Improvisation 102 : what a surpriseLa belle brune redescendait de la volière ce matin après avoir rendu visite à sa chouette pour lui confier un message. Voilà plusieurs semaines que la demoiselle envoie des parchemins à un jeune homme. Elle l'a rencontré cet été, pendant la coupe du monde. Charmant et plein de conversation, Ilia avait pris plaisir à faire sa connaissance au fil des jours, même en s'étant fait arrêter par des aurors en mal d'action. Rien n'avait su entacher leur été et pour une fois depuis Noël dernier, Ilia pouvait côtoyer des fans de quidditch sans fondre en larmes. Mais non sans un pincement au cœur. Elle avait parlé un peu de Zahari avec son nouvel ami, mais rien de plus qu'une information banale pour lui avouer qu'il était le premier à vouloir la traîner dans ce genre d'événement.
À la fin de l'été, les deux amis se promirent de s'écrire et la brune tient parole. Oh ils n'échangent pas de vulgaires messages comme les jeunes de leur âge. Là où certains se racontent les derniers potins, eux parlent de livre lu et de théories qui en ressortent. Ilia sait que le jeune homme n'est pas loin, qu'il vit à Pré-au-Lard. Elle y réside pour le travail mais ne l'a pas recroisé depuis la rentrée. Il faut dire qu'elle a été bien occupée ! Beaucoup de rebondissements ces dernières semaines et la sorcière ressentait le besoin de se changer les idées. Dans son message – et parce que lui ne prenait pas les devants – elle lui demandait simplement s'il avait quelque chose de prévu pour le week-end et si une sortie lui plairait. Sa compagne, celle d'une personne aussi intelligente qu'elle et capable d'apprécier les théories particulières lui manquait.
L'air était frais ce matin et alors qu'elle se rendait vers la grande salle pour y observer les élèves en espérant pouvoir parler à sa meilleure amie, Ilia ne s'attendait pas à ce qui allait suivre. Saluant un professeur devant la grande salle, elle échangea quelques paroles avec lui avant de le laisser retourner à sa salle de classe. Il était tôt encore mais il fallait bien se préparer face aux élèves pas toujours attentifs. Et puis un cri retentit, un hululement si particulier que la Bulgare lève la tête. Reconnaissant sa chouette, Ilia ne comprend pas. Elle lui a confié un message à remettre à Nigel, elle n'avait rien à faire là ! Agacée, elle regarda l'animal faire le tour de la salle avant de passer en rase motte vers la table des Serpentards. Et si la chouette avait été ensorcelée pour venir ici ? « Hey Ilia ! » La brune détourna les yeux pour répondre à cette voix familière. C'était un très bon ami de Zahari qui lui parlait et elle en avait presque oublié son messager. Depuis l'entrée de la salle, elle chercha des yeux l'oiseau quand elle le vit reprendre son envol. Un homme se leva à la table des Verts et Argents. Le temps que la demoiselle percute, il était déjà vers l'entrée et sa bouche s'ouvrit en grand. Le son mit quelques secondes à sortir. « Nigel ??? » lâcha-t-elle d'une voix ne cachant pas sa surprise et une pointe de joie.
Le premier levé, le premier à quitter la salle commune des verts et généralement le premier à s’y terrer dès la fin des cours et tout de suite après le repas. Le reste de son temps, il était à la bibliothèque, à se disputer la table avec cet Elijah, à étudier ou en classe. Réglé comme le précis mécanisme d’une montre, il n’y avait que la poussière Hattie pour le retarder. Un jour, Tante Lavinia l’avait fait remarquer. Hattie avait apprécié le parallèle. Nigel un peu moins, mais il n’avait pas eu le choix. Parfois il se disait que la proportion de pas le choix était nettement plus élevé pour sa personne que pour Hattie. Mais pouvait-il se comparer à sa petite soeur de 11 ans et plaider que c’était injuste sans passer pour un pleurnichard ? Alors… il n’avait pas le choix. Un mécanisme bien bien huilé qu’il supportait mal voir enrayer, d’autant plus qu’en ce moment, il se trouvait à Poudlard.
Octobre déjà et il se languissait déjà de rentrer chez lui pour Noël… en espérant qu’ils les laissent rentrer à la maison… il ne manquait plus qu’on les prive de ce moment qu’il attend depuis qu’il a mis les pieds dans cette fichue école. Ça non plus, il n’avait pas eu le choix. + 8000 pour le reste du monde. Petit déjeuner et en classe, que la journée se termine et qu’on passe à la prochaine. C’était tout ce qu’il demandait, que les jours passent, sans trop l’emmerder et que l’année se termine. Avec un peu de chance, il réussirait à convaincre son père qu’il valait mieux qu’il ne retourne pas à Poudlard. L’année suivante. Mais Nigel n’a jamais eu beaucoup de chance dans ce genre de situation. Un hululement particulier lui fait lever la tête.
Unique plaisir matinal, outre le fait de se plonger sans parler à quiconque dans ses bouquins, l’arrivée des hiboux. Ou de la chouette, celle-ci en particulier. Elle ne venait pas tous les jours, ce qui était dommage, à son avis, mais il était bien le seul à se soucier de son avis. Il tire sa manche et le volatile se perche sur son avant bras, traversant presque le tissus de ses serres. La chouette lui aurait déchiqueté le bras chaque fois, il l’aurait quand même tendu sans broncher, tant qu’elle lui remettait la lettre, il s’en fichait pas mal. Une petite collation pour l’animal qui a parcouru un long chemin pour venir se perdre jusqu’ici (s’il savait) et il lit le parchemin d’une traite avec une fébrilité très peu coutumière chez lui.
Bon sang, déjà si tard ? Avait-il le temps d’y répondre avant que ça devienne trop bruyant ici ? Non, surement pas. Il mettait un temps fou à répondre, parce que de un, il soignait son écriture et en plus, les idées se bousculaient beaucoup trop, il n’y était pas habitué, pour qu’il arrive à les mettre par écrit. Parfois, elle avait le temps de lui réécrire avant qu’il n’arrive à répondre. Mais il répondait toujours. À chacune de ses questions. À chacune de ses théories. À chacun de ses mots. Mieux valait aller directement en cours et faire semblant d’étudier, de réviser, ou mieux encore, de prendre de l’avance avant que le cours commence. Il aurait tout le loisir de lui répondre... du moins en partie. Oui, c’est ce qu’il doit faire. Ce sera mieux que de rester parmi tous ces demeurés… enfin, pour le moment c’était que les moins bêtes qui étaient présent, mais plus il y avait de monde, plus… bref… Nigel n’avait pas le monde en très haute estime et le monde le lui rendait très bien.
