family is what I care about. Family is what I protect. Family is what I think all the time.
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Un Shafiq. Ils n’avaient rien trouvé de mieux qu’un foutu Shafiq à mettre au bras de sa sœur. Cette famille était fourbe, vile, et Néréo n’avait pas vraiment pris la nouvelle avec un large sourire et le bonheur au coin du cœur. Si Lucrezia lui en avait voulu pour ses fiançailles avec Perséphone, Néréo comprenait désormais son point de vue. Il était dur de la voir promise à quelqu’un d’autre. Encore plus dur de la voir promise à un homme qu’il n’appréciait guère – en réalité il ne le connaissait que de rumeurs, et c’était déjà assez pour le mépriser – de la voir se lier à une famille dont il se méfiait comme la peste. Il avait déjà assez d’Alcyone Shafiq, cette jeune fille immature qui entraînait sa jumelle dans des histoires rocambolesques. A quoi son père avait-il pensé cette fois-ci ? A quoi rimait tout ceci ? Certes, Erebe était connu pour être mangemort, il savait qu’il venait tout juste de sortir d’Askaban, mais bien que sa propre mère fût elle même enfermée dans cette prison, il le voyait, lui, comme un dangereux criminel qui n’aurait aucune pitié et aucun scrupule envers sa douce sœur. Néréo y pensait depuis des jours, sans savoir réellement comment empêcher son père de rendre cette décision irrémédiable. Il devait bien y avoir un moyen de lui faire comprendre que cette union n’était pas le meilleur intérêt des deux partis. Sans compter que Néréo avait lui même quelques soucis d’ordre personnel à régler, ces derniers temps.
Néréo tentait de réfléchir tandis qu’il se confrontait à un adversaire d’échec de taille. Il était au bord de la défaite, avait déjà perdu sa reine. A ce moment, une jeune serdaigle s’approcha des deux joueurs. Apparemment, quelqu’un attendait Néréo devant la salle commune, un Zabini. Il ne lui fallut pas longtemps pour savoir de qui il s’agissait, Anton, forcément. Jamais Blaise ne serait monté jusqu’à sa salle commune pour lui tailler une bavette. Néréo présenta ses excuses, se leva. Une chance qu’il n’eût pas à finir cette partie, finalement. Il poussa le tableau qui cachait l’entrée. De là, pourtant, ce ne fut pas son frère qu’il découvrit, mais son cousin. Néréo ne put cacher sa surprise face au serpentard, il se demandait bien ce qu’il fichait là. Sûrement venu le taquiner, lui faire une mauvaise blague. Après tout, quoi d’autre aurait pu l’amener jusqu’ici ? « Un problème Blaise ? » Un instant, il s’imagina que l’absence de sourire en coin de la part du Zabini qui se trouvait en face de lui signifiait que le sujet qu’il souhaitait aborder était on ne peut plus sérieux. Dans ce cas, il commença à s’imaginer d’horribles scénarios. Un accident. Quelque chose qui serait arrivé à l’un de ses frangins. En fait, il n’arrivait pas à croire que Blaise fût venu ici avec la simple intention de discuter de quelque chose avec lui. Ca ne semblait pas possible. « Si t’es venu pour faire de sales réflexions, je te conseille de faire demi-tour. » Avec tout ce qu’il se passait autour de lui, il n’était pas vraiment d’humeur à recevoir la critique, là, tout de suite. N’empêche que petit à petit, tous ses problèmes lui sortaient de la tête pour ne réfléchir qu’aux raisons de la visite de Blaise. Il n'en trouvait aucune plausible et ça le taraudait. Il n’attendait plus qu’une chose : que son cousin parlât.
