[ROULETTE] burning creatures ☆ Mathilde

♛ Burning creatures

bad jokes and wrong friendships always end up in ashes - @Mathilde Dumont

Elle n'avait pas vraiment envie d'être là, Emérence. Bien sûr, vous pourriez lui dire qu'elle avait choisi de suivre ce cours, qu'elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle. L'an dernier, alors qu'elle passait ses BUSE car à Beauxbâtons l'examen ne se passait qu'en sixième année, elle avait préféré prendre le maximum d'options pour se donner le plus de chances, mais aussi pour être sûre d'obtenir assez d'équivalences françaises. Aujourd'hui, elle aurait pu s'en débarrasser, mais à vrai dire, ça calmait un peu la gryffondor d'être au contact de certaines bêtes, elle considérait davantage ce cours comme une récréation, un divertissement, une pause, plutôt que comme une option barbante et trop théorique. Pour autant, ce cours-ci n'était pas des plus intéressants. Il s'agissait de lancer des bouts de bois dans un feu et d'observer des salamandres se prélasser au milieu des flammes. Emérence s'ennuyait vivement. Tant et bien qu'elle s'amusait, elle, à balancer des cailloux sur les animaux, les faisant courir à toute vitesse entre les bûches, ce qui était selon elle, bien plus intéressant. Elle continua jusqu'à ce que le professeur finisse par lui faire une remarque, alors elle s'assit et attendit que le temps passe. Mais il semblait que chaque seconde durait des heures.

De l'autre côté des flammes, elle regardait deux garçons qui semblaient bien rire. L'un d'eux avait sa baguette à la main, ce qui était étrange, car il était rare d'avoir besoin de se servir de sa baguette lors de ce cours. Surtout dans celui-ci, elle ne voyait pas quelle utilité ils pouvaient bien en avoir. Soudain, le feu s'emballa, les flammes montèrent haut dans le ciel, propulsant des étincelles sur les élèves, les salamandres s'excitaient, ne savaient plus où se rendre tant leur terrain de jeu était devenu immense. Les deux garçons rigolaient, observant le chaos qui était en train de se créer : nul doute que c'était là l'objectif qu'ils avaient eu. Emérence dut se lever car le feu commençait à se rapprocher dangereusement d'elle. Le professeur faisait son possible pour reprendre le contrôle du bûcher. Certains élèves s'empressaient de l'aider. La française savait pertinemment qu'elle ne serait pas capable de se joindre à eux à cause de son piètre niveau en sortilège, alors elle s'empressa de se rendre utile autrement : en passant un bon sermon aux deux imbéciles.

Elle commença à contourner le feu. Ils n'avaient plus vraiment la même allure, le sortilège les dépassait, ils semblaient plus avoir la frousse qu'autre chose désormais, et elle les observas s'enfuir en courant. Lâches. Elle regarda autour d'elle s'il n'y avait pas un autre endroit où elle aurait pu apporter ses compétences. Son regard se fixa alors sur la robe d'une élève qui était en train de prendre feu. « ATTENTION ! » Elle s'écrira en courant à sa rencontre, baguette sortit. Ça, ça devait être néanmoins dans ses cordes. « Aguamenti ! » Le feu sur la cape diminua un peu, mais pas assez. Elle réitéra le sortilège, mais cette fois-ci, l'effet inverse se produisit. La magie déraillait dans cette école. Alors elle ne vit pas d'autres solutions, elle retira sa propre cape et commença à frapper sur les jambes de la demoiselle pour étouffer les flammes. C'est quand elles furent enfin éteintes qu'elle observa le visage de celle qu'elle venait d'aider. Mathilde. Son ancienne amie. Son ancienne amie qui avait plus ressemblé à une soeur l'année dernière pour elle, fille de James Martell, le seul adulte en qui Emérence plaçait une certaine confiance. Elle relâcha son poignet qu'elle avait attrapé comme un réflexe pour la faire reculer car elle était bien trop proche du brouhaha et risquait de provoquer un nouvel incident. Elle se recula comme on s'éloigne de la peste. Emérence ne l'avait plus approchée depuis qu'elle avait appris qu'elle était atteinte de l'épidémie, ni elle, ni son père. Elle ne voulait pas courir le risque de perdre sa magie, elle ne voulait pas courir le risque d'être malade. Malgré tout, Mathilde lui manquait, mais elle ne pouvait pas se permettre de rompre ses promesses personnelles. Autour d'elles, le calme semblait revenir peu à peu, elle entendit le professeur annoncer que le cours se terminerait ici. Confuse, Emérence ne savait pas sur quel pied danser, si elle devait tourner les talons ou expliquer à son amie les raisons qui la poussaient à agir ainsi. Elle n'avait jamais été très diplomate, et ne se justifiait que peu. Elle faisait ses choix sans penser aux conséquences que cela impliquait sur autrui. « Mesdemoiselles, vous êtes restées pour m'aider à ranger ? C'est très aimable de votre part. » Emérence décrocha d'un coup ses yeux qui étaient restés rivés sur Mathilde. Prises au piège. Elles ne pouvaient plus se défiler. Et la gryffondor n'avait plus aucune chance d'éviter la Dumont.

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Les gants de protection l'attendaient là, tendus par la professeure. Emérence s'en saisit, les enfila, et la voilà qui était partie à la chasse aux salamandres au milieu du bûcher qui avait considérablement réduit en taille, mais qui avait fini par laisser quelques unes des créatures en dehors du foyer brûlant. Emérence soupirait, elle avait d'autres choses à faire, d'autres cours qui commenceraient dans une dizaine de minutes, et ce temps-là, c'était du temps en moins sur sa pause. Il fallait avouer que ce cours n'avait pas été trop intense, et donc, qu'elle avait déjà largement pris une pause, mais un peu plus ne l'aurait pas non plus dérangée. Finalement, elle réussit à se concentrer et s'évertuait à mener à bien sa tâche, lorsque la voix de Mathilde la surprit. La poufsouffle avait fini par la rejoindre, et lui poser la question qui semblait lui brûler les lèvres depuis un bout de temps. La lionne s'arrêta net dans sa course poursuite, resta stoïque. Elle savait que cette confrontation finirait par arriver, que Mathilde se demanderait bien pourquoi, après tant de temps passé ensemble, et une si grande complicité, tout s'était effondré en l'espace de quelques mois pendant lesquels la jeune fille avait été enfermée, et pendant lesquels Emérence n'était jamais descendue dans les cachots pour lui rendre visite. Elle se savait cruelle, mais elle voulait avant tout se protéger. Elle était bien souvent des plus égoïstes, pensait toujours à ses intérêts avant ceux des autres. Elle ne pouvait se résoudre à aller la voir, tant qu'elle n'était pas persuadée qu'elle ne courrait aucun danger, quand bien même elle sut que son amie se sentait probablement seule, là-bas, dans ces cages austères et lugubres. Emérence ne voulait courir aucun risque, ne voulait pas s'exposer à quelque maladie que ce soit. Et même maintenant que le danger avait été levé par le ministère, Emérence se rendait compte qu'elle ne leur faisait plus confiance, trop de choses leur avait été cachées, et la fuite de certains malades avaient semblé précipiter pas mal d'événements. Comment repérer ceux qui mentent dans un monde si ravagé par les dissimulations ? Elle en savait quelque chose, elle, et c'était bien pour ça qu'elle avait pris pour habitude de se méfier de tout. Le fait était qu'aucun malade n'avait recouvré ses facultés magiques : toujours atteints, Emérence ne voulait pas en entendre parler, et encore moins les approcher.

Mais confrontée comme elle l'était là à son amie, elle n'avait pas le choix que de supporter son regard et de répondre à la question qui la taraudait. Il n'était plus question de l'éviter, c'était elle qui venait désormais jusqu'à Emérence, avide de savoir si c'était par pusillanimité que la rouge et or se défilait sans cesse à son approche. « N... » Le non refusait de sortir, il aurait de toute façon été bien hypocrite de sa part de le laisser passer la barrière de ses lèvres. Elle n'était pas terrifiée à l'idée de lui parler, n'avait pas une boule au ventre actuellement, mais elle prenait simplement des mesures de précaution, comme lorsqu'on se lave les mains pour éviter d'attraper un vilain microbe laissé sur une poignée de porte. « C'est pas ça le problème. » Honnêtement, si le souci était simplement que Mathilde avait une tronche à effrayer le premier gamin qu'elle croisait, elle aurait passé outre, et elle aurait peut-être même aidé la Dumont à changer cette difficulté de façon à ce qu'elle puisse approcher n'importe quel enfant sans problème. Mais ça venait de l'intérieur, c'était une menace constante qu'elle portait en elle. Elle n'en avait pas peur, elle préférait simplement ne pas vivre dangereusement à s'exposer à une épidémie qui, à la seule condition qu'elle ne côtoie pas ceux qui en étaient atteints, ne devrait normalement pas l'atteindre. « C'est pas toi, c'est que, tu vois, je voudrais pas devenir... » Elle perdait ses mots la gryffondor, elle qui avait l'habitude de toujours beaucoup l'ouvrir. Elle savait que ses propos pourraient blesser Mathilde, et ce n'était absolument pas là son intention. Emérence n'était déjà pas très bien intégrée partout où elle allait, elle ne pouvait pas se permettre en plus de ressembler à une simple moldue, auquel cas, il ne lui resterait alors plus rien, car elle ne pouvait s'imaginer sans aucune magie. Mathilde devait bien pouvoir le comprendre ça, que ça ne changeait en rien la personne qu'elle était. Elles pouvaient toujours s'envoyer des hiboux, il n'y avait pas mort d'homme.

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Il était fou de penser que Mathilde pouvait être aussi bornée. Emérence savait qu'elle-même avait du mal à changer ses opinions comme ça, et se mettait aussi souvent sur la défensive, mais elle avait beau expliquer à Mathilde qu'elle n'avait pas changé, qu'elle était toujours la même et qu'elle le savait bien, la poufsouffle restait retranchée dans ses idées, à penser que la gryffondor l'évitait parce qu'elle ressemblait aujourd'hui à une moldue. Emérence n'avait rien du tout contre les moldus - même si elle n'aurait cédé son statut de sorcière pour rien au monde - mais elle ne se refusait pas à les approcher simplement parce qu'ils n'étaient pas doués de magie. Elle n'avait pas cette manie de la sorcellerie, elle s'entendait bien avec tout le monde, sorcier, cracmol ou moldu, et Mathilde aurait pourtant bien dû le savoir. « Ce n'est pas toi Mathilde, je viens de te le dire ! » Elle perdait un peu patience Emérence, et surtout, elle perdait en assurance. En vérité, son amie la déstabilisait et la provoquait sur un terrain glissant duquel la française avait du mal à s'extirper. Elle ne savait pas comment formuler ses phrases, comment lui faire comprendre les subtilités. Elle n'avait pas un méchant fond, Emérence, mais elle pouvait parfois réfléchir de manière complètement stupide et aurait ensuite du mal à changer d'avis. Mathilde reprit la parole et continuait son accusation contre Emérence avant de tourner les talons, reprenant la tâche qu'on leur avait donnée. Elle soupira longuement. Elle ne savait plus quoi dire, quoi faire. Son amie lui manquait, mais elle devait bien comprendre la terrible position dans laquelle était la griffonne. Ce n'était tout de même pas de sa faute si Mathilde avait continué à rendre visite à son père alors qu'il était malade, ou si elle avait fréquenté des gens atteints de cette horrible épidémie. Elle ne pouvait tout de même pas lui remettre tout sur le dos. Emérence restait persuadée qu'une certaine contagion existait, et jamais elle n'aurait prôné le contraire. Elle était bien sotte de ne pas écouter les médicomages, bien sotte de n'en faire qu'à sa tête et de croire qu'elle seule détenait la vérité absolue.

Ce fut elle cette fois si qui se dirigea vers la poufsouffle, une terrible envie d'avoir le dernier mot au creux de son coeur. Pour qui passait-elle aux yeux de Mathilde ? Pour une amie sans coeur ? Elle ne pouvait s'y résoudre. « Je ne veux pas attraper ta maladie, tu peux le comprendre non, bon sang ! » Elle ne comprenait même pas qu'on ait pu relâcher ceux qui étaient en quarantaine, ça n'avait pas de sens et c'était terriblement dangereux pour les autres. Où était la raison du ministère ? Peut-être était-ce leur but d'avoir un peuple complètement anéanti par la maladie, ça rendait les gens faibles et dociles, peut-être y avait-il un coup d'état qui se préparait, un complot, quelque chose de grand et de terrible. Elle voulait rester vivante et vivace le jour où ça arriverait, elle défendrait la nation si besoin, mais elle ne pouvait pas le faire si elle était terrassée elle aussi par ces maudits symptômes. « Ce n'est pas pour ça que je ne veux plus te parler, au contraire, tu me manques beaucoup Mathilde. » Elle avait soudain rajeuni de dix ans, petite fille frêle et immature, têtue, butée, qui refuse de croire que le Père Noël n'existe pas, quand bien même elle avait mille preuves sous les yeux et une histoire des plus plausibles expliquée. « On pourrait s'envoyer des hiboux, qu'en penses-tu ? C'est un bon compromis. » Petite fille qui ne voyait le mal nul part, qui ne comprenait pas que ses actes étaient des plus répréhensibles, que de l'autre côté, Mathilde souffrait de ses propos et de ses comportements. Petite fille naïve et égoïste qui ne cesserait jamais de penser à elle et seulement elle.

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Elle ne supportait plus la gryffondor. Elle ne supportait plus ces éloignements, ces cris, cette tension qui s'immisçait entre elle et sa soeur de coeur. Elle ne supportait plus non plus de parler dans le vide, de parler en ayant si tort et en refusant d'admettre qu'elle était dépassée par tous ces événements. Elle ne supportait plus de ne pas céder pour ne pas paraître faible, ce n'était pas sa manière de faire. Elle ne supportait plus le regard de Mathilde, ses propos, de se faire détester. Emérence était née pour se faire aimer, pour supplier les autres de l'apprécier. Pourquoi continuer alors que tout ce qu'elle réussissait à faire c'était de provoquer de la haine chez son amie ? Elle voulait que tout s'arrête, cette histoire d'épidémie, de maladie, de bizarrerie, que tout ça parte loin d'elle et loin de l'école qu'elle chérissait. « Je veux juste que tout aille mieux. Faire mieux. » Elle avait conscience de ne pas avoir été là quand son amie en avait le plus besoin. Elle avait été enfermée, accusée, comme tous les autres malades. A juste titre. On ignorait encore s'ils étaient dangereux ou non pour la santé sorcière. Elle avait voulu se protéger, Emérence, comme elle l'avait toujours fait. Elle pensait à elle avant les autres, elle était son propre garde, son propre remède. Elle n'avait jamais eu une mère, un père, un frangin comme modèle, personne pour lui montrer la bonne voie, les bons choix, les bonnes actions. Parfois Emérence se comportait comme s'il n'y avait qu'elle dans ce monde et que tous les autres n'étaient qu'un mirage posé là pour la mettre à l'épreuve.

Mathilde prit la fuite, ôtant ses gants, se dirigeant Dieu savait où. Emérence soupira. Elle était décidément terrible à ce genre de chose. Elle regrettait que Mathilde l'ait confrontée, elle regrettait que les choses se passent ici. Mais elle avait décidé Emérence qu'aujourd'hui serait le jour où elle pourrait de nouveau regarder la Dumont avec un sourire au coin des lèvres, et cette boule au ventre en moins. Elle voulait retrouver la chaleur de son amie, et pour que ce soit le cas, il lui fallait faire des efforts, de gros efforts. Elle lui courut après, voyant qu'elle s'était visiblement dirigée vers l'enclos des hippogriffes. Elle se savait peu à l'aise avec les créatures la gryffondor, alors elle se tint à distance le temps que Mathilde lui donne les caresses qu'il réclamait. Si elle comptait passer son après-midi ici, Emérence serait bien dans de beaux draps... Alors la française avança, doucement, jusqu'à attirer le regard de l'animal, elle s'avança, s'inclina, toute en grâce et en délicatesse. Elle se mit alors du côté de l'un des flancs de l'hippogriffe et imita les gestes de son amie. Elle l'impressionnait, la bête, elle était si immense, si imposante, si majestueuse. « J'ai peur. » murmuré comme dans un soupire, elle sait que Mathilde ne l'aura pas entendu, en plus de sa voix timide, il y avait le grattement de sabot de l'hippogriffe sur le sol qui l'aurait empêché ne serait-ce que de remarquer que quelque chose était sorti de la bouche d'Emérence. Alors elle prend son courage à deux mains, et c'est plus fort qu'elle répète. « J'ai peur Mathilde. » Peur de tout, du monde, de Poudlard, des gens, de la magie, de perdre sa magie. Rien ne va. Tout était partie en chute libre depuis son enfance, les années se montrant de plus en plus cruelles envers elle. Elle n'en pouvait plus Emérence. Elle avait trouvé une certaine sérénité en ayant rejoint le sol anglais, et elle ne voulait la laisser s'échapper pour rien au monde. Mais Poudlard ? Tous ces élèves ingrats ? Tous ces avenirs compromis ? Elle ne pouvait plus le supporter. Emérence ne savait pas ce qu'elle allait faire d'elle l'année prochaine, se plonger dans un nouvel inconnu, sûrement. Ça lui foutait la trouille. Elle n'était pas du genre à apprécier le quotidien, mais elle aurait bien tout de même voulu un semblant de calme, quelques jours, quelques mois. Trouver une accroche, trouver un roc. Elle ne s'était jamais sentie si seule. « Je ne sais plus quoi faire alors je fais n'importe quoi. Tout ce que je veux, c'est garder la seule chose qui me permet de penser que je suis spéciale. Toi tu l'es, avec ou sans magie. Moi je n'ai rien. » Sans magie elle serait alors propulsée dans un monde complètement nouveau, seule, sans un seul moyen de pouvoir se sauver elle-même. Un grand plongeon pour lequel elle n'était pas prête.