtant être brisée. Je viens lentement passer mes bras autour de lui comme je peux dans une tentative de le consoler. Il peut me repousser, il ne peut rien me faire de pire. « Je ne t'en veux pas. » Je caresse ses cheveux essayant d'apaiser sa douleur. Je ferme les yeux alors que dans mon cœur, mon âme et mon corps, il ne me reste qu'un profond désespoir.

Pendant quelques minutes, Rowan n’était plus lui-même. Aveuglé par la peine et la colère, il s’était attaqué à Hope comme il ne s’était encore jamais attaqué à personne. Serrant ses mains autour de son cou, il avait voulu lui ôter la vie. La folie l’habitait soudain. Rowan se vengeait, il se défaisait de toute la douleur qui le rongeait depuis des mois et qu’il n’avait pas encore évacué en totalité. Soudain, il relâcha Hope. Avant qu’elle ne perde connaissance. Avant qu’il ne soit trop tard. Il souffrait. Il avait mal, si mal qu’il en pleurait. Les mots d’Hope l’avaient beaucoup affecté. Il lui en voulait. Il la détestait. Il se montrait faible devant elle. Tout était de sa faute. Et puis, elle aussi, elle pleurait. Mais pas pour les mêmes raisons. Elle pleurait parce qu’elle risquait de perdre la vie. Parce qu’il ne semblait avoir aucune pitié pour elle. Après l’avoir libérée de son étranglement, il l’avait traînée jusqu’à la fontaine. « Vas-y. » Dit Hope à Rowan avec sa voix abimée. Il ne savait pas si la Serdaigle cherchait à le provoquer ou à le dissuader, mais ces mots firent leur petit bout de chemin dans son cerveau et peu à peu, il s’en voulait de la traiter de cette façon. Même s’il pleurait depuis quelques minutes déjà, il finit par en perdre sa force, qu’elle soit physique ou mentale. Il lâcha Hope et s’agenouilla face à elle. Il regrettait déjà tellement d’avoir tenté de la tuer. Il s’excusa. Comme si l’ancien Rowan était de retour. Comme s’il réalisait que le nouveau Rowan n’était qu’un connard blessé. Il s’en voulait vraiment. Il savait qu’elle ne le pardonnerait pas. Zoella lui en voudrait tellement de s’en être pris à celle qu’elle admirait autant. Il s’attendait à ce qu’Hope se venge, à ce qu’elle cherche à lui faire du mal pour ce qu’il venait de faire. Il s’attendait à ce qu’Hope fuit, à ce qu’elle aille le dénoncer sans se faire prier. Il s’attendait à tout, sauf à la réaction qu’elle allait avoir. Alors qu’il s’adossait à la fontaine et qu’il enfouissait sa tête dans ses mains, repensant à ce qu’il venait de faire, il sentit toujours sa présence. Plus surprenant encore, elle s’approcha doucement de lui et posa sa main tremblotante sur ses cheveux. « Ce n'est pas grave... » Dit-elle avec son geste beaucoup trop tendre et hors contexte pour la situation. Rowan l’avait étranglé, elle était sur le point de perdre connaissance, puis il l’avait menacée une deuxième fois de la tuer, et ce n’était pas grave ? Elle devait vraiment avoir manqué d’oxygène pour lui dire de telles choses et l’approcher de sa propre volonté. En plus, elle osait le toucher. N’avait-elle pas compris la première fois qu’elle l’avait touché ? C’était comme si elle lui redemandait de s’énerver. « Je suis désolée de t'avoir provoqué... c'est ma faute. Je le méritais. » Rowan ne releva pas la tête vers Hope. Est-ce qu’elle pensait vraiment le mériter ? Il avait été beaucoup trop loin et elle ne semblait pas le remarquer et lui en tenir compte. Elle s’excusait de l’avoir provoqué, mais ce qu’elle lui avait dit après l’interpelait. « Tu souffres. Je le comprends. Je le sais. Tu l'aimais. Rowan... est-ce ton choix d'être comme tous les autres, comme les sangs-purs qui méprisent les nés-moldus ou ce n'est pas toi ? Joues-tu ce rôle ? » Avait-elle enfin compris qu’il aimait Zoella parce qu’il avait serré ses mains autour de son cou ? Parce qu’il souffrait et qu’elle l’avait blessée ? Puis elle lui parla de son comportement, lui rappelant pourquoi elle était vraiment là, par qui elle avait été envoyée.