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Parler à Blaise ainsi, en tête à tête, était quelque chose d'extraordinaire. Si la tête de son cousin n'avait pas été aussi critique, il serait sans doute parti chercher un calendrier pour marquer ce jour dans les annales. A l'esprit, il ne commençait à avoir que des phrases ironiques, ça le faisait doucement rire de le voir là. Avait-il besoin de Néréo ? Là, on aurait réellement assisté à une première planétaire. Il garda pourtant son sarcasme pour plus tard, se disant que demander à Blaise de péter un bon coup n'aurait sans doute pas résolu le problème pour lequel il était venu. N'empêche qu'il avait l'air tendu. Et c'était plus pour se détendre et se rassurer que Néréo ne prenait pas sa venue au sérieux. En fait, il préférait en rire plutôt que de se dire qu'il se passait quelque chose de grave. « Tu penses vraiment que je me serais taper les mille trois cent quarante-cinq marches du château rien que pour venir te faire chier ? » Non, ce n'était pas grave, autrement, il ne passerait pas par quatre chemins et ne ferait pas languir Néréo ainsi. Il aurait balancé le morceau à peine Néréo eût-il été sorti. « T'as eu le temps de les compter ? Y en a vraiment qui n'ont rien à faire de leurs journées. » Promis, il allait écouter à partir de maintenant et le laisser parler. Pour une fois qu'il obtenait l'avantage de la conversation face à son cousin, il avait du mal à laisser passer ça. « Vain Dieu, Néréo… ça te semble si peu probable que je monte te voir pour une bonne raison ? » Accouche. Il se contenta d'hausser les sourcils. Oui, c'était plus qu'étonnant. Et s'il était venu uniquement pour lui faire perdre son temps et continuer à le faire tourner en bourrique, Néréo n'aurait aucun état d'âme à le renvoyer dans les cachots des serpentards. Malgré les mimiques décontractées du serdaigle, Blaise conservait son air si sérieux et pensif, ça devenait de plus en plus intrigant. Les couloirs étaient vides, il n'y avait qu'eux deux. Quelque part, le silence qui s'installa le temps que Blaise reprenne la parole eut quelque chose de solennel. Comme si Blaise avait besoin d'un temps de réflexion. Néréo hocha la tête. Il était prêt à se taire si c'était pour écouter quelque chose de censé, d'intéressant, et surtout d'important. Enfin, il n'eut plus à attendre, son cousin évoqua la raison de sa venue. Erebe. Le regard chocolat de l'aigle se planta alors dans ceux, vicieux, du serpent. Le vice pourtant ne s'y trouvait plus. Néréo voyait de la détermination et peut-être même, le plus apparent, de la répulsion. Comme lui, il portait en horreur cette annonce de fiançailles. Néréo n'aurait pas pu être plus heureux de cette nouvelle, enfin un terrain d'entente entre les deux branches Zabini. Il ne serait pas seul dans sa lutte contre cet engagement. Il savait que face à Lucrezia, seul, il n'aurait rien pu faire si elle avait accepté l'union, elle lui en voulait encore d'avoir accepté ceux avec Perséphone. En revanche, si Blaise s'y mettait aussi, alors elle n'avait plus d'appui, plus de pilier. Ça l'étonnait tout de même que Lucrezia soit si encline à obéir à Amadi. Sûrement Anton n'y était-il pas allé de main morte, sûrement lui avait-il fait comprendre qu'elle n'avait pas le choix. Ça passait toujours mieux, quand c'était Anton.
« Grotesque. T'as trouvé le bon mot oui. » Il ne savait pas quoi lui répondre d'autre. Il était partagé. Il était toujours partagé en ce moment. Entre ce qu'il pensait et ce que pensait son père. Il ne pouvait pas aller à l'encontre des décisions d'Amadi sans qu'il n'y ait des conséquences. Il avait tous les pouvoirs, il lui semblait intouchable. Mais comment ne pas avoir envie d'envoyer en l'air ces vulgaires promesses quand on lui annonçait que sa soeur allait finir ses jours avec un tortionnaire. Il était le premier à n'avoir aucune pitié contre les né-moldus, néanmoins, il n'était pas un extrémiste. Il ne pouvait pas laisser sa soeur au bras d'un mangemort aussi radical. Erebe était plus vieux, il avait plus d'expérience, il avait combattu lors de la guerre. Ces marques-là, ça reste, ça s'imprime. Il était probablement tourmenté, probablement déphasé. Le doute planerait alors continuellement sur le bonheur de Lucrezia, et surtout, sur sa sécurité. Dans sa tête, il la voyait déjà couverte d'ecchymoses. De tous les arrangements que son père avait pu trouver, pourquoi celui-ci ? Détestait-il Lucrezia à ce point ? Et lui qui lui assurait quelques mois auparavant qu'il faisait tout pour les protéger, parce qu'il les aimait. « On peut pas laisser passer ça, pas vrai ? Mais le seul qui peut avoir un impact assez fort, c'est Anton. Et Anton approuve. » Le décalage semblait plus visible que jamais entre les jumeaux et leur aîné. Il y avait des liens qu'il ne comprendrait jamais. Des liens qu'il ne pouvait même pas imaginer. Lucrezia et Néréo, ça dépassait la protection, ça dépassait l'affection. Ils étaient l'un, ils étaient l'autre. Protéger Lucrezia, c'était se protéger lui-même. « Mais je la laisserai pas partir avec un type pareil. Je sais que tu me vois comme un fils à papa qui dit amen à toutes les décisions patriarcales. Mais là, ça dépasse tout entendement. » Et ils étaient bloqués là, dans cette école, sans possibilité d'en discuter avec Amadi. Sans pouvoir rendre visite à Mona, l'avertir de tout ce cirque. La mère de famille n'approuverait sans doute pas, elle tenait trop à sa seule et unique fille. Une lettre ? Ça restait une solution, en attendant. Mais rien ne lui garantirait qu'elle arriverait à destination, qu'elle serait bien comprise, qu'il arriverait à bien exprimer les problèmes qui se posaient dans ces fiançailles. Néréo était bien meilleur narrateur qu'orateur, mais ce conflit nécessitait plus que des mots, il fallait un ton, des airs. Il fallait être à plusieurs. « Parmi le nombre de familles de sang pur, pourquoi a-t-il fallu que ce soit un Shafiq ? Je hais les Shafiq. » Il ignorait quelle était la position de Blaise face à Alcyone. Mais même la jeune femme, Néréo avait du mal à la supporter, elle entraînait toujours Lucrezia dans des tribulations infernales.
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Il avait l'impression de ne gérer que des crises familiales. Oui, cette année ressemblait à un grand bouleversement Zabini, comme si Amadi avait soudain pris conscience de leur âge qui devenait avancé, comme s'il s'était soudain réveillé d'une longue torpeur de réflexion. Les décisions fusaient de toutes parts, n'attendant plus qu'un nouveau matin pour balancer sa nouvelle prise de conscience. Néréo avait beau suivre à la lettre les recommandations de papa, il n'avait pourtant aucun poids, il pouvait bien faire entendre son opinion, ça ne garantissait en aucun cas qu'il serait écouté, pire encore, il savait qu'il aurait tout autant pu être muet que ses dires auraient eu le même impact. Il voulait bien laisser Anton de côté - leur aîné n'aurait de toute façon pas eu le moindre geste de compassion pour la cause que menaient désormais les deux cousins - mais il leur fallait alors trouver un moyen détourné pour parvenir à leurs fins. Néréo, pour l'instant, n'en voyait aucun, et il se demandait bien si son cousin, lui, avait plus d'idées qui lui traversaient la tête. La seule chose qu'il voyait, là tout de suite, c'était de pouvoir renvoyer Erebe à Azkaban. L'homme venait tout juste de sortir de prison et jouissait alors de ses premiers mois à l'air libre, il se doutait donc que la vengeance de ce dernier serait des plus terribles le jour où il sortirait de sa deuxième condamnation, et il n'était pas sûr d'avoir vraiment envie de faire face à une telle furie. Mais quel autre chose leur restait-il ? Il leur fallait - par quelque moyen qu'il fût - balayer Erebe de leur paysage, et ce, pendant tout le temps qui serait nécessaire pour qu'Amadi juge qu'un Shafiq n'était pas digne de sa fille. Car Néréo restait sur sa position, Alcyone avait beau être appréciée de beaucoup, lui ne pouvait supporter la frivolité qui se dégageait de sa personne, et il était presque persuadé que c'était le cas de toute sa petite famille. La prison n'était pas envisageable non, et puis le tuer était sans doute la pire idée qu'on eût pu avoir pour aboutir à leurs fins. Beaucoup trop radical, beaucoup trop dangereux pour eux. Non, il suffisait seulement que le père de famille se rendît compte de l'absurdité de tout ça, et de l'incapacité d'Erebe à faire remonter la famille Zabini dans l'estime des autres importantes familles sorcières. Néréo en était persuadé, si Amadi avait choisi de la marier à un Goyle, un Crabbe ou même un Yaxley, tout du moins de ces familles qui se revendiquaient haut et fort de Voldemort, il aurait fait alors bien meilleure affaire que celle-ci.