Il se lève, récupère ses bouquins et se précipite presque (et je dis bien presque) vers la sortie. La seule chose qui le retient de se précipiter sans se retourner c’est son prénom. Il se retourne avant de se rappeler que presque personne ne l’appelle Nigel. « Hey Shaw ! » pour le narguer ou « Oui, Monsieur Shaw ? » venant d’un professeur. Et on ne l’appelle rarement « Nigel » sur ce ton. Et il y a cette voix, particulière, également. Particularité qu’il replace dès qu’il la voit. Eh merde ! Il se maudit de ne pas l’avoir reconnu avant de se retourner parce que justement, il ne se serait pas retourné. Mais ça paraissait si incongru dans cet environnement-ci, à Poudlard. Son cerveau mit de longues micros secondes à envisager qu’elle, si brillante, puisse se retrouver dans ce lieu misérable qu’est pour lui Poudlard. Il met tellement de temps à la dévisager, qu’elle a le temps d’approcher. Peut-être que s’il reste totalement immobile, elle ne le verra plus et elle passera son chemin.
Peut-être…
Non.
- Ilia, dit-il, comme une simple constatation, comme on énonce un fait banal. ET pourtant, ça n’avait rien de banal. Pourquoi t'es là ? demande-t-il, sachant tout de même la réponse.
Auror, p’tit con, t’as pas remarqué ? Et toi ?
Et il croise les bras, essayant de dissimuler tout ce qui pourrait l’identifier comme un Serpentard, mais surtout, comme un élève. Il sait pourtant que c’est inutile. De un parce qu’il est trop tard. De deux parce que de toute évidence, elle travaille ici pour l’année et que même s’il le cache maintenant, elle finira par le savoir. De trois… nan, de un et de deux sont suffisant pour qu’il se sente bien mal à l’aise.
- Je... je veux dire... je ne savais pas que tu serais ici...
Cette formulation passait beaucoup mieux... mais il ne voulait pas qu'elle soit ici. Son dégoût de Poudlard risquait d'entache l'aura de perfection qui entourait Ilia. Et ça le mettait mal à l'aise.
Improvisation 102 : what a surprisePeu pressée ce matin d'aller retrouver les cachots, la demoiselle s'attardait près de la grande salle quand sa chouette se manifesta et passa près d'une table trop bien connue par la jeune femme. Souvent, elle se demande si elle se serait retrouvé avec les Verts comme le reste de sa fratrie ou si le choipeaux l'aurait envoyé ailleurs. La fratrie des Dragons avait été la sienne durant ses années d'études, celle des plus puissants mages de Durmstrang, celle que toute la famille attendait d'elle en raison de son avenir prometteur. Ilia ne décevait pas, elle suivait sa voie dans le respect de ses valeurs et de sa destinée. Son statut d'auror lui plaisait et porter cette longue cape la satisfaisait grandement. C'était un pas en avant vers le ministère et le département qui l'intéressait.
Face à face avec son correspondant, la brunette n'en revenait pas. Comment avait-elle pu passer à côté de sa présence !? Il n'a jamais été dit que l'un ou l'autre serait à Poudlard ni même leurs métiers ou études, mais c'était une surprise totale pour elle qui est d'ordinaire si observatrice. Il faut dire que depuis le dîner de répartition, Ilia n'avait pas une minute à elle. Passant ses journées aux cachots à démêler le pourquoi du comment, elle ne trouvait guère le temps de rencontrer des gens et la barrière se posait malgré elle avec les élèves. Heureusement qu'elle avait des liens solides et forts avec plusieurs personnes de l'école car ses collègues ne suffisaient pas toujours. Ils ne se connaissaient pas tous parfaitement et la sorcière ne souhaitait pas partager toute sa vie avec tous. Ismaël en savait long sur elle, parce qu'ils avaient échangé et qu'il l'avait surpris un soir après une journée de reconstruction de l'aile Ouest. Elle pleurait dans son coin et il avait été là pour lui remonter le moral, apprenant la mort de Zahari toute fraîche. Même Nigel n'était pas au courant ! Ils échangeaient principalement sur les théories qu'ils lisaient.
Ce qu'elle faisait là ? Nigel l'aura compris tout seul en dévisageant sa tenue, puisqu'elle portait un long manteau avec des écussons ne trompant personne par-dessus sa robe sombre. Et puis, le Shaw s'y connaissait un peu en auror. « Et bien, je travaille comme tu peux le voir. » Le pauvre ne savait pas où se mettre, comme s'il cherchait à se cacher. Ilai quant à elle se sentait un peu bête également. « C'est ma faute, je ne t'ai pas dit ce que je faisais à la rentrée. Mais je ne m'attendais pas à te voir ici non plus ! Serpentard alors ! » dit-elle avec une sorte d'approbation. Après tout, beaucoup de ses camarades de Durmstrang se trouvaient là-bas, et... « Mes frères sont aussi à Serpentard. » du moins, ils sont sensé y être... La quarantaine ne leur fait pas du bien, ça ne les rend pas aimable d'une part mais ça les empêche de suivre les cours avec les autres. De nouveaux sujets de conversations s’offraient à eux à présent qu'ils savaient être sous le même toit cette année. Nigel connaissait-il les jumeaux ? Avait-il été témoin de leur mise à l'écart ? Qu'allait-il penser d'elle et de sa position dans cette affaire ? Beaucoup de choses à élucider.
Eh oui, gros malin, elle bosse. Non, mais à quelle autre réponse que celle-là en la voyant affichant les symboles des aurors ? Et pourtant, il était sans doute le mieux placé pour les reconnaître, son père les portait fièrement depuis toujours. Sauf peut-être en 1997, mais c’était une courte histoire. Lui aussi, les voulait. Mais le temps allait finir par lui manquer. Il aurait bien aimé répliquer qu’il travaillait aussi. Mais non, il étudiait. Pour rien, il serait plus utile sur le terrain. Peut-être même ici, à Poudlard, mais de l’autre côté. Et non, il n’aurait jamais choisi Poudlard. Jamais. En tout cas, il savait qu’être élève était totalement inutile. Il sait parfaitement qu’il réussirait à avoir de meilleurs scores que presque tous les aurors ici.
- Je ne te l’avais pas demandé, avoue-t-il.
Sa faute ? Et pourquoi sa faute ? Ils avaient bavardé de tant d’autres choses. Des sujets sur lesquels, il n’avait pas besoin de mentir. Il ne l’avait pas demandé, parce qu’il ne pensait pas la revoir après la fin de l’été. Parce qu’à la fin de l’été, tout le monde rentrait chez eux. À ce moment là, il n’avait pas particulièrement apprécié l’idée de ne pouvoir échanger que par hibou. Tout ne pouvait pas s’écrire. Il s’était dit qu’il trouverait bien une solution. Mais son père avait déterminé que pour sa sécurité, mieux valait qu’il se retrouve à Poudlard.
- Il n’était pas prévu que je me retrouve ici, dit-il, froidement. Moi, je n'avais pas prévu me retrouver ici.
Et il aurait préféré se retrouver n’importe où ailleurs. Il n’avait pas mis les pieds dans cette fichue école depuis l’été 1996 et ne pensait pas un jour devoir y remettre les pieds. Et puis, il n’y était pas, l’an dernier, elle, par contre, y était. Comme il n’y était pas, c’était une raison de plus de ne pas du tout s’attendre à le voir ici. Parce qu’il n’aurait pas du se retrouver ici. Si elle semble approuver les Serpents, lui, il grimace au nom de sa maison et essaie de dissimuler davantage ses couleurs. Et pourtant, il a un léger hochement de tête lorsqu’elle l’informe que ses frères sont également de Serpentard.
- Hum… oui… Yordanov. Évidemment. Je suis navré… pour la quarantaine. Pas vraiment, à vrai dire… mais c’était la chose à dire. Il ne les connaît pas, après tout. Ma petite soeur est à Poufsouffle, dit-il, puisqu’ils en sont aux confidences.
Il connaissait beaucoup de monde. Malheureusement, ça signifiait que beaucoup de monde le connaissaient. Et rapidement, elle finirait par savoir des tas de trucs sur lui, qu’il n’avait pas eu à révéler durant l’été. Comme les crises de panique. Et surtout que c’était un vrai connard. Il aurait préféré ne pas la croiser… il aurait trouvé une excuse bidon pour expliquer qu’il ne pouvait pas la rencontrer à Pré-au-lard. Ça aurait été beaucoup plus facile de lui mentir. Mentir était plus difficile face à face. Nan, en fait, mentir en face d’Ilia lui semblait beaucoup plus difficile.
Improvisation 102 : what a surpriseLa Bulgare s'excuse de ne pas avoir prévenu son amie. Bien que, techniquement, elle ne pouvait pas s'attendre à le voir à Poudlard, puisqu'il n'avait jamais rien dit non plus. La surprise est grande mais pour elle, c'est agréable de retrouver un visage connu, un souvenir de vacances plaisant pour elle qui pensait passer l'été à se morfondre au campement en attendant ses amis supporters. Avec lui, Ilia avait passé de très bons moments et ne regrettait pas d'être venu à la coupe du monde. S'ils étaient tous les deux au même endroit au même moment, ça économiserait les hiboux ! Elle était ravie, sincèrement, de le retrouver.
Tous deux se retrouvent un peu bêtes sur le coup mais la belle l'incite à en dire plus, en lui parlant de la maison dans laquelle il est. Oui, il n'a pas caché le blason vert et argent assez rapidement. C'est comme s'il avait honte et la jeune femme comprit rapidement pourquoi en l'écoutant lui répondre qu'il n'avait pas envie d'être là. « Oh tu étudies une matière qui ne te plaît pas ? » demande l'auror sans se douter de ses désirs. Elle lui confie qu'elle affectionne Serpentard. Elle a beaucoup d'amis mais elle y a aussi et surtout toute sa famille... Les trois derniers nés Yordanov font parti de cette maison, ce qui en dit long sur la famille ! Elle aurait certainement fini à Serdaigle, avec les studieux. On ne saura jamais.
En parlant de famille, Nigel exprime son sentiment sur la quarantaine et une moue contrariée apparaît sur le visage de la jeune femme. Et dire que dans une heure elle devra aller prendre son service là-bas et supporter les regards de ses proches. « Merci. » Elle n'avait pas envie de s'étaler plus sur le sujet au vu de la situation dans laquelle elle était et dans laquelle elle se faisait traiter de traîtresse par ses cadets. Nigel décida de se confier un peu plus lui aussi, révélant que sa petite sœur était chez les blaireaux. L'auror retrouva le sourire en entendant cela. « Oh comme ma meilleure amie ! C'est une excellente maison. Félicitations à elle ! » Nastia était chez les Pouffsouffle elle aussi, la petite sœur Shaw serait bien entourée et s'il le désirait, la blonde veillerait sur elle. Ilia avait à cœur de protéger ses amis. Les inconnus aussi mais ses proches comptaient plus que tout et même si certains rechignaient à la considérer comme une bienfaitrice. « Quel cursus suis-tu ? Nous n'en avons jamais vraiment parlé mais ça m'intéresse. »
Une matière qui ne lui plaît pas ? Il a un léger froncement de sourcils. Pourquoi une matière ne lui plairait pas ? Toutes les matières lui plaisent… s’il peut les apprendre par lui-même. Ce n’est pas une matière en particulier qui qui l’horripile. C’est cette école. Il faut dire qu’il a toujours eu une relation conflictuelle avec l’école. C’est ici qu’il avait fait le plus de crise de panique. Il n’en faisait que si peu, chez lui… il n’avait eu qu’une seule vision de tout l’été.. et il n’avait rien compris. Un mois à peine qu’il était ici et il s’était déjà isolé une dizaine de fois… et il n’avait rien compris.
- La matière n’a rien à voir, tranche-t-il, sec.
Nigel n’était pas un garçon très détendu, Ilia avait pu le remarquer durant l’été. Sérieux, stricte, il avait tout de même sourit à quelques reprises. Là, c’était un tout autre niveau. Le Nigel de Poudlard est froid et distant, il ne semble pas avoir envie de bavarder, mais en fait, il n’a surtout pas envie d’être là.
Elle tique lorsque lui dit être navré pour la quarantaine. Il n’est pas certain de sa signification, mais elle le remercie. Il a un léger hochement de tête. Il n’insiste pas, parce qu’il se dit que s’il insiste, elle finira par insister aussi… et il n’en a pas très envie. Il aurait préféré que tout reste comme cet été. Juste leurs intérêts commun et faire abstraction du reste. Mais, non. Ce n’est pas ce qui se passe. Pas du tout. Et ça l’agace.
Elle semble être contente lorsqu’il indique que Hattie est à Poufsouffle. Sa meilleure amie ? Oh oui, en général, les gens ont des amis, voir des meilleurs amis. Lui, il n’en a pas. Mais oui, Poufsouffle est une excellente maison… pour Hattie. Il y avait Roxanne, aussi. Et Keir… qui est en quarantaine. Il semble réfléchir un instant, mais la réponse n’a rien à voir avec ses réflexions.
- Hattie se plaira, chez les Poufsouffle, commente-t-il, comme si c’était une évidence.
Il le savait, parce que Hattie se serait plut n’importe où, mais son caractère faisait d’elle une Poufsouffle toute désignée. C’était presque un fait établit avant même qu’elle coiffe le Choixpeau. Hattie savait se débrouiller. Elle n’était jamais seule. Elle se faisait des ais en claquant des doigts et elle en prenait soin. Généralement, ils le lui rendaient bien. Nigel ne s’inquiétait pas pour sa petite soeur. Pas trop, du moins. Elle allait bien. Elle venait le voir tous les jours, juste après le dîner, quand beaucoup étaient parti. Une routine bien établie.
La question sur son cursus le fait grimacer. Pas parce qu’il n’aimait pas, mais parce qu’il était obligé de le suivre. Et il croyait qu’il n’aurait pas dû être obligé de le suivre, parce qu’il savait qu’il était tout aussi doué que tous les aurors présent à Poudlard et peut-être même davantage. Il aurait dû être avec eux, pas à étudier le cursus… ou mieux, il aurait dû suivre son père… mais son père avait refusé.
- Sécurité magique, dit-il, à voix si basse que ça ressemble presque à un marmonnement.
Ça va de soi. Mais il n’en avait pas besoin. Il n’avait besoin que de prendre de l’expérience, en situation réelle, ce que son père refusait, de toute évidence. Nigel savait pourquoi, mais il trouvait cela d’une perfide injustice. Il lui restait trois ans de calvaire à Poudlard. Il savait que ça se terminerait mal.
Improvisation 102 : what a surpriseNigel n'est pas très loquace, moins que dans ses lettres, ce qui intrigue son amie. Il est même presque froid avec elle lorsqu'il lui dit que ce n'est pas la matière qu'il étudie qui lui pose un souci. « Oh. ok. » se contente de dire la jeune femme sans broncher. Ilia avait toujours aimé l'école, elle avait passé de très belles années à Durmstrang et apprit tellement de choses qu'elle aurait pu devenir enseignante. Ça lui aurait plu, si sa soif de justice n’était pas aussi forte et ce encore plus depuis Noël dernier.
La discussion aurait pu s'arrêter là si le brun n'avait pas parlé de la quarantaine, un sujet contrariant pour la sorcière qui ne savait pas sur quel pied danser avec ça. Elle se sentait tirailler par les deux camps, entre son travail et sa famille et pour la première fois elle se demandait ce qui était le plus important, elle qui n'avait pourtant jamais semblait s'inquiéter des jumeaux. Une épreuve qui pouvait les rapprocher comme les éloigner pour de bon... Un lourd tribur à porter pour la nouvelle auror qui n'aurait pas pensé être affecté à une telle mission pour ses débuts. Elle était ravie de pouvoir aider et faire en sorte que tout reste sous contrôle, mais les insultes et les regards sombre de ses frères, en particulier Yassen, la font souffrir. Heureusement que certains infectés sont plus enclins au traitement et à respecter les règles. Ceux qui respectent aussi les règles, ce sont bien les Pouffsouffle, comme la petite sœur de Nigel. La brunette adorerait la rencontrer, elle semble adorable quand Nigel en parle. Il n'en parle pas beaucoup, mais on sent dans sa voix un changement, une fierté ? Elle sera bien entourée et si elle souhaite trouver refuge auprès d'une plus âgée, elle pourra compter sur Nastia pour être présente, elle est tellement douce avec les autres.
S'intéressant de nouveau aux études de son amie, Ilia lui demande son cursus et son visage s'illumine lorsqu'elle entend parler de sécurité magique. Un sujet passionnant, qui pouvait permettre de mettre les pieds dans le métier d'auror avec des bases plutôt solides. Un sourire se dessine sur son visage. « C'est super ! Je trouve ça fascinant. Ce diplôme peut t'emmener au ministère. Tu voudrais devenir auror ? » demande la jeune femme sans se douter de tout ce qui se trame dans la tête de son ami, de ses attentes et déceptions quant à ce métier qu'il ne peut exercer en étant coincé à Poudlard. Elle ne sait pas non plus qui est le père de Nigel, pourtant elle l'a déjà croisé brièvement en étant avec Ismaël, mais n'a pas eu le temps de faire sa connaissance. Ilia connaît également d'autres proches de Nigel sans le savoir, c'est assez amusant quand on y pense.
Nigel sait comment couper court à un sujet de conversation. En plus, il est hyper doué. Mais c'est simple, il suffit de répondre sèchement et d'avoir l'air contrarié. Généralement, les gens n’insistent pas. Ilia ne fait pas exception. Bien, très bien, ça l'aurait contrarié encore plus. Et qu'est ce qui le contrarie ? Tout. Mais pas Ilia. Ce n'est pas Ilia, ni même les question personnelles qu'elle pose sans arrêt (il exagère) mais plutôt la possibilité que tôt ou tard, il devra lui mentir. Si tout pouvait rester comme cet été… mais non, ils sont à Poudlard. Tous les deux. Elle est Auror, il est élève. Fait chier quand même. Est-ce qu'elle est plus âgée que lui d'ailleurs ? Il n'en sait rien. Ça n'a jamais fait parti des réponses qu'il avait envie de connaître. Jusqu'à maintenant. A ce moment précis, il a envie de savoir, mais il se tait. Merde.
Oui, bon, elle semble ravie qu’il soit en GISIS Sécurité Magique. Il aurait presque sourit lui aussi, par contagion, si naturellement son visage était apte au sourire spontané. Mais ce n’est pas le cas. Il n’est pas toujours furieux, pas plus que toujours contrarié, mais c’était un air dont il s’était imprégné jusqu’à la moelle. Même de très bonne humeur, il n’en avait pas l’air. Sérieux, très sérieux. Ilia avait eu la… chance ? de voir Nigel sous un jour moins… orageux. Évidemment, il créait ses propres orages, ça facilitait les choses. Pour lui du moins. S’il voudrait devenir auror ? Elle lui aurait collé son poing sur la gueule, et il n’aurait pas eu l’air moins furieux. Il eut un subtile frémissement de colère, mais Nigel est un modèle de contrôle.
- Je devrais déjà l’être, dit-il. Nous échangeons nos places si tu veux, ajoute-t-il, sec, encore, mais au moins il a répondu.
Il avait dit qu’il ne pensait pas se retrouver ici. C’est vrai. Ça l’avait surpris. Il avait été furieux contre son père. Il l’est toujours à vrai dire. Il ne peut quand même pas ne répondre que ça ? Si ? Non. Elle ne mérite quand même pas sa contrariété. Ce n’est pas sa faute à elle si le grand Ernst Shaw est… peu importe.
- Disons que mon formateur et moi, nous ne nous entendons pas sur certains points cruciaux, ajoute-t-il, plus doucement, l’effort visible d’atténuer l’impact de ses mots et son ton. Et de toute évidence, il a le dessus, puisque je suis ici.
Et ça ne lui plait pas. Enfin, ça lui plait peut-être un peu plus… ou peut-être que la présence lui fait détester cet endroit un peu moins. Peut-être… il n’en est pas certain… il doit y réfléchir.
Improvisation 102 : what a surpriseLa situation est plutôt amusante. Deux jeunes inconnus rencontrés un été, par le plus grand des hasards et qui se retrouvent dans cette école alors que rien ne les destinait à se revoir ainsi. Ilia pensait vraiment que son ami était quelque part plus ou moins loin de Poudlard, travaillant dans les livres ou quelque chose du genre tant il était cultivé. Mais pas être un élève en GISIS. Bien entendu, elle n'avait rien contre cette voie. Elle-même aurait apprécié le fait de reprendre ses études si son année en tant que stagiaire n'avait pas été si mouvementée. Arpenter les couloirs de l'école, s'asseoir sur ces bancs où son défunt frère avait été lui aurait fait plus de mal que de bien. Au moins, à ce poste qu'elle occupait depuis la fin de l'été, la jeune femme pouvait se rendre utile.
Elle était ravie mais Nigel semblait plus renfermé, différent de cet été. Si elle savait seulement que c'était alors son attitude normale en société, elle aurait réfléchi à deux fois avant de lui poser certaines questions. Mais elle était curieuse de nature et avait à cœur de comprendre son parcours. L'homme avait presque réussi à la faire fuir lorsqu'il lui suggéra d'échanger sa place avec lui. Le ton de sa voix était si dur que la demoiselle se demandait à qui elle était en train de parler. Certes, les deux ne s'étaient pas vraiment confiés sur leurs passés ou leurs envies futures mais se voir rembarrer aussi sèchement lui donnait l'impression que Nigel était quelqu'un d'autre que ce garçon intelligent et drôle malgré lui qu'elle avait rencontré au pub et à qui elle avait joué des tours pour tester son opinion sur des sujets magiques.
Mais fort heureusement, il sembla se rendre compte du poids de ses paroles et alors qu'Ilia avait les lèvres pincées, son camarade repris en lui offrant une explication. Un formateur compliqué. Il est vrai que l'on ne pouvait pas tous avoir l'occasion de démontrer ses talents et de suivre une formation sur le terrain. Les excellentes notes de la Bulgare et les lettres de recommandation qu'elle avait su glaner çà et là l'avaient aidé à trouver sa place parmi les aurors, un poste qu'elle convoitait particulièrement. C'était un statut reconnu dans le monde entier et bien qu'elle se doutait que son père était en train de se vanter auprès de ses relations sur sa fierté feinte, elle s'en fichait. Parce qu'elle avait un peu plus de pouvoir maintenant et qu'avec le temps, elle en aurait plus et parviendrait à obtenir sa vengeance.
Elle aurait le dessus sur lui. Nigel n’avait pas su convaincre son formateur, lui, et se retrouver dans le rôle de l'élève alors qu'il aurait pu être son collègue. « Oh... Je suis navrée pour toi... Si je n'avais pas eu l'opportunité et le soutien que j'ai eu en postulant, je serais avec toi. Sois patient. Il m'a fallu un moment avant d'arriver à ce que je voulais, je comprends ta frustration. Je suis certaine que tu parviendras à lui prouver qu'il a eut tort de ne pas te faire confiance. » le rassura la jeune femme, croyant en ses capacités sans même l'avoir vu en action en terme de magie. Mais il était intelligent, il avait de la ressource et c'était important dans ce domaine. « Si je peux faire quelque chose pour toi, n'hésite pas. Je connais peut-être ton instructeur. » dit la brunette en posant délicatement sa main sur le bras de son ami, se voulant réconfortante. Nigel n'était certes pas un homme friand de contact physique mais elle, elle ne pouvait pas s'en empêcher, elle transmettait ses émotions par ce biais, plus tactile que lui.
Cette école, c’est un peu comme le pire endroit au monde pour Nigel. Il n’a de bon souvenirs que de sa première année. Sans doute parce que c’était tout nouveau et que les visions, bien qu’ayant déjà entaché sa réputation, n’avaient pas encore tout à fait prit le dessus sur son optimisme. L’année suivante, tout avait basculé. Sa mère avait été internée à Ste-Mangouste, ça s’était su et comme elle avait la réputation de faire elle aussi des « crises de panique » Nigel avait été destiné, par certains, à finir lui aussi ses jours à Ste-Mangouste, aussi timbré que sa folle de mère. Le hic c’était que ça n’avait pas duré, le séjour de sa mère à Ste-Mangouste. Mais Nigel, lui, s’était fermé comme une cellule d’Azkaban.
Elle comprend rien. Mais rien du tout. Il se demande si ça lui ferait du bien de l’insulter et d’être aussi désagréable qu’avec tout le reste. Mais comment pourrait-elle savoir ? Non, elle ne peut pas savoir. À moins qu’elle sache... mais… elle ne sait pas. Impossible qu’elle le sache. Elle ne sait pas des tas de choses à son sujet. Elle ne sait pas que de se retrouver à Poudlard est une véritable torture pour Nigel. Elle ne sait pas que son instructeur est son père. Et elle ne connaît pas les raisons d’Ernst Shaw pour retarder l’intégration officielle de Nigel parmi les aurors. Elle ne sait pas non plus qu’il se fait violence pour ne pas juste l’envoyer balader, elle et ses questions. Cette seule pensée lui donne la nausée. Il vient vient tout de même pour répliquer quelque chose et à son air, ça n’annonce rien de gentil, mais il se retient, ferme la bouche et soupire. De toute évidence, quelque chose le tracasse et il fait de gros efforts pour que la jeune auror ne subisse pas sa haine envers le monde entier.
- C’est bien gentil, mais tu n’y peux rien, finit-il par répondre, avec peut-être un peu moins de violence qu’annoncée, mais ça n’a rien de gentil.
Et il s’en rend compte. Généralement, il s’en fiche. Quelques exceptions lui font toutefois regretter ses paroles. Enfin, elle est la seule exception, outre sa petite soeur. Sa mère pourrait en être une, mais elle ne le confronte jamais. Maud Shaw sait.
- Ne t’en mêle pas, commence-t-il avant de se rendre compte que c’est raté pour être un minimum gentil.
Il cherche ses mots, et soupire. Il semble vouloir ajouter quelque chose, mais il s’arrête et semble vouloir chercher à se reprendre, mais sans y parvenir. Il semble aussi furieux que cette première fois ou elle lui a fait croire n’importe quoi, mais cette fois, tout semble l’affecter bien plus profondément. Elle n’a pas le temps de profiter de son contact bien longtemps, il se tord légèrement, mais visiblement, pour échapper à son touché. Il pourrait la contaminer ? Non, pas l’épidémie, mais son mal être général. Il fait un lent pas de côté et croise les bras sur ses bouquins. La conversation semble presque terminée, il semble bouder, presque, mais soudainement, il parle.
- Je ne suis pas frustré, commence-t-il avec une douceur surprenante après le tranchant des dernières minutes, je suis furieux. Il ne la regarde pas, il évite même son regard. Je… tu ne pourras rien faire pour moi pour faire entendre raison à mon instructeur. L’Auror Ernst Shaw, dit-il sur un ton à la fois respectueux, mais avec une pointe de rancoeur tenace. C’est mon père, dit-il avec cette fois quelque chose de dur dans la voix.
Il se fait violence pour rester calme, même s’il semble sur le point d’exploser de rage. Une sorte de bouillonnement de violence contenu qui ne se voit que par un tressaillement compulsif. Nigel luttait contre sa fureur comme contre les visions. Il se concentrait à ne surtout rien laisser transparaître. C’était plus facile de cacher sa colère que les visions, par contre.
Improvisation 102 : what a surpriseIlia tente de se montrer compréhensive avec son ami, elle comprend qu'être encore à l'école quand on a des ambitions, des envies, ce n'est pas évident. Elle-même avait eu plus que hâte de sortir de Durmstrang. Non pas qu'elle ne s'y plaise pas, au contraire, mais ses envies d'atteindre le ministère étaient trop fortes. Le ministère de la magie de Bulgarie lui a trouvé une place et avec la Grande guerre il a détaché beaucoup d'agents en Angleterre. Une chance pour elle qu'elle a su saisir. Alors si elle pouvait venir en aide à Nigel et l'aider à trouver un moyen de vivre ses rêves, elle était prête à agir. Mais le jeune homme ne l'entendait pas de cette oreille et lui fit savoir qu'il ne voulait pas de son aide. Un poil piqué dans son orgueil à l'entendre dire « ne t'en mêle pas » Ilia se sentit perdre son sourire. Ce n'est pas une façon décente de refuser l'aide de quelqu'un selon elle. Ou alors elle ne saisit pas la subtilité sous l'accent Britannique du brun. Elle se vexerait presque, mais prend sur elle pour lui répondre d'une voix douce : « D'accord. »
Cela l'empêche d'ouvrir à nouveau la bouche, lui qui semble chercher quelque chose d'autre à dire. Mais la brunette n'est pas stupide, elle sait quand il faut s'arrêter et lui donne l'occasion de passer à autre chose. Nigel se dégage bien trop brusquement de sa main, indiquant qu'il ne s'agit pas de frustration mais bien de colère qu'il éprouve. Cela ne réjouit pas l'auror. Bien qu'elle ne connaisse pas Nigel depuis longtemps et qu'elle ne connaisse que de lui que ses goûts en matière de théories magiques, elle pensait avoir une connexion quelque part là-dedans. Le Nigel de cet été était plus détendu, plus abordable et on pouvait presque plaisanter avec lui – presque ! Cet homme face à elle empli de colère et dont les yeux reflètent la solitude d'une manière plus douloureuse qu'attendrissante pourrait faire reculer n'importe qui. Mais pas elle. Elle, c'est une battante, une femme qui ne lâche rien. La preuve en est avec ses frères qui l'insulte à tout va mais elle continue d'aller les voir et de trouver une solution.
Et puis le Serpentard se fait plus loquace sur cette fureur qui l'habite, crachant que l'on ne peut pas faire entendre raison à son instructeur. « C'est mon père. » Cela sonne comme le couperet tombé sur la tête de la Yordanova. Ses yeux s'écarquillent alors en comprenant la situation. Son père était un auror réputé dans le domaine, craint et respecté. Ilia avait entendu parler de lui, avait même pu le croiser une fois, de loin. « Je vois... En effet, il n'a pas l'air d'être un homme facile. » répondit la jeune femme une fois le choc de la surprise passé. Et puis, à ce moment-là, elle n'en veut plus à Nigel d'avoir été rude avec elle quelques minutes plus tôt. Essayer de raisonner Ernst Shaw était comme affronter un dragon avec une cuillère en bois, rien de bon ne pouvait en ressortir ! Le visage de la sorcière se radoucit un peu, semblant compatir. « Je n'avais pas idée. Désolée. Je comprends ce que c'est d'avoir un père exigeant. Quand il a une idée en tête, il est difficile de lui ôter. Mon père est comme ça aussi.. » Mais elle ne pensait pas à la même chose que Nigel. Son père le mettait à l'école pour retarder le moment fatidique. Andrei Yordanov, lui, avait torturé et violenté sa famille pour obtenir ce qu'il voulait. Éliminer la concurrence et fait taire toute l'affaire. En y songeant, le souvenir douloureux du corps sans vie de son frère lui revenait en mémoire et malgré elle, une ombre passa sur son visage.
« Oh ! Je... Je réalise que tu allais certainement en cours. Je ne veux pas te mettre en retard ! » lança-t-elle sans transition aucune. Peut-être un moyen de détourner son attention en espérant qu'il n'avait pas vu son corps réagir à la tristesse de la perte de Zahari dont l'anniversaire de sa mort approchait à grand pas. Nigel n'avait pas besoin de savoir ça. S'il n'était pas à Poudlard l'an dernier, il n'a pas pu connaître Zahari et l'histoire qui entoure sa mort étrange, cet « accident » comme le disent ceux qui ne sont pas des Yordanov.
C’était facile pourtant. Il n’avait qu’à être désagréable et à l’ignorer. Il n’avait pas à lui raconter tout ça. À quoi il joue bon sang ? Il ne le sait même pas lui-même. Pourquoi ne peut-il pas se contenter de la virer, comme les autres. En fait, c’est ce qu’il a fait, à deux reprises… mais il finit toujours par ajouter quelque chose qui atténue ses propos… mais pourquoi fait-il ça ? Et c’est quoi son problème, à elle, d’être si gentille ! Non, elle devrait l’envoyer balader, dès les premiers mots, elle aurait dû le repousser, comme tout le monde, ou presque. Lorsqu’ils résiste, il réfléchit et quand il réfléchit, il y a le doute… non, il ne doit pas douter. Sinon tout est à recommencer chaque fois et il lui semble que ‘est plus difficile. Comme avec Keir. Ou peut-être est-ce que parce que c’est Keir.
Il n’aurait pas dû parler de son père. Pourquoi est-ce qu’il lui a dit ça ? Parce qu’il devait justifier sa présence ici ? Ou plutôt justifier pourquoi il est furieux d’être ici ? Mais ce n’était pas nécessaire s’il voulait faire le vide autour de lui. Parce que bon, non seulement elle sait qui il est, mais elle compatit. Mais non ! Ne fais pas ça, Ilia, ce n’est pas le plan ! Ernst Shaw un homme qui n’a pas l’air facile ? Oh, si, il est facile. On suit les règles, on obéit aux ordres. Très facile. Généralement, ce n’est pas lui qui les impose, mais il les fait appliquer. Et il est vachement doué. Son père est comme ça aussi ? Il hoche la tête. Il se doute que ce n’est pas exactement sa situation, mais bon, il essaie d’imaginer ce qu’un autre père exigeant peut être. Ernst Shaw n’apprécie pas la médiocrité. S’il voit un potentiel, il le pousse à bout. Ce qui ne plaît pas à certain de ceux qui se font pousser à bout. Dans le cas de son propre fils, ça pouvait sembler du même style, mais ça n’a rien à voir. Ce n’est pas la même situation. Il ne dit rien, il se contente d’hocher la tête et de garder les yeux sur ses pieds. Chaque fois qu’il dit quelque chose, c’est pire.
- Je ne serai pas en retard. J’allais en cours, mais j’y vais toujours très tôt… quand il commence à y avoir trop d’élèves dans la grande salle. Il évite presque tout le monde, c’est évident qu’il ne se plait pas dans la foule. Et il évite son regard à elle. Je… j’allais répondre à ta lettre pour étayer la théorie… et...
Des élèves poussent la porte de la grande salle et s’engouffrent bruyamment dans le couloir. Si c’est possible, Nigel se chiffonne sur lui-même, comme s’il ne voulait surtout pas se faire voir. Il ne semble pas apprécier la compagnie des gens, en général. Alors il les évite. Pourtant, il n’est pas timide. Il n’a rien d’un timide. Il suit les élèves d’un air mauvais, jusqu’à ce qu’ils disparaissent.
- Et inventer une raison pour décliner l’invitation à Pré-au-Lard, dit-il comme si l’invitation ne venait pas d’elle et qu’il ne venait pas d’avouer qu’il allait lui mentir. En même temps, qu’est-ce qu’il aurait pu faire d’autre ? Nous devons être accompagné par un professeur ou un auror si nous y allons, dit-il, contrarié, toujours sans la regarder, et… oui, exactement. Il lève les yeux sur elle, brièvement. Oui, Nigel, elle est bien un auror. Oh…
C’était plaisant, cet été… toutes ces conversations… la compagnie d’Ilia avait été plaisante, tout l’été. Ensuite, ses lettres, il les avait attendu avec presque de l’impatience. Et elle était ici tout ce temps. Et lui aussi, ce qui le contrarie, mais… pourquoi ne l’a-t-il pas remarqué avant ? Parce qu’il la croyait loin, il ne sait où exactement, mais loin. Alors il ne l’a pas cherché. Mais maintenant qu’il sait qu’elle est là, faire semblant que non… ce sera difficile. Impossible ?
- Dans ce cas je vais peut-être changer ma réponse… et peut-être ne pas répondre à la lettre… au final…
Pourquoi y répondrait-il ? Elle est là. Juste devant lui.
Improvisation 102 : what a surpriseL'école de magie est un lieu qui ne plaît pas à Nigel, ça se voit et ça se ressent et lorsqu'il exprime son mécontentement, son amie ne peut que comprendre sa position. Lui rêvait d'autre chose, de travailler en tant qu'auror et Ilia se sentirait presque coupable de lui agiter sous le nez son uniforme alors qu'il porte les couleurs de Serpentard. D'ailleurs, si elle ne connaissait pas un minimum Nigel, elle aurait pu s'inquiéter de le voir aux mains des jumeaux, à se faire manipuler pour détester ce qu'elle est, ce que les garçons désapprouvent chez leur sœur. Mais le jeune homme n'est pas influençable, il a ses propres avis et n'écoute pas les gens. C'est un point positif et la Bulgare se rassure de le savoir neutre. Mais il ne se plaît pas ici, alors il faut le distraire.
Comme la lettre qu'Ilia à écrite et qui propose une distraction ! La belle voulait lui donner rendez-vous à Pré-au-Lard et ainsi retrouver un peu de la complicité qu'ils avaient eu cet été, loin du travail et des nuisibles. Mais avec le froid jeté en parlant de son père, la belle ignorait si elle devait le laisser. Par chance, le brun ne la congédia pas pour aller en cours. Nigel prenait toujours de l'avance et cette ponctualité pour éviter la cohue faisait de nouveau sourire la sorcière qui imaginait très bien son ami capable de ça. Elle-même avait horreur de voir la salle du déjeuner bondée lorsqu'elle était à Durmstrang. Trop de monde et trop de bruit pour pouvoir réfléchir. Alors elle hochait la tête en signe d'approbation et suivit le regard de Nigel sur les élèves qui venaient d'entrée en trombe dans la grande salle, ne portant pas le même regard noir que lui cependant. Il n'appréciait pas les autres. Heureusement qu'Ilia faisait exception. Ça lui plaisait beaucoup d'ailleurs.
Une interrogation se posa alors que l'Anglais avouait vouloir décliner son invitation et la belle fronça les sourcils sans comprendre ses motivations. Un simple « Oh... » murmuré sortit de sa bouche. Elle allait répliquer quelque chose mais Nigel sembla vouloir lui donner une explication, comme pour s'excuser. En effet, le fait d'être élève changeait la donne puisqu'il était au château et ne pouvait en sortir qu'accompagné afin d'éviter les débordements. Avec cette épidémie et les disparitions au village, les adultes étaient sur le qui-vive et prendre soin des élèves était une priorité. Quand Ilia entendit son discours désolé, elle ne put qu'avoir un sourire en coin. Lui ne semblait pas capter la situation. Le regard de l'auror se fit plus insistant jusqu'à ce que, enfin, il réalise ! Et quand il l'eut fait, la jeune femme se mit à rire comme la fois où elle l'avait fait marcher avec sa théorie fumeuse. Décidément, elle adorait passer du temps avec lui ! « Oui, je pense que tu peux te passer de répondre. Du coup, il faudra juste partir avec les autres et ensuite nous pourrons aller de notre côté. » dit-elle pour conclure.
Le fait que Nigel soit élève compliquait peut-être un peu les choses, parce qu'il ne pouvait pas sortir quand bon lui semblait et encore moins facilement qu'avant toute cette histoire d'épidémie. Mais le savoir à Poudlard, tout près, la rendait heureuse. Sur leurs heures de pause, les deux pourraient se retrouve à la bibliothèque et échanger. L’intellect du Shaw la fascinait, tellement rare chez quelqu'un de leur âge. L'idée de le retrouver au village la rendait joyeuse pour affronter une journée qui serait difficile puisqu'elle travaillait une fois de plus dans les cachots, avec les infectés... « Ilia ! » Tiens ! Quand on parle du travail, le voilà qui se rappelle à vous. La Yordanova savait que cette voix d'homme dans son dos n'appartenait pas à quelqu'un de mauvais. Dans cette école, elle avait plus l'habitude de se faire traiter de traîtresse par ses frères que de se faire appeler par son prénom. Ça aurait pu être Dimka mais elle savait que non, sa voix était plus douce que celle de son collègue auror. La miss tourna la tête et fit un signe à l'autre pour lui dire qu'elle arrivait, avant de reporter son attention sur Nigel. « Bon, bah... le devoir m'appelle ! » lança-t-elle sans avoir envie de clôturer cette conversation. « On se voit ce weekend alors ! On se croisera plus souvent maintenant qu'on sait où se trouver. » dit-elle en lâchant un petit rire cristallin, réalisant que les deux n'avaient jamais parlé de leur localisation dans leurs lettres et que chacun devait penser l'autre loin. Pas besoin d'adresse pour trouver un sorcier, les chouettes savaient où elles allaient. « Je suis contente que tu sois là. » ajouta-t-elle en souriant tendrement à son amie, beaucoup trop en fait... Elle tourna les talons avant que ses joues ne se mettent à rosir complètement d'avoir dit une telle chose.
Entendre Ilia rire, même si c’est de lui, lui donne une impression de victoire. Il n’y a pourtant rien à gagner, mais c’est l’impression que ça lui donnait. Mais comme dans toutes choses, Nigel possédait un flegme de marbre. Peu de réaction, excepté une contrariété exacerbé. Ça, il l’affichait constamment. Alors sa victoire, il se la garde pour lui. Ça ne concernait que lui de toute manière. Beaucoup de choses ne concernaient que lui. Mais quand même, il semble se détendre juste un peu, question de ne pas la froisser parce qu’elle a rit. Ce serait quand même détestable de lui faire croire qu’il n’aime pas l’entendre rire. Mais bon, il ne le lui dira pas non plus. Faut pas charrier…
Oui, il peut se passer de répondre, elle est d’accord, mais… elle semble prendre pour acquis qu’il ira. Ah bon ? Il n’a pas non plus dit ça… il… il a laissé entendre qu'il voulait y aller ? Il vient pour émettre une faible protestation, juste pour rétablir ce qu’il a dit versus ce qu’elle a cru comprendre… ou peut-être juste pour qu’elle insiste un peu, mais il est brièvement atteint d’un instant de panique. De leur côté ? De quels côtés parle-t-elle ? Il aurait peut-être posé la question, mais une voix masculine interpelle Ilia et aussitôt, Nigel se referme et jette un regard noir en direction de la voix. Mais il n’y peut pas grand chose… il y a des règles à suivre, elle ne peut pas juste ignorer qu’on l’appelle. Il aurait voulu, pourtant, lui, il aurait ignorer le début des cours…
- On dirait, dit-il sans vraiment s’en rendre compte, fixant d’un air mauvais celui qui vient le priver d’Ilia. Mais il est déconcentré par l’affirmation de celle-ci qui dit qu’il se verront ce week-end. Ah oui ? C’est CE week-end ? Oh… euh… oui… oui, bien sûr…
Oh, bon sang, qu’est-ce qu’il avait prévu de faire ce week-end qu’il aurait pu brandir soudainement pour échapper à cette sortie, mais son esprit s’embrouille, alors il ne proteste pas. Pas qu’il n’a pas terriblement envie de sortir quelque heures de cette fichue école, et surtout, surtout, de passer tout ce temps avec Ilia, mais il a du mal à concevoir que non seulement il balaie toute ses habitudes et règles personnelles pour elle, mais en plus, qu’elle ait envie de le voir. Ils vont se croiser plus souvent ? Oh bon sang. Ils savent maintenant où se trouver… oh bordel… ils seront si près, presque tout le temps… oh bordel de merde… il se contente d’émettre un grognement indéfinis et, étonnamment, essayer de ne pas avoir l’air trop contrarié. Mais c’est difficile quand la contrariété est un état permanent. Heureusement, elle rit, et ça lui plait. Ça lui plaît vraiment. Sa contrariété se fendille et il sourit presque. Peut-être même un plis au coin des yeux.
- Heum… oui...
Et elle lui donne le coup de grâce du jour, en lui disant qu’elle est contente qu’il soit là. S’il n’avait pas eu le souffle coupé, il se serait probablement étouffé, ce qui aurait été nettement plus gênant. Elle est contente qu’il soit là ? Personne n’est jamais content quand il est là. Au contraire. Qu’est-ce qu’il a bien pu faire pour qu’elle soit contente qu’il soit là ? Et en plus elle veut le voir… hors de Poudlard ? Elle est probablement cinglée… ou peut-être que c’est lui, parce qu’il ne refuse pas… c’est forcément elle…
Et elle se détourne, comme ça et elle s’en va, anéantissant cette esquisse de joie sur son visage. Est-ce que c’est un rencard ? Oh merde… il reste quelques longues secondes, immobile, à fixer bêtement le couloir ou elle a disparu. Non, t’es bête, elle ne va pas revenir. Il hoche la tête, pour se secouer, autant physiquement que mentalement. Bon sang… les cours… c’est presque l’heure… il inspire, parce qu’il avait presque oublié de le faire et il se compose son attitude habituelle, avant de se mettre en marche.
Accueil
2981 12289 0