« Je ne t'en veux pas. » Dit Hope en passant ses bras autour de lui. Elle lui caressa les cheveux, comme un enfant, et il n’avait aucune réaction, toujours la tête dans ses mains, yeux rivés au sol. Ses joues étaient mouillées, et dans cette position, il avait vraiment l’impression de retourner quelques années en arrière. « Tu devrais m’en vouloir. » Lâcha-t-il avant d’essuyer ses joues et de relever peu à peu la tête. Il tourna la tête vers Hope, la forçant à se détacher un peu de lui sans pour autant de dégager de son étreinte. Il regarda les marques qui étaient en train d’apparaître dans son cou. « Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Je t’ai presque tuée… Tu veux vraiment mourir ? Tu penses réellement que tu l’as mérité ? Tu veux mourir mes mains ? » Rowan s’énervait à nouveau contre Hope, se souvenant de ses mots un peu plus tôt, quand il allait plonger sa tête dans la fontaine. Elle lui avait dit : « Vas-y. » Il la regarda sans comprendre. Avait-elle pu souhaiter qu’il en finisse ? Elle souffrait, comme lui, mais souffrait-elle au point de vouloir mourir ? Lui ne voulait pas en finir. Il ne croyait pas en la vie après la mort et il savait qu’il ne rejoindrait pas Zoella s’il s’en allait. Rowan repoussa envie Hope, elle l’étouffait à être trop près de lui après ce qu’il lui avait fait. Il avait peur qu’elle dise à nouveau des conneries pour le provoquer et que cette fois, il ne puisse plus s’arrêter. « Arrête d’être si… naïve. » Naïveté ? Gentillesse ? Folie ? Il ne savait pas trop ce qui animait Hope pour qu’elle puisse croire qu’il n’avait pas d’autre choix que de jouer un rôle. Qu’il y avait un bon Rowan et un mauvais. « Qu’est-ce que ça peut te foutre si c’est mon choix ou non de mépriser les nés-moldus ? Tout n’est pas blanc ou noir, là non plus. » Sa langue avait fourché et il n’avait pas utilisé l’expression sangs-de-bourbe, mais il tenait juste à montrer à Hope que ce n’était peut-être pas tout à fait sa décision, mais qu’il l’avait aussi accepté dans un sens, parce qu’il n’avait pas le choix, mais aussi parce qu’il voulait protéger certaines personnes. « Je ne veux pas qu’il arrive à d’autres ce qui est arrivé à Zoella. » Ce qu’il faisait subir aux nés-moldus qui étaient ses amis avant n’était rien par rapport à ce qu’ils pourraient subir s’il continuait à les fréquenter. Au moins, ils ne s’approchaient plus de lui maintenant. Il avait réussi à se rendre détestable. « Tu ne devrais pas m’approcher non plus. C’est ce que Zoella voudrait. » Son ancienne petite-amie ne voudrait pas qu’il arrive du mal à Hope et elle lui dirait de s’éloigner de lui. Rowan se dégagea totalement de la proximité qui le liait encore avec Hope pour se lever. Si elle ne partait pas, il le ferait. Il s’était assez confié à elle alors qu’il aurait voulu qu’elle parte depuis le début. Il s’était déjà trop ouvert. « Je crois qu’on peut dire à Maelys qu’on a assez discuté. » En posant les yeux sur le cou d’Hope, Rowan se demandait comment sa sœur réagirait quand elle verrait aussi les bleus et ferait le lien entre son frère et la Serdaigle. Hope s’était levée aussi entre-temps, il s’approcha d’elle et leva les mains vers sa chemise pour en redresse le col et cacher les bleus. Mais l’illusion n’était pas parfaite. Elle ne tromperait personne. Il caressa doucement sa peau à l’endroit où il l’avait précédemment étranglée. Elle avait toujours peur, il le voyait. « Tu vas me dénoncer ? » Demanda-t-il tout en se demandant s’il le méritait, s’il le souhaitait ou s’il devait la menacer de ne rien dire à personne.

Sans s'en douter, Rowan a fait renaître une peur en moi. Il a ravivé un passé que je tente de fuir au quotidien. La douleur de ma peau meurtrie là où il a serré n'est rien en comparaison. Je ne pourrais décrire la violence de cette souffrance qui s'imprègne en moi. Je ne saurais mettre des mots, je ne l'ai jamais su. Personne ne me demandera de m'expliquer non plus. Je sens doucement les dégâts que cette discussion a causé. Tout au fond de moi, je sens que quelque chose s'est brisé. Je n'ai même pas la volonté de résister. Je me laisse sombrer happée par cet instinct destructeur. Je ne lutte plus. Je ne résiste plus. Je l'ai cherché et j'ai récolté ce que j'avais semé. Je réalise combien je semble avoir perdu la tête. Il vient de m'étrangler et je le réconforte. Je viens essayer d'apaiser cette peine qu'il ressent alors qu'il vient il y a quelques secondes de me blesser, de tenter de me tuer. Je me sentais comme la coupable dans toute cette histoire. Tout était de ma faute et j'avais l'impression d'être celle qui devait présenter des excuses à l'autre. J'aurais du lui dire combien j'avais tort mais l'énergie me manquait pour lui expliquer pourquoi mes sentiments étaient aussi duels en ce qui le concerne. Ça aurait été lui avouer que j'aime énormément Maddox à qui pourtant il s'en est pris. Ça aurait été expliqué que mon attachement pour Zoella me pousse pourtant à bien l'aimer lui. Je ne sortirai pas de ces deux oppositions dans mes sentiments. Je ne savais pas quoi ressentir car il venait de s'en prendre à moi. Je ressens encore la prise de sa main sur ma gorge et je dois chercher mon air plus paniquée. Je chasse la peur aussi rapidement qu'elle n'est revenue sans jamais cesser ce geste mécanique qui m'apaise. J'aimerais que quelqu'un vienne me prendre dans ses bras pour caresser mes cheveux, me rassurer. Mais il n'y avait personne pour recueillir mes larmes. Je ne le serre pas fort, je n'essaie pas de le retenir et mes bras glissent un peu quand son regard se pose sur moi. Je devrais oui mais je ne suis pas ce genre de personnes incapables de comprendre ou pardonner. « Mais je ne t'en veux pas. » Parler me fait mal et j'ai envie d'encore plus pleurer. Je secoue la tête. Je n'ai pas cette force de lui en vouloir quand bien même je le voudrais. J'étais fatiguée et je ne voulais qu'aller rejoindre mon lit pour m'y effondrer. Je voulais y passer des jours. Je voulais juste me terrer dans un coin. Je n'avais pas l'énergie de lui en vouloir. Ses mots font mal, ils me blessent. Je ne vais pas bien, fatalement c'est moi qui ne va pas bien. Je me rends juste compte que cette violence semble cacher bien plus. J'essaie de voir au-delà des apparences mais c'est moi qui ne vais pas bien. Est-ce que je le veux vraiment? Sa question n'est pas vraiment une car au fond il s'en fout que je lui réponde ou non. Il ne veut pas connaître la réponse. Elle n'aurait aucun intérêt pour lui. Pourtant, oui aujourd'hui, j'en avais assez. Je le désirais. Mes sentiments étaient confus. Mes souvenirs me faisaient souffrir alors je n'aurais pas résisté. Mais quelle importance? J'avais eu la faiblesse de l'avouer, je ne le referais pas. Rowan ne se souciait pas de moi et l'information serait si rapidement oubliée.

Rowan semble à nouveau agité. Je ne comprends pas. Je ne sais pas pourquoi il s'énerve de nouveau contre moi et mes bras retombent mollement quand il me force à le relâcher. Je baisse la tête fixant le sol. La peur restait tenace en moi. Je crois que Rowan aurait obtenu tout ce qu'il aurait pu désirer sans que je ne proteste en cet instant précis. Je serre mes bras autour de moi. Il essaie de briser cet espoir que je nourris qu'il n'aie pas réellement le choix. J'ai besoin de m'accrocher à l'idée qu'il n'est pas un connard fini. Je veux pouvoir penser qu'il a de bonnes raisons de se comporter comme ça. Je proteste malgré moi, la voix faible. Je sais que c'est inutile car il poursuit sans sembler avoir même entendu. « Oui je suis naïve, j'essaie de voir le meilleur en chacun. Mêne en toi en ce moment même. » Je me faisais avoir. Un jour, je finirais par regretter. J'en avais conscience mais en attendant, je continuerai d'agir de la même manière. Je n'arrive pas à dire le moindre mot alors qu'il exprime que je ne me mêle pas de mes affaires. Je ne peux pas lui donner tort. « Je ne me soucie pas du pourquoi pour toi à proprement parlé. Je le fais pour elle. Elle n'aurait pas voulu tout cela. Je m'en soucie car je ne veux pas croire que tu es juste un connard. Je ne peux pas même si je devrais. Je devine que c'est bien plus compliqué que ce que tu ne le prétends. » Je dois reprendre mon souffle fermant les yeux sous la douleur. J'ai mal et je voudrais tellement trouver comment faire taire cette douleur. Je voudrais connaître un sort d'apaisement mais je n'oserais pas même le jeter tant ma magie est défaillante. Je voudrais comprendre ce dont il a réellement peur mais je me refuse à le questionner plus. J'essuie mes larmes du bout des doigts, en tremblant. Je ne pleure plus même si j'ai les yeux rouges et brûlants de trop de larmes. Je chasse les traces de cette peine. « Je n'ai pas peur de toi. » Mensonge. Mais j'ai besoin de me dire que je ne vais pas fuir, me terrer ou longer les murs chaque fois que je vais le croiser à Poudlard. Je refuse cette éventualité même. Je ne peux pas laisser la peur l'emporter mais pourtant je sens qu'elle gagne tout doucement du terrain. « Je n'approcherai plus si tu ne le veux pas. Et je te laisse confirmer à Maelys qu'on a ''bien'' discuté. Je vais l'éviter. » Pourquoi je le protège. Je refuse d'avoir à reporter comment les choses ont viré au carnage. Je ne veux pas qu'elle sache mais je n'aurai pas la force de mentir en ce moment. Je le laisse faire croire ce qu'il veut à sa sœur Je ne l'apprécie pas. Je ne lui dois rien. Dans le fond, la seule à qui j'ai le sentiment de devoir quelque chose dans toute cette histoire ne pourra pas écouter mes mots. Zoella est la seule pour qui je le fais. Maelys n'a été que celle qui me rappelle que je ne pouvais pas fuir éternellement. Je ne tente pas de l'empêcher de se lever. Je le regarde mais je ne supporte pas cette impression d'être minuscule en comparaison. J'éprouve la sensation qu'il pourrait m'écraser d'un coup. Je manque d'énergie mais pourtant je me force à me relever. Je crois qu'il était assez évident que notre pseudo discussion venait de prendre fin. Je me tends instinctivement quand il approche fermant les yeux. Oui j'ai peur de lui. J'ai peur de ce qu'il pourrait faire. Mais je finis par le regarder essayer de dissimuler les marques sur ma peau. Pendant un instant, j’espère qu'il regrette et qu'il voudrait cacher les traces bleutées comme pour effacer ce qu'il a fait. Je me dis que sa caresse est tendre et douce. Je veux me dire qu'il ne me déteste pas. Je pense qu'il y a même un minime intérêt mais sa question brise cet espoir. Je sens une larme couler sur ma joue. Il a simplement peur que je n'aille prévenir quelqu'un de ce qu'il m'a fait. J'essuie rapidement cette larme. J'ai le cœur battant. « Non je ne vais pas te dénoncer. Je mettrai un foulard jusqu'au moment où les marques disparaîtront. Personne ne saura. Je ferai croire que tout va bien alors tu n'as pas à avoir peur de sanctions. » Je garderai ce secret pour moi. Mais là en cet instant précis, j'ai besoin de fuir. La douleur à chaque respiration me donne la sensation que je vais m'effondrer sur place. Je m'éloigne de lui pour me diriger vers mon dortoir. Je veux simplement me coucher et ne plus retenir ces larmes qui menacent. Je veux finir par m'endormir pour oublier la douleur. J'ai besoin d'énergie pour demain pouvoir faire face sans que rien ne paraisse. Je le fuis car je redoute un nouvel énervement, car au fond, les mots font tout aussi mal. Mais surtout, je veux partir avant que je ne tombe tandis que la tête me tourne et que j'ai l'impression de pouvoir tomber au sol à chaque seconde. Je ne le regarde pas quand je m'éloigne dans les couloirs. Je ne me retourne pas essayant de paraître fière même si dans le fond, je ne suis rien de tout cela. Mes pas sont hésitants mais je continue d'avancer car c'est tout ce que je peux faire. Rowan, je crois que j'avais plus de compassion que de haine pour lui.