Néréo se torturait l'esprit. Dans cet espace sombre qu'étaient les grands couloirs à cette heure tardive, il se permit de s'appuyer contre le mur, croisant ses bras de cette allure sévère et sérieuse. Les mots de son cousin le flattaient au plus haut point, et il n'aurait jamais deviné que cette soirée eût été si étrange, de par l'existence de cette conversation et de par la tournure qu'elle prenait. Mais c'était sur lui que Blaise reposait ses espoirs de pouvoir éviter à tout prix les fiançailles. Néréo restait d'ailleurs sceptique, il savait son cousin extrêmement proche de sa soeur, mais au point d'être si inquiet pour elle, voire même peut-être plus concerné que lui-même, son frère jumeau, le serdaigle en était tout étonné. Il aurait bien voulu un jour comprendre quel était ce lien si fort qui avait lié les deux Zabini. « Dans ce cas... Dans ce cas il n'y a qu'une chose à faire, pourrir sa réputation. » Il avait fini par apprendre comment tout fonctionnait dans ce monde élitiste. Faites de bonnes actions et vous serez récompensés ; trahissez les autres et regardez-vous plonger en chute libre dans une déferlante d'injures et de calomnies. Erebe devait devenir cet être abject, rejeté de ce monde si privilégié, c'était là leur seule solution. « Il faut le piéger, qu'il défraye la chronique, qu'on ne parle que de lui en tant que fardeau et honte. » Alors, il ne serait plus ce garçon si prisé par Amadi, au contraire, il le haïrait, l'abhorrerait. Finies les fiançailles, finies les promesses de mariage, finis les arrangements. Mais le plan était bien trop frêle, en fait, il n'y avait toujours pas de plan. Comment se débrouiller pour en arriver là ?
Déjà, il leur fallait rester discret, car si Anton les surprenait à comploter, il saurait que quelque chose se tramait et tout tomberait à l'eau. Ensuite, ils avaient conscience qu'ils pouvaient utiliser Lucrezia, car la jeune fille était sans doute contre le fait d'être vendue au premier venu comme un vulgaire morceau de viande, quoiqu'il n'en eût pas encore parlé à sa jumelle. « Je ne sais pas ce qu'elle en pense, mais je ne peux que trop bien le supposer. Elle ne voudra pas de tout ça, bien sûr. N'est-ce pas ? » Lucrezia était surprenante, mais pas au point de soudainement suivre les recommandations de son père. Ou alors, qu'on le donne à manger à un chien à trois têtes ! Sa soeur avait toujours été anti-patriarcale et ce, depuis sa plus tendre enfance, il était convaincu que rien ne pourrait la faire changer d'avis aujourd'hui, pas même le fait d'être mariée au frère de l'une de ses meilleures amies. Il avait bien vu quelle avait été sa réaction quand elle avait appris que Perséphone était en effet, elle, bel et bien fiancée au frangin de sa plus proche amie. Son avis là-dessus ne pouvait avoir changé en si peu de temps. Il leur fallait un scandale. Une annonce qui ferait vibrer Poudlard et Pré-au-lard, voire même tout Londres, en un rien de temps. « On organise une rencontre entre Lu et le Shafiq. A l'issu de ça, il suffirait que Lucrezia raconte qu'il avait été trop avenant, que la patience n'était pas son fort, qu'elle avait cru atterrir dans son lit le soir même, pour que les doutes commencent à planer. » Et là, clou du spectacle, le Shafiq serait radié de toutes listes lui offrant une compagne de choix.
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Néréo laissa le temps à Blaise d'assimiler son ébauche de plan. En soit, il n'en était pas tellement fier. Piéger ainsi quelqu'un, à sa sortie même du lieu le plus lugubre de tous les temps. Utiliser quelqu'un d'autre pour arriver à ses fins, au lieu de s'en charger lui-même. Réaliste, il l'était l'aigle, il savait bien qu'il n'aurait aucun poids. Il semblait risible qu'il se pointât devant Erebe en lui demandant, si ça ne le dérangeait pas, de bien vouloir annuler les fiançailles qui lui apporteraient cette crédibilité qu'il avait perdue pendant ses années de détention. Les fiançailles qui lui donneraient la fille la plus formidable qu'il eût jamais connue, belle, intelligente, téméraire. Les fiançailles qui le remettraient sur les rails d'un chemin bien moins controversé que celui qu'il avait suivi jusqu'ici. Autant demander à un bon vivant de se tuer, pour sûr que la réponse de l'homme serait un non pointé et qu'il rirait à la figure de Néréo et même de Blaise.
Il y avait urgence, l'anglais en avait conscience, alors il était soulagé que le plan convînt à son cousin et qu'il fût d'accord pour en parler à Lucrezia le plus rapidement possible, ce fut même lui qui proposa de ne pas attendre. Nul doute que les deux compères d'un jour joueront eux aussi un rôle dans toute cette machination, déjà parce qu'ils en étaient la tête pensante, mais aussi parce que la Zabini aurait besoin d'un peu de renfort pour appuyer ses dires et se faire entendre par Amadi. Il faudrait beaucoup de conviction pour lui faire avaler cette sordide histoire mais ils sauraient se montrer convaincants. Après tout, il en valait de l'avenir de la jolie brune, et si celui-ci ne dépendait que des talents d'acteur de ses deux plus proches connaissances, elle pouvait sans aucun doute compter sur eux.
Après ses idées, Néréo était tout ouï pour entendre ce fameux plan B auquel Blaise avait pensé. Il devait bien y avoir mille autres façons de procéder pour agir au plus vite, mais dans la précipitation, il était compliqué d'avoir les idées claires pour réfléchir à autre chose. Au départ, le Zabini ne voyait pas très bien où le serpent voulait l'amener. Qentrys ? Il était de sa maison, un bon ami à Blaise et Lucrezia. Ils avaient bien passé quelques soirées ensemble. Il ne comptait pas parmi les plus proches amis de Néréo, c'était le cas de le dire, il était à mettre dans le même sac que Perséphone et Blaise, sans nul autre doute. Il ne voyait pas bien ce qu'il venait d'ailleurs faire dans leurs manigances. Il préférait qu'une tierce personne ne vînt pas compliquer le tout : plus de gens seraient au courant de la supercherie, plus grand serait le risque que quelqu'un finît par vendre la mèche.
Néréo écouta tout de même la fin de l'explication de Blaise, peut-être y avait-il autre chose à entendre après tout. Jusque là, il ne rapprochait toujours pas le serdaigle avec cette histoire, et Blaise semblait tourner anormalement autour du pot. Quelle pouvait être cette si brillante illumination pour qu'il n'osât pas l'exposer franchement devant son cousin ? Mais il n'eut pas à attendre bien longtemps encore : trouver un autre fiancé à Lucrezia. Ce n'était, en soi, pas une mauvaise idée. Si Amadi devait abandonner l'idée de promettre la jeune fille à Erebe Shafiq, alors il se mettrait en quête d'un autre parti. En le lui servant sur un plateau d'argent, ils s'évitaient alors une deuxième proposition des plus inadéquates pour Lucrezia et évitaient de se retrouver de nouveau dans cette situation.
Mais Qentrys ? Il restait silencieux. Il y avait certainement pire, mais l'idée qu'on refusât une émancipation à sa soeur lui était assez douloureuse - car il avait cette horrible impression que ses fréquentations l'emprisonnaient, la retenaient prisonnière de la jolie personne qu'elle aurait pu être sans eux. C'était l'empêcher de grandir. L'empêcher de changer. C'était avouer que Néréo n'aurait jamais gain de cause, à la pousser à prendre ses responsabilités. Mariée à son ami, elle n'aurait nul envie ni besoin de faire de son mieux pour prouver des choses, elle n'aurait même rien à prouver du tout. « Je ne sais pas, Blaise. » Lui-même était fiancé à Perséphone désormais, le petit groupe resterait uni, soudé. Joie et bonheur. Il ne cachait pas sa mine renfrognée le préfet, il aurait aimé un autre nom dans l'esprit de son cousin. « Si c'est vraiment la seule solution. » Après tout, il n'avait pas de meilleure idée, et il n'aurait pas la vie pour y réfléchir. « Tu me promets qu'il prendra soin d'elle ? » Il avait toujours cru que ses amis la mèneraient à sa chute, raison pour laquelle il s'en était volontairement tenu éloigné, pensant qu'un jour elle comprendrait, pensant qu'un jour elle finirait par leur tourner le dos, suivant son frère dans ses choix. Il avait toujours voulu s'inscrire en modèle pour elle mais avait échoué lamentablement. Il n'avait rien d'un leader : ni la carrure, ni l'ambition d'ailleurs.
« Finalement, je crois que j'aurais encore préféré que ce soit toi plutôt qu'Erebe ou Qentrys. » Après tout, il faisait partie de la famille. Il avait beau être suffisant et désagréable au possible, il avait beau toujours vouloir montrer sa supériorité, Blaise connaissait les valeurs des Zabini. Il ne valait peut-être pas mieux que les deux autres mais il avait au moins le mérite d'avoir intégré cette importance au cours de sa vie. De nos jours, plus personne ne portait allégeance à la famille à la couleur d'ébène. Ils s'étaient fait prendre pendant la guerre, ils n'avaient plus aucune crédibilité, plus personne pour les soutenir. Ils étaient seuls. Et là était la raison pour laquelle il était si difficile de trouver la bonne chaussure au pied de Lucrezia.