OS - Quête de serpentard - La pierre (Atos)

Il tenait entre ses mains le pouvoir. Il tenait ce qu'il avait voulu depuis tant de temps. La personne précédente venait de la lui passer et Atos avait refermé son poing tout de suite pour ne pas que la fine pierre s'échappât. Ses bouts pointus lui rentraient dans la chair, et Atos quitta les membres de sa maison pour aller se retirer dans un coin où il serait au calme. Une demi-heure. C'était tout ce qu'il avait. Ce n'était pas suffisant mais c'était mieux que rien. La pierre n'avait pour lui aucune connotation de deuil. Il ne comptait pas s'en servir pour ramener un fantôme dans son sillage. Il voulait l'examiner, percer ses secrets. Il devait bien y avoir un sortilège, un moyen d'en créer une autre, de la dupliquer, de posséder le pouvoir de résurrection entre ses doigts. C'était tout ce qu'il désirait à travers cette pierre sûrement créée avec de l'onyx ou de la tourmaline noire. Il la tourna, retourna, l'inspecta dans tous les sens. Quelles étaient les informations qu'elles possédaient ? La bague était fendue, et il se demanda comment elle pouvait encore contenir un si grand pouvoir après avoir traversé tant d'obstacles. Elle était emplie de magie noire, il le sentait. Ce n'était pas un objet pur. Ça le conforta dans ses actions : il y avait, dans cette forme de magie, quelque chose de merveilleux et de subtile, une magie puissante qui ne pouvait pas être considérée dangereuse, elle était éblouissante. Atos avait l'impression de se brûler les mains au simple toucher d'un objet d'une si grande valeur et importance. Se pouvait-il que lui aussi fût un futur inventeur ? Qu'il réussît à mêler le noir et le blanc pour former un amas d'anthracite prodigieux ? Il y avait dans le coeur du serpentard un peu d'espoir et beaucoup de grandeur, et son parcours de vie l'emmenait droit vers des chemins qui ne pouvaient que renforcer la destinée qu'il croyait écrite pour lui. Atos était dépourvu de tout humilité, et il se voyait déjà réconcilier le monde avec des forces que les autres croyaient abjectes.

Il tourna encore la pierre, mais cette fois, il eut l'impression que quelque chose s'en dégagea. Devant lui, des personnes mi-femmes mi-fantômes le regardaient d'un air triste et résigné. Il n'avait pas voulu rentrer en contact avec un mort - il le faisait déjà quand ça le chantait - il voulait passer ces précieuses minutes avec sa réflexion. A force de la tenir entre ses doigts, il avait réveillé le pouvoir de la pierre malgré lui. Atos regarda néanmoins qui avait bien pu venir à lui. Ces visages lourds et pleins de haine il les connaissait pour les avoir vus pendant des mois dans ses pires cauchemars. Des visages de femme. Des visages abimés, mutilés, attristés par une mort, la leur, qui avait été trop subite parce qu'elles n'avaient pas eu le temps de l'envisager, trop lente, parce qu'elles avaient dû souffrir pour se laisser emporter par les bras de la Mort.

Il tomba à genou, se laissant dominer par celles à qui il avait tout pris. Il voulait qu'elles s'en aillent, qu'elles ne le hantent plus. Il n'avait rien fait de mal, rien. Il avait fait ce qui était juste. Des sacrifices sont nécessaires pour la science, ces sacrifices il les avait faits, elles l'avaient aidé à le faire. « Je réussirai » C'étaient les seuls mots qu'il voulait prononcer. Il finirait par se moquer de la Mort elle-même, il finirait par faire revenir ceux sur qui il avait expérimenté. Ce n'était qu'un état provisoire, il fallait le croire. Atos les laissa le calomnier, l'injurier. Il assumait ses actes et ses choix. Il était coupable. Mais il finirait par être leur ange gardien, leur sauveur. Il se ferait pardonner, pour tout. Il leva la tête, croisa leurs regards noirs. Dans les yeux de ces femmes, de simples moldues, il voyait un désespoir profond mêlé d'une aversion incommensurable à son égard. Il ne put s'empêcher de penser à elle, à Colombe, à ce même regard qu'elle lui avait lancé tant de fois. L'avait-il tuée, elle aussi ?

Atos ne pouvait plus continuer son inspection minutieuse de l'objet. La menace qui planait au-dessus de lui le lui en empêchait. Il semblait las et harassé par les plaintes qui résonnaient en écho dans son esprit. Il n'arrivait pas à se concentrer. Pire encore, il ne voulait pas se concentrer. C'était comme s'il prenait les coups moraux avec une volonté excessive de devenir un martyr, à qui l'on jetait des propos acerbes pour la bonne cause. Anéantissez-moi, que je renaisse de mes cendres, anéantissez-moi qu'on me pardonne de mes crimes, qu'on me fasse payer pour ce que j'ai fait, qu'on oublie mes méfaits. Au loin, il entendit des appels. Son temps était passé, il lui fallait passer le flambeau. Il laissa une dernière larme couler de sa joue. Sa rédemption était faite.