Quête de Serpentard - PART I

Il avait attendu ce moment avec impatience. Il avait fait partie, Yassen, de ceux qui avaient aidé à l’organisation du parcours du combattant. Chaque année, à Durmstrang, il avait entrainé les membres de son club de combat pour qu’ils puissent le parcourir le plus rapidement possible. Il se doutait bien que le niveau de difficulté serait plus bas – il fallait laisser une chance aux Anglais – mais cela ne le rendait pas malheureux pour autant. Enfin, il aurait une occasion de montrer sa force, de se battre, de repousser ses limites. Même si Yassen se plaisait bien dans sa nouvelle école, il s’ennuyait de Durmstrang, de temps à autre.

Revêtu d’une tenue de combat, il écoutait les consignes, non sans lancer des sourires entendus à ses amis, s’exprimant dans un bulgare enchanté. Une fois que le représentant eut fini, le Yordanov se plaça sur la ligne de départ. Soudainement concentré, il démarra au quart de tour quand le signal fut lancé.

En tête, il aperçut un feu un peu plus loin, sur l’herbe, parmi les bûches et branchages. Il ne s’élevait pas si haut, mais la chaleur indiquait qu’il était bien réel. Accélérant, le jeune homme s’élança, sauta au-dessus des flammes, comme s’il avait fait cela toute sa vie. Ce n’était pas la véritable épreuve ; la véritable épreuve, celle des Dragons, l’attendrait plus loin.

Dans la clairière, on leur expliqua l’épreuve des Dragns, des combats un contre un, où le perdant ne pourrait utiliser la magie pour le reste du parcours, un châtiment bien risible aux yeux du Bulgare. Il ne comptait pas perdre, de toute façon. Cherchant des yeux la seule personne qui pourrait être à sa hauteur dans une bataille, le jeune homme beugla : « Helge ! » C’était un cri rauque, animal, sortant du plus profond de ses tripes, comme si le combat ramenait au monde une autre partie de lui. Quand le Norvégien fut proche de lui, le Bulgare serra les poings, craqua ses jointures, plus pour la théâtralité que par réel besoin. Le temps d’un instant, les deux amis retrouveraient ce qu’ils partageaient de plus précieux : la passion du combat, l’amour de la guerre.

Willa écoute les instructions, une pointe de panique sur son visage blâme.

Habillée d'une tenue basique mais plutôt souple, elle se demande pourquoi elle est là. Un parcours du combattant. Elle sent qu'elle va devoir se surpasser pour ne pas se ridiculiser devant tous les Serpentard de l'école. Elle sent aussi que cela va être très dur. La jeune femme soupire, regrettant de tout son coeur sa présence ici. Tandis que le représentant terminait ses explications vaseuses, Willa se mords les lèvres jusqu'au sang. Puis il lança le départ, prenant la Serpentard par surprise. Elle s'élança, courant aussi vite qu'elle le pouvait, manquant presque de se casser littéralement la gueule par terre. Elle n'était pas agile, Willa. Frêle, petite, sensible. Ce n'était pas vraiment le profil idéal, mais soit. Elle court, tout en sachant qu'elle est sans doute dans les derniers. Plus elle avançait, plus la chaleur augmentait. Le feu était tout proche. En le voyant prêt d'elle, elle brusquement arrêta sa course, hésitante. Fermant les yeux, respirant avec peine, elle recula pour prendre de l'élan. Puis, en serrant les dents, elle sauta au dessus des flammes. Elle manqua de brûler son pied droit, et eut un soupire de soulagement en sentant ses pieds se poser brutalement sur le sol un peu plus loin.

Un peu essoufflée, elle en avait déjà marre. Arrivée dans la clairière, elle tentait de ne pas se barrer en courant quand ils parlèrent de combat. Mains nues ou avec la magie. Son choix était plutôt simple, à vrai dire. Willa a une aptitude physique quasiment nulle, alors se battre contre quelqu'un à mains nues était un peu... perdu d'avance. Elle sort alors sa baguette de sa poche et regarde autour d'elle contre qui elle pourrait bien se battre. Finalement, elle portait son regard sur une jeune fille, qui semblait elle aussi chercher quelqu'un. La jeune femme l'avait sans doute croisée quelque part, mais elle oubliait assez vite les visages. Willa s'approcha, doucement de la Japonaise, avec un regard mélangé entre la gêne et la froideur. « On se lance ? »

Helge jouit d'avance de pouvoir participer à cet événement. Évidemment, aucun adulte n'a été mis au courant, peut-être même que leur directeur de maison n'a pas été alerté. Le parcours est comme toutes les années, organisée selon les règles des slaves, selon les fratries de Durmstrang. Cet hommage fait chaud au cœur, et Helge reste silencieux quelques secondes avant d'applaudir et de s'égosiller pour encourager et montrer sa satisfaction. Près de lui, il sent Yassen qui bouillonne d'impatience. Lui qui se sent enchaîné de ne pas pouvoir faire ce qu'il veut, il compte sans doute gagner ce parcours, coûte que coûte, pour prouver à tous et à lui-même sa force et sa puissance. Comme si on pouvait en douter. Quand le départ est lancé, Helge prend son élan et s'élance à travers la forêt pour aller jusqu'à la première transition. Il est en tête à tête avec Yassen, et tous deux sautent au dessus du feu avec agilité et grâce. On dirait qu'ils prennent leur envol.

Yassen est prêt à tout. Quand il crie son nom, Helge se retourne tel un lion prêt à combattre. Le cri de guerre n'a pas besoin d'être lancé, tous les deux se regardent tels des gladiateurs, prêts à tout pour arriver à leur fins. Il aurait été trop facile de combattre contre un anglais ou un français. Là, chacun a un adversaire à sa taille. Chacun est prêt à mordre la poussière, ou à la faire danser. Autour d'eux, quelques duos commencent à se former également, tous semblent hésitants. Helge est prêt à montrer l'exemple. « Tu ne peux pas te passer de moi. » Il s'élance avec légèreté vers son assaillant. Au dernier moment, Helge saute dans les airs et déploie sa jambe droite pour lancer son coup et atteindre le buste de Yassen. Que le meilleur gagne.

Le duel est sans merci, des deux côtés la bataille fait rage. Aucun des deux ne veut laisser l'autre gagner. Comme à chaque combat, ils se donnent corps et âmes. Quand on assiste à leur combat, on peut croire qu'ils dansent, qu'ils volent. Chaque mouvement est fait avec grâce, chaque coup est donné comme un cadeau. Ils se donnent l'un à l'autre. C'est intime mais il n'y a qu'eux qui le savent. Helge s'élance pour frapper Yassen, ils sont à égalité, jusqu'à ce qu'il entende un cri derrière lui. Un grognement. Helge se laisse distraire, et Yassen en profite. Il sort gagnant du combat, le sourire aux lèvres, et Helge ne peut pas lui en vouloir, ce sourire il l'aurait bien volé pour l'accrocher à son cou.

Avant d'arriver à l'étape suivante, Helge sait qu'il ne peut plus utiliser sa baguette. Il la confie à l'un des organisateurs, puis reprend le parcours. Participer sans magie ne lui fait pas peur, il a été habitué à toutes sortes de situation lors des braquages organisés par sa famille. Helge s'élance avec agilité sur le rocher glissant. Le liquide visqueux le fait glisser une première fois, mais on apprend pas à un sage à faire des grimaces. Il s'élance une seconde fois, et se retrouve en haut en quelques sauts. Le vandale est invisible, agile, tel un ninja. Il suffit de se concentrer. Il saute une dernière fois, pour arriver devant la deuxième épreuve. Un immense chien à trois têtes lui fait face. C'est de là que venait le grognement qu'il a entendu pendant son combat avec Yassen. La bête est magnifique et Helge ne peut pas s'empêcher de l'admirer. Mais rapidement, il se rappelle leur mission. La remarque de Zoya n'est pas bête, il se range près d'elle, toujours impressionné par elle, par ce qu'elle dégage, par ce qu'elle est capable de faire et d'assumer, alors qu'elle est une fille.

Il réunit quelques serpentards qui ont perdus la première épreuve, puis les met au courant de son idée. La distraction c'est jouer avec l'oeil des spectateurs. Le chien est leur spectateur, et si ils veulent le maîtriser, et l'attirer, il faut lui donner à voir quelque chose d'intéressant. Helge propose qu'un groupe cherche de la nourriture, dans cette forêt il doit y avoir de quoi rassasier le chien, pendant qu'un autre groupe lui fera des acrobaties sous son nez. Lui s'occupera de monter sur lui pour le chatouiller et l'empêcher d'attaquer les sorciers qui essaieront de le maîtriser avec leur magie. Helge est prêt à s'élancer, il n'attend plus que le top départ.

Il ne pourrait jamais se passer de son camarade. Les deux se collaient à la peau, se livraient une bataille qui contrastait avec celles des autres autour d’eux. Leur combat était empli de grâce. Chacun savait se battre à la perfection, les mouvements étaient d’une grande beauté, mais ce n’était que deux bêtes sauvages qui portaient des masques humains. Yassen évite le coup de jambe de son camarade en se baissant. Il se relève et passe aussi à l’offensive. Il profite de la distraction de son meilleur ami pour lui assener le coup victorieux, non sans lui murmurer en russe qu’il n’accepterait pas qu’il regarde quelqu’un d’autre que lui. Il y a un sourire sur les lèvres du Bulgare qui enlève la menace des mots, qui manifeste l’attachement.

Helge confie sa baguette à l’un des organisateurs. Yassen sait pertinemment que son ami serait meilleur que la moitié des participants du parcours sans utiliser le moindre enchantement. N’écoutant pas la moitié du discours de l’organisateur, le jeune homme s’élance en direction du rocher, prend tout l’élan possible. Dans sa course, il sort sa baguette et lance un sort en direction du rocher, afin d’éliminer toute la substance visqueuse sur une petite partie de la pierre. Il y dépose son pied avant d’enchaîner avec une pirouette dans les airs, pour parcourir le reste de la distance. Une fois atterri au sol, il continue sa course pour parvenir à un chien à trois têtes. Sakura paraît incertaine, Zoya semble prête à foncer, donnant déjà des indications ; les gens sans magie se disperseraient pendant que les autres trouvent un moyen de vaincre la vête. C’était rationnel, intelligent. Helge a pris le contrôle du groupe en charge de la distraction. Il est dans les airs, sur une des têtes, s’assurant que ses camarades ne se fasse pas attaquer par la créature.  

Yassen n’avait jamais affronté de chien à trois têtes, mais il savait comment affronter un dragon en raison de sa famille. Il sort sa baguette : « Il faut viser les yeux. » Il tente un sortilège de Conjonctivite qui ricoche sur la peau de l’animal. Le Yordanov serre les dents, mais ne démord pas ; il court, il esquive. Son regard se porte sur une roche un peu plus haute, qui lui donnerait l’altitude nécessaire pour parvenir à jeter son sortilège. Il attire l’attention de l’animal sur lui. Une fois sur son piédestal, il vise les yeux de sa baguette, lance son sort. Selon le lancinement de douleur qu’il entend, il a réussi à atteindre sa cible. Combien de têtes avait-il pu aveugler ? Il ne le sait pas. Il avertit ses camarades, afin qu'ils ne prennent pas la confiance devant le cri de douleur de l'animal : « Le chien est encore une menace. Il se fiera à ses autres sens et à ses autres têtes. » Il sourit : « Mais on peut le leurrer. » Maintenant, le chien serait soumis à l’ouïe, au toucher, à ses autres têtes. Il serait si facile de créer la discorde. Il n'était plus qu'une pauvre marionnette soumise aux attaques des Serpentard.

Le chien était donc devenu une marionnette. D’en haut, Helge avait une vue imprenable sur ses camarades. Il voyait Yassen, qu’il était beau, son partenaire. Mais il ne se laissa pas distraire. Sa mission était simple, et il ne fallait pas la rater. Atos était parti chercher à manger pour l’attirer, et bientôt toute l’équipe des perdants revint avec les bras plein de trouvailles. Ils étaient victorieux. Helge entend la remarque de Brooke. L’assommer avec un sort de lévitation. Ce n’est pas forcément une mauvaise idée, mais c’est beaucoup trop risqué. Comment assommer trois têtes en même temps ? A l’adresse de ses compagnons, Helge crie des indications, en essayant de ne pas tomber de plusieurs mètres de hauteur. Le chien est aveugle, mais il la sent bien au-dessus de lui. Il suffirait d’un coup de patte pour la projeter en l’air et l’assommer. « PERSONNE N’A SUIVI LES COURS DE SOINS AUX CREATURES MAGIQUES CETTE ANNEE ? » demanda-t-elle. Mais personne ne lui répondit, peut-être ne l’avaient-ils pas entendu. En tout cas, le chien était bien actif malgré sa cécité, et ce qui l’intéressait c’était la viande. Il avait senti la nourriture que le groupe avait ramenée, et il commençait à bouger dans tous les sens. C’était le moment de lui donner ce qu’il voulait, le moment idéal pour l’assommer, lui jeter un sort, le mettre hors jeu. A ses camarades sans baguettes, Helge fit de grands signes. « ALLEZ-Y » cria-t-il. Il n’aurait plus de voix avant la fin du jeu, mais il était certain que leur plan allait marcher